LA REVALORISATION de certains actes techniques entérinée le 20 novembre par l'assurance-maladie et les syndicats de médecins CSMF, SML et Alliance a déclenché une vague de réactions ces derniers jours. MG-France s'est inquiété dès sa signature que cet avenant, avec celui prolongeant la majoration provisoire clinique (MPC) de 2 euros jusqu'à la fin de la convention, «ne valorise les spécialistes d'organe et pompe un peu plus les finances publiques» (« le Quotidien » du 28 novembre). Le syndicat s'inquiète de ce «deux poids, deux mesures» et redoute que le passage du C à 23 euros programmé sous conditions au 1er juin 2008 ne soit compromis (1). La polémique a pris de l'ampleur ce week-end après la parution d'un article dans « le Parisien » annonçant la revalorisation en janvier 2008 de quelques actes techniques. Ce dernier insistait sur les hausses les plus importantes : «Pansement chirurgical en cas de brûlure à la main: (+ 32,7 %) , opération d'un abcès à l'oreille (+ 48 %) ». L'article était assorti de commentaires critiques du président de MG-France ainsi que du directeur de la Mutualité française, selon qui «les spécialistes se sont dépêchés d'engranger des augmentations pour échapper au gel des tarifs avec l'entrée en vigueur de la LFSS 2008».
«On donne toujours aux mêmes, à quelques spécialités techniques, s'insurge le Dr Martial Olivier-Koehret, président de MG-France. Dans le même temps, des spécialités cliniques sont sacrifiées et les généralistes sont oubliés. Les comptes de l'assurance-maladie sont mauvais et vont continuer à se dégrader maiscertains savonnent la planche en distribuant des petites enveloppes, ce n'est pas à la hauteur des enjeux du pays. Il est nécessaire de remettre à niveau la médecine générale.»
Après la secousse, de nombreuses répliques.
Les partenaires conventionnels ont répliqué à la charge virulente de MG-France. Dans un communiqué, l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (UNCAM) a rappelé la semaine dernière que «le rééquilibrage des tarifs des actes techniques s'inscrit dans un programme en trois étapes défini en juillet dernier et approuvé par le gouvernement».
«La réactualisation de la valeur de certains actes au 1erjanvier 2008 correspond à la mise en oeuvre de la 3ephase de la réforme des actes médicaux techniques au cours de laquelle la valeur de certains actes a été remise à niveau et d'autres au contraire ont vu leur valeur réajustée car surévalués», souligne la CSMF. Selon le syndicat, la mise en place de cette 3e phase ne se traduira pas par un surcoût pour les assurés sociaux, mais «par un gain pour l'assurance-maladie d'au moins 15millions d'euros en année pleine grâce à la révision à la baisse de la valeur de certains actes de radiologie, de cardiologie interventionnelle ou de médecine nucléaire». Chiffres que confirme l'UNCAM. «Arrêtons de faire peur aux patients en leur faisant croire que les prix des spécialistes deviennent exorbitants, poursuit la CSMF. C'est faux et malhonnêtes et surtout, c'est irresponsable et dangereux de dissuader l'accès aux soins sur des rumeurs.»
Dinorino Cabrera : beaucoup de bruit pour rien.
Le Dr Jean-François Rey, président de l'UMESPE, qui regroupe les spécialistes de la CSMF, souhaite que l'on «arrête d'opposer généralistes et spécialistes» : «Les revalorisations ont été très équilibrées entre généralistes et spécialistes en 2007 avec l'augmentation du C à 22euros au 1erjuillet et la mise en place progressive de la CCAM technique.» L'UNOF, branche généraliste de la CSMF, qui tenait son comité directeur ce week-end, a réaffirmé sa volonté de voir le C passer à 23 euros au 1er juin 2008. «Le moindre retard serait perçu par les professionnels comme une gifle à leur spécialité», souligne le syndicat.
«Cette affaire, c'est beaucoup de bruit pour rien, juge pour sa part le Dr Dinorino Cabrera. Ces discours polémiques sont dévalorisants pour notre profession. Les généralistes ne sont pas assez payés, c'est vrai, mais on s'est attelés à améliorer les choses et le C est passé en six ans de 17,50euros à 22euros, plus les forfaits annuels de 40euros pour les patients en ALD», souligne le président du SML.
La FMF ne souhaite pas «envenimer le débat». «Des actes ont été augmentés, d'autres ont été baissés. On enlève aux uns pour donner aux autres et, au final l'assurance-maladie s'y retrouve bien. Je ne crois pas que ce soit une victoire pour qui que ce soit», souligne son président, le Dr Jean-Claude Régi.
(1) La revalorisation du C à 23 euros est programmée au 1er juin 2008 dans l'avenant 23 « en fonction des marges de manoeuvre prévues par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 et compte tenu de l'engagement des médecins dans la maîtrise médicalisée et dans la prévention en 2007 et 2008 ».
Les gastro-entérologues contre MG-France
Le climat se tend ces dernières semaines entre les syndicats défenseurs de la convention et ses opposants. Le Syndicat national des médecins spécialistes des maladies de l'appareil digestif (SYNMAD) a décidé de porter plainte contre MG-France Franche-Comté pour non-confraternité auprès des conseils départementaux de l'Ordre du Jura, du Doubs, de Haute-Saône et du Territoire de Belfort. Le syndicat s'élève contre les propos tenus par MG-France dans son bulletin de liaison régional. Le bulletin dénonçait la mise en place du dépistage du cancer colo-rectal. «Les généralistes serviront de rabatteurs sans rémunération décente et avec toute la responsabilité des faux positifs, des faux négatifs, des coloscopies en dépassement tarifaire et des coloscopies qui se passent mal.» Pour le Dr Jean-François Rey, «remettre en cause la politique nationale et internationale de santé publique est grave pour les patients; c'est aller vers des pertes de chances». Le président du SYNMAD rappelle que 60 % des gastro-entérologues sont en secteur I. Pour l'auteur du bulletin régional incriminé, le Dr Martial Olivier-Koehret, «les médecins généralistes qui acceptent de participer au programme de dépistage ne sont pas rémunérés à leur juste valeur». Pour le président de MG-France, la campagne nationale de dépistage n'est pas irréprochable. «Il n'y a pas de compte rendu standardisé des coloscopies et les recommandations qui peuvent survenir ne sont pas stabilisées. Rien ne dit, par exemple, quel doit être le délai avant une nouvelle coloscopie.»
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