De notre correspondant
La cataracte est une affection oculaire aboutissant à l'opacité du cristallin ou à celle de sa capsule. Pour la petite histoire, cataracte vient du mot grec katarraktes qui signifie chute d'eau, car on croyait que la cataracte était due à la chute d'une humeur sur les yeux. La cataracte peut être congénitale, traumatique ou spontanée.
La cataracte congénitale est l'une des causes les plus fréquentes de cécité curable en Europe et aux Etats-Unis, avec une fréquence de 1 à 6 cas pour 10 000 naissances. On estime qu'environ un tiers des cas a une cause génétique. Malgré la fréquence élevée des cataractes héréditaires de l'enfant, les progrès pour comprendre les gènes impliqués dans la cataracte ont été relativement lents.
Une équipe de chercheurs chinois et canadiens, dirigée par le Dr Xiangyin Kong de l'Académie chinoise de science à Shanghai, a maintenant mis en évidence un nouveau gène coupable, le gène HSF4.
Les chercheurs ont tout d'abord étudié une large famille chinoise affectée d'une cataracte infantile, de type lamellaire, transmise de façon autosomique dominante. L'étude de liaison génétique couvrant tout le génome a permis de découvrir que le trouble est associé à un locus sur le chromosome 16.
Or ce locus coïncide avec un locus précédemment décrit dans une famille danoise affectée de cataracte infantile, celle-ci de type Marner.
Sur le chromosome 16
Dans cette région du chromosome 16, le gène HSF4 (Heat-Shock Transcription Factor 4) figure parmi les bons candidats pour être le gène lié à la maladie. En effet, il est exprimé dans l'oeil. De plus, il code pour un facteur de transcription heat-shock qui régule l'expression de plusieurs protéines heat-shock servant de « chaperons » dans le cristallin, lesquelles pourraient être importantes durant le développement du cristallin.
Les chercheurs ont donc analysé le gène HSF4 dans les deux familles, à la recherche de mutations. Dans chacune des familles, une mutation faux-sens du gène HSF4, supposée affecter le domaine de fixation d'ADN de la protéine, a été liée à la survenue de cataracte. L'équipe a alors recherché des mutations du gène HSF4 chez 69 individus présentant une forme sporadique de cataracte. Ils ont trouvé deux mutations faux-sens, affectant le domaine de fixation d'ADN de la protéine, chez deux individus ayant une cataracte infantile. Chez l'un des individus affectés d'une cataracte unilatérale, la mutation était également présente chez le père qui avait, lui aussi, une légère cataracte similaire aux cataractes séniles.
Les protéines heat-shock
La protéine HFS4 régule l'expression de plusieurs protéines heat-shock (dont HSP70, HSP90a, HSP27), expliquent les chercheurs. « Ces protéines heat-shock peuvent être distribuées partout dans le cristallin, ou dans des régions spécifiques, aussi bien chez l'embryon que chez l'adulte, ce qui suggère qu'elles sont requises pour le développement du cristallin. »
Ces protéines heat-shock font office de chaperons moléculaires pour la synthèse, l'assemblage, la translocation, le pliage, la réparation et la dégénérescence des protéines.
Protéine cristalline-alpha bêta
« Des anomalies de structure ou d'expression de ces protéines peuvent aboutir à la cataracte, comme cela a été montré avec la petite protéine heat-shock appelée cristalline-alpha bêta. »
« Divers stress peuvent altérer des protéines dans le cristallin et favoriser au bout du compte le développement de la cataracte liée à l'âge », notent les chercheurs. « Avec l'âge, l'activité chaperon des protéines heat-shock diminue », ajoutent-ils. « L'altération fonctionnelle d'HSF4 pourrait donc être associée à une susceptibilité pour la formation de cataracte liée à l'âge », concluent-ils.
« Nature Genetics », 24 juin 2002, doi : 10.1038/
Estrogènes : un effet préventif contre la cataracte ?
Une étude américaine publiée dans les « Proceedings » de l'Académie des sciences américaine suggère que les estrogènes pourraient retarder ou empêcher la survenue d'une cataracte. La cataracte, on le sait, est plus fréquente chez les femmes ; ce qui est peut-être dû à une baisse des estrogènes après la ménopause.
Vicki Davies et coll. ont créé des souris porteuses d'un récepteur aux estrogènes non fonctionnel. Résultat : une cataracte est apparue chez 100 % des souris femelles transgéniques et a progressé avec l'âge. En revanche, aucune des souris contrôles n'a développé de cataracte.
« Proc Natl Acad Sci USA » 24-28 juin 2002 (publication online avancée).
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