La ménopause chirurgicale en chiffres.
En France, la ménopause chirurgicale concerne près de 35 000 nouvelles femmes par an. En effet, sur les 70 000 hystérectomies annuelles pratiquées, la moitié sont associées à une ovariectomie. Certes, les chirurgiens et les gynécologues français, conscients de la gravité d'une telle intervention sur la vie sexuelle, la réservent aux cas où elle est obligatoire, surtout chez la femme jeune, mais il ne leur est pas toujours possible de conserver les ovaires. Au total, il y a environ un million de femmes, de 20 à 74 ans, chirurgicalement ménopausées (France), et 46 % d'entre elles font état d'une baisse de désir sexuel.
Des conséquences sur la sexualité sous-estimées
Le sujet reste néanmoins tabou, même à une époque où le discours sur la sexualité semble envahir journaux, radios, télévisions… Cela provient à la fois du corps médical, qui hésite à poser des questions sur un sujet « à risque » (faisant aborder une intimité à laquelle il n'est pas entraîné), et des patientes qui n'osent pas en parler avec un médecin. Toujours est-il que l'aspect libido est encore trop souvent laissé dans l'ombre, et que les conséquences sexuelles de l'intervention sont sans doute sous-estimées. Tout acte chirurgical gynécologique, de façon plus ou moins marquée, a des répercussions sur le vécu physique et psychique de la patiente. L'hystérectomie simple (sans ovariectomie) provoque un sentiment de perte de féminité et d'atteinte de l'image de soi, pouvant facilement évoluer vers un manque de confiance et une sorte de résignation à n'être plus tout à fait femme, y compris chez des patientes qui ne sont plus en âge de procréer. En cas d'ovariectomie associée, la survenue brutale, au décours immédiat de l'intervention, d'une ménopause non physiologique rend la situation encore plus critique.
Information et dialogue sont nécessaires
Il s'agit en effet d'une ménopause brutale, avec son cortège de troubles trophiques, hormonaux et généraux. Confrontées à l'apparition de signes physiques (bouffées de chaleur, manque de sommeil, sécheresse vaginale, sécheresse de la peau, etc.) et émotionnels (irritabilité, baisse d'énergie, atteinte narcissique, etc.), la plupart des patientes présentent des perturbations de l'humeur susceptibles d'entraîner des difficultés relationnelles avec leur conjoint et leur entourage. Dans ce contexte difficile, la diminution de désir sexuel est souvent mise sur le compte d'un malaise psychologique, et la composante hormonale, laissée de côté. Pourtant, les taux de testostérone chutent environ de moitié après une ménopause chirurgicale et le pourcentage de femmes faisant état d'un manque de libido, malgré une estrogénothérapie adéquate, est de 50 %. Certaines (une sur trois) en souffrent profondément, et un meilleur dialogue avec les professionnels de santé leur permettrait d'obtenir de plus amples informations sur les causes de leur baisse de désir et sur les moyens d'y remédier.
Le désir sexuel est influencé par les androgènes
Définie comme étant une diminution ou une absence, permanente ou récurrente, des pensées sexuelles, des fantasmes et de la réceptivité aux rapports sexuels, entraînant souffrance psychologique et difficultés relationnelles, la baisse de désir sexuel peut affecter le bien-être, et faire éprouver un sentiment d'échec personnel et de la culpabilité vis-à-vis du conjoint. On a longtemps pensé, faute de recherches spécifiques, que l'estrogénothérapie suffisait à corriger, en plus des aspects trophiques et hormonaux, les troubles sexuels de la ménopause. En réalité, si les estrogènes ont une action sur la congestion vulvaire et vaginale, en favorisant la lubrification et l'excitation, les androgènes, bien qu'ils soient présents en faible quantité chez la femme, jouent un rôle fondamental dans la libido. Il est maintenant possible de les prescrire, en association avec l'estrogénothérapie, chez les patientes chirurgicalement ménopausées qui souffrent de leur baisse de désir sexuel. Disponible depuis peu sur le marché français, le patch transdermique à la testostérone (Intrinsa) s'est révélé efficace sur les troubles sexuels féminins liés à l'intervention, le bien-être général et la souffrance associée au faible désir sexuel. L'amélioration a été évaluée par le biais d'outils validés : carnet de recueil de l'activité sexuelle, profil de la fonction sexuelle féminine (mesurant désir, plaisir, excitation, réponse, image de soi, orgasme et inquiétude d'ordre sexuel) et échelle de souffrance). Les résultats ont montré l'intérêt de l'androgénothérapie à la fois sur le désir sexuel et sur la souffrance personnelle, avec rétablissement d'une activité sexuelle satisfaisante chez 75 % des patientes qui ont participé aux études cliniques.
Certes, la prise en charge de la ménopause chirurgicale doit être envisagée de façon globale, et il faut parfois proposer une prise en charge psychothérapeutique en complément du traitement hormonal, l'intervention pouvant jouer le rôle de révélateur de problèmes personnels ou conjugaux préexistants que la chimie ne suffit pas à régler.
Il n'en reste pas moins qu'il est maintenant possible d'apporter une réponse thérapeutique adaptée aux troubles sexuels liés à une intervention lourde sur le plan physique et moral, et pour lesquels, il y a quelques années encore, on était bien démuni.
Un site Internet
P&G Pharmaceuticals a mis en place un site Internet pour les professionnels qui offre de nombreuses informations sur les troubles de la fonction sexuelle féminine chez les femmes en ménopause chirurgicale (accès à des ressources comme les études, les résumés de congrès...) et la possibilité pour les médecins d'interagir avec des experts de la problématique (Drs David Elia, Michèle Lachowsky et Sylvain Mimoun). Une partie de ce site sera également accessible aux patientes, leur permettant de mieux comprendre cette pathologie, de poser leurs questions aux experts et d'obtenir des conseils pratiques pour engager la discussion avec leur médecin.
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