Les Américains élisent ou réélisent aujourd'hui la totalité des représentants, un tiers de leurs sénateurs et 36 gouverneurs.
Ces élections générales, appelées mid-term elections parce qu'elles ont lieu au milieu du mandat présidentiel, ne devraient pas modifier sensiblement la carte électorale des Etats-Unis. Actuellement, le parti républicain est minoritaire d'une voix au Sénat, dispose d'une faible majorité à la Chambre des représentants et, bien sûr, occupe le pouvoir exécutif, en la personne de George W. Bush.
Le président a conservé une très forte popularité d'environ 60 % dans les sondages, même si elle a baissé par rapport au lendemain des terribles attentats de New York et de Washington. Il n'en demeure pas moins que la lutte contre le terrorisme représente une priorité pour tous les Américains. M. Bush, qui a fait campagne pour le compte de son parti, a réussi à rassembler non seulement ses propres forces autour du thème du patriotisme, mais un fort contingent d'élus et d'électeurs démocrates. De sorte que la crise économique, pourtant lancinante, est passée au second plan.
Le projet d'invasion de l'Irak offrait aux démocrates l'occasion de se distinguer du courant majoritaire actuel. Seul Al Gore, candidat battu à l'élection présidentielle de 2000, s'est déclaré hostile à une nouvelle guerre du Golfe. Il l'a fait dans la perspective d'une candidature en 2004. Mais il est seul, car le chef de la minorité démocrate à la Chambre, Dick Gephardt, a rassemblé son camp autour du soutien à la politique irakienne de M. Bush.
Personne ne peut dire lequel des chefs de file du parti démocrate a choisi la meilleure stratégie électorale. Ce qui est sûr, c'est que l'enjeu principal de la consultation n'est ni le terrorisme ni l'Irak : M. Bush n'est critiqué sur ces deux chapitres que par les gauchistes dont le poids électoral est faible ou nul. Les Américains se retrouvent donc dans une configuration classique où les préoccupations locales ont infiniment plus d'importance que les affaires extérieures ou la sécurité nationale. Les républicains espèrent renforcer leur majorité à la Chambre et la reconquérir au Sénat, mais comme la popularité personnelle de M. Bush ne joue pas vraiment dans la consultation, ils ne sont nullement certains du résultat. Les cas sont nombreux où ils sont en mesure de gagner des sièges, mais aussi d'en perdre.
Quant aux démocrates, ils semblent paralysés : de fortes rivalités les divisent, les candidats éventuels à la présidence étant pléthoriques ; Al Gore ne veut pas disparaître de la scène politique, les vétérans comme Dick Gephardt ou Tom Daschle (chef de la majorité au Sénat) méritent d'être intronisés par leur parti et quelques jeunes loups (ou encore une louve moins jeune, Hillary Clinton, sénateur de New York) portant beau ont également leurs chances.
Une cause sacrée
Aucun de ces candidats potentiels à la présidence ne veut gâcher ses chances dans les mid-term. Ce manque de combativité, cette prudence exagérée, alors que beaucoup de choix socio-économiques de M. Bush ont gommé l'action de son prédécesseur, Bill Clinton, s'expliquent par le rassemblement du peuple américain autour de la cause sacrée de la lutte contre le terrorisme et de la guerre contre les ennemis déclarés de l'Amérique.
Certes, les démocrates auraient pu s'opposer au budget de George W. Bush. Le président a consumé littéralement, en deux ans de mandat, les excédents faramineux dégagés par la croissance. Mais sur ce point non plus, on ne discerne de conflit idéologique entre démocrates et républicains : tout le monde est d'accord aux Etats-Unis sur l'impératif de la croissance, qui nécessite actuellement une augmentation des dépenses du gouvernement fédéral (un énorme budget militaire vient d'être voté sans que les démocrates aient froncé le sourcil), quitte à creuser le déficit public.
Les élections législatives et la présidentielle de 2000 (que M. Gore a virtuellement gagnée selon le décompte des voix populaires) ont montré une Amérique coupée en deux, complètement bipolarisée, avec les démocrates majoritaires dans les grandes villes et les centres industriels et les républicains majoritaires à la campagne, dans le Middle West et dans le Sud. Cette configuration ne sera pas altérée par le scrutin d'aujourd'hui. Certains observateurs pensent que le temps joue en faveur des démocrates, par le phénomène de la désertification des campagnes et de la concentration urbaine. C'est bien vu, mais cela ne remplace pas un programme qui serait le bienvenu quand on sait que le conservatisme de M. Bush, son unilatéralisme, ses liens avec la droite chrétienne donnent à sa politique étrangère une impulsion bien plus droitière que celle de Ronald Reagan. Le libéralisme social des démocrates est en perte de vitesse, sans doute parce que, s'il a su accompagner la croissance, il ne sait pas la relancer, maintenant qu'elle fait défaut.
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