C'EST UN ÉLÉMENT de preuve attendu sur la prescription de caféine en néonatalogie qu'apporte une étude internationale. Des craintes existaient sur le devenir des enfants traités par cette méthylxanthine, prescrite en prévention des apnées du prématuré. L'étude parue dans le « New England Journal of Medicine » se montre très rassurante.
Voici quelque trente ans que les prématurés reçoivent des méthylxanthines (aminophylline, théophylline ou caféine) dans cette indication. La caféine est même l'un des dix traitements les plus prescrits en néonatalogie. Et pourtant, des craintes existaient sur les conséquences de cette prescription, au niveau du développement cérébral notamment.
C'est pourquoi, Barbara Schmidt (Hamilton, Canada) et coll. ont mis en place une vaste étude internationale, randomisée contrôlée contre placebo, opposant la caféine à un placebo. Son objectif principal était d'évaluer, à l'âge de 18 à 21 mois, un critère composite fondé sur la mortalité, la comitialité, la cognition, la surdité et la cécité.
Moins que dans le groupe placebo.
Pour y parvenir, l'équipe a enrôlé 2 006 prématurés pesant de 500 à 1 250 g. Parmi eux, 937 ont bénéficié d'un traitement par caféine et 932 ont reçu le placebo. Parmi ceux sous caféine, 377 (40,2 %) sont décédés ou ont eu un trouble du développement neurologique, moins que dans le groupe placebo, où ils étaient 431 (46,2 %). L'odds ratio a été évalué à 0,77 (p = 0,008). La caféine a également permis de réduire les taux de comitialité (4,4 % contre 7,3 %, p = 0,009) et de retard du développement cognitif (33,8 % contre 38,3 %, p = 0,04). En revanche, aucune différence significative n'a été enregistrée en ce qui concerne les décès, la surdité et la cécité. Il en allait de même pour les critères de développement physique : taille, poids et périmètre crânien.
Les auteurs en concluent, à juste titre, que la caféine administrée chez ces prématurés améliore le taux de survie sans trouble du développement neurologique. «Nos données montrent qu'il faut traiter 16enfants par caféine pour éviter une conséquence néfaste à 18mois», constatent-ils.
Arrêt plus précoce de la pression positive.
Se pose alors une question : quels sont les mécanismes possibles de cet effet neuroprotecteur ? Selon l'équipe, la raison principale en revient à l'arrêt plus précoce du traitement par ventilation en pression positive. Les nourrissons sous placebo en ont bénéficié pendant une semaine de plus, en moyenne. Il est connu que cette ventilation occasionne chez les prématurés l'apparition d'une dysplasie bronchopulmonaire, elle-même facteur de risque d'un trouble du développement neurologique. D'ailleurs, dans un travail antérieur, la même équipe avait montré un moindre taux de cette pathologie pulmonaire sous caféine. Toutefois, cette explication ne semble justifier que 45 % de l'action positive de la caféine à 18 mois. D'autres mécanismes possibles sont donc à envisager et à découvrir par d'autres études.
Conséquence annexe, mais bien réelle, l'étude montre une moindre incidence des rétinopathies sévères dans le groupe traité. Ici encore, le sevrage précoce en oxygène et ventilation en pression positive a une probable part de responsabilité. Sur la totalité de la cohorte, 14 nouveau-nés sont devenus aveugles, dont 8 dans le groupe placebo.
Reste que le devenir à 18-21 mois ne peut prédire de façon précise l'avenir de ces enfants. D'ailleurs, le suivi jusqu'à l'âge de 5 ans est déjà mis en place. Il porte sur la cognition, les fonctions motrices globales et fines, la vision, l'audition, le comportement et l'état de santé.
« New England Journal of Medicine » », 357 ; 19, pp. 1893-1902.
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