La Commission mixte paritaire (CMP), composée de 14 membres, est parvenue à un accord, le 7 février, sur la mise en place d'un dispositif anti-Perruche, examiné dans la cadre du projet de loi sur les droits des malades. Par 8 voix contre 6, un parlementaire de gauche ayant joint son vote à ceux de la droite, elle a écarté toute dérive relative à l'eugénisme et à la responsabilité médicale, qui serait liée à la naissance d'un handicapé.
L'arrêt Perruche du 17 novembre 2000, établissait un rapport de causalité entre l'intervention médicale (non dépistage de la rubéole de la mère pendant sa grossesse) et l'existence d'une malformation foetale, en introduisant la notion d'une indemnisation du handicap. Il « fait peser de lourdes menaces, pouvant conduire à une disparition des échographies morphologiques systématiques », écrivait l'Ordre national le 14 janvier.
En premier lieu, le texte adopté pose pour principe législatif que « nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance ». Il stipule que « la personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l'acte fautif a provoqué directement le handicap ou l'a aggravé, ou n'a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l'atténuer ».
Pour le Dr Philippe Kolf, président du Syndicat national de l'Union des échographistes, ce qui a de l'importance n'est pas écrit, mais suggéré, à savoir qu' « un enfant, né avec un handicap qui n'est pas dû à une faute médicale, ne peut se prévaloir d'un préjudice ». Un dernier alinéa met l'accent sur la responsabilité des professionnels ou des établissements de santé. Lorsque celle-ci « est engagée vis-à-vis des parents d'un enfant né avec un handicap non décelé pendant la grossesse à la suite d'une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice (moral, NDLR) ne saurait inclure les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l'enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale ». Seuls, Nicolas (Perruche) et Lionel (arrêt de la cour de cassation du 28 novembre 2001), dont la trisomie aurait pu être détectée, ne sont pas concernés par ces dispositions.
« Ainsi, députés et sénateurs ont sauvé le diagnostic prénatal », dit au « Quotidien » le Dr Philippe Kolf, qui appelle à la reprise du travail « normal » ses confrères échographistes, radiologues, gynécologues et obstétriciens, qui avaient mis en veilleuse leur activité depuis le 1er janvier afin de faire pression sur le Parlement. Rien, effectivement, ne devrait changer, en théorie, d'ici au vote définitif du texte le 21 février.
Bien sûr, le gouvernement, et lui seul, a les moyens de l'amender, le 12 à l'Assemblée ou le 19 au Sénat. Mais ce n'est pas à l'ordre du jour. Reste un éventuel recours, avant promulgation, devant le Conseil constitutionnel.
Claude Evin pourrait se laisser tenter. L'ancien ministre des Affaires sociales de Rocard (mai 1988-mai 1991) invoquerait, alors, la limitation du droit de porter plainte. De son point de vue, quand la responsabilité médicale est en cause, le préjudice parental ne saurait être réduit au préjudice moral. Puisqu'il y a « acte fautif », le médecin devrait payer en partie ce qui revient à la solidarité nationale. L'arrêt Carrez, rendu par le Conseil d'Etat le 14 février 1997, va dans ce sens. Il a accordé des dommages-intérêts aux parents sous la forme d' « une indemnité en capital, représentant le versement (par le CHU de Nice) d'une rente mensuelle de 5 000 F pendant toute la vie de l'enfant ».
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