A peine réélu pour un nouveau mandat de cinq ans, le conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) s'est remis au travail et a annoncé son intention de relancer les discussions conventionnelles avec les professionnels de santé en attendant les éventuelles réformes à venir.
Son premier geste a été d'annoncer, contre l'avis même de son directeur, Gilles Johanet, le retour à la valeur antérieure de la lettre clé des masseurs-kinésithérapeutes et des orthoptistes qui avaient subi une baisse au mois de juillet 2000 dans le cadre du dispositif de régulation des dépenses d'assurance-maladie mis en place par Martine Aubry (« le Quotidien » du 25 octobre). « Il s'agit d'un acte équitable à l'égard des masseurs-kinésithérapeutes qui se sont par ailleurs engagés dans une réforme de leur nomenclature mais également d'un geste politique d'ouverture à l'égard des professionnels de santé », explique le président (CFDT) de la CNAM, Jean-Marie Spaeth.
Car il n'entend pas rester inactif, même si la période qui s'ouvre s'annonce forcément « transitoire » dans la mesure où le conseil d'administration est actuellement privé de deux composantes importantes, le Medef et la CGPME. Il marque donc sa volonté de peser sur les débats préélectoraux concernant l'avenir de l'assurance-maladie. « La question est : est-ce que l'on reste dans un système reposant sur un financement socialisé et une gestion paritaire où est-ce que l'on étatiste le système ? La question est légitime, il existe en Europe d'autres modèles que le nôtre mais on ne peut accepter que les évolutions se fassent comme aujourd'hui de manière insidieuse. La période électorale doit être propice à ce genre de débat », estime le président de la CNAM. Evidemment partisan de la première solution - la gestion paritaire -, Jean-Marie Spaeth souhaite avant tout que l'on crée les conditions d'un retour du patronat dans les caisses en redéfinissant le rôle de chacun à travers une délégation de gestion claire de l'Etat à l'assurance-maladie.
Un Etat stratège
Dans cette perspective, l'amendement du gouvernement sur les relations conventionnelles avec les professions de santé déposé dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (voir ci-dessus), constitue, selon lui, une avancée. « Je ne crois pas que le débat sera totalement tranché avant les élections, mais cela permettra au moins de le poser clairement », estime Jean-Marie Spaeth.
Le président de la CNAM se dit favorable à un « Etat stratège » qui fixe les priorités sanitaires et budgétaires sur quatre ou cinq ans et définit les règles d'exercice et les tarifs de base des professionnels de santé. Ensuite, les partenaires sociaux disposeraient d'une autonomie pour faire respecter ces objectifs par la négociation avec les professionnels.
A une convention socle définie par l'Etat s'ajouteraient donc des contrats collectifs librement négociés entre les syndicats professionnels et les caisses, comprenant des engagements réciproques en termes de qualité de soins et de maîtrise des dépenses, accompagnés d'incitations financières forfaitaires pour les praticiens.
Mais chaque médecin serait libre d'y adhérer ou non. S'il le fait, il échapperait au système de régulation collective. Dans le cas contraire, il pourrait tout de même exercer sur la base des règles d'exercice et des tarifs minimaux. « Il s'agirait de contrats et non de conventions car le contrat ne nécessite pas d'agrément du gouvernement. C'est un peu comme pour les salariés la différence entre le droit du travail et ensuite les accords de branche », explique Jean-Marie Spaeth pour qui seule cette nouvelle architecture peut créer les conditions d'une nouvelle démocratie sanitaire.
Le président de la CNAM souhaite donc commencer à travailler dans ce sens dans le cadre conventionnel actuel et discuter avec les syndicats des évolutions à venir.
« Il faut trouver le bon équilibre entre exercice libéral et financement socialisé. C'est ce qu'on souhaite faire », affirme Jean-Marie Spaeth, qui regrette que certains syndicats, comme la CSMF, continuent d'entretenir, selon lui, la fiction d'un médecin exerçant dans un cadre totalement libéral : « S'ils continuent ils vont conduire les médecins dans le mur. Car, si on ne parvient pas à trouver ensemble cet équilibre, ce qui les attend, c'est une étatisation ou une privatisation du système ».
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