LE QUOTIDIEN
Quel regard portez-vous sur la politique de santé actuelle ?
JEAN-MARIE LE PEN
Ce qui est certain, c'est que nous n'avons cessé d'évoluer vers une conception de plus en plus socialiste du système de santé et vers la réduction progressive des libertés médicales, sous le prétexte du coût de plus en plus important des dépenses. Si le gouvernement peut se targuer d'une amélioration de l'équilibre des comptes, sauf peut-être pour l'assurance-maladie, c'est pour une raison qui ne dépend pas de lui, qui est la croissance, mais c'est surtout parce que nous avons tapé dans la poche du contribuable en instituant la CSG et la CRDS, un système contestable.
Est-ce que le système de gestion des caisses maladie, théoriquement fondé sur la paritarisme, a, selon vous, un avenir ?
C'est un système qui permet un dialogue, mais on pourrait aussi imaginer que de grandes organisations d'usagers y aient accès, car la qualification des syndicats manque souvent de base démocratique. Aujourd'hui, nous avons des organismes décors (les conseils d'administration des caisses, NDLR), l'Etat exerçant un rôle de plus en plus bureaucratique et tyrannique. En revanche, l'Etat a son mot à dire dans la prévention qui est spécifiquement politique, qu'il s'agisse de la lutte contre le tabac, la drogue, l'alcoolisme, ou de la pratique du sport et même de l'urbanisme.
Pour une augmentation des honoraires
Que pensez-vous de la proposition du Medef qui prône un système de concurrence encadrée entre plusieurs opérateurs de soins, publics ou privés, dont les assurances commerciales, et dans lequel l'Etat fixerait un cahier des charges ?
Je suis en faveur des systèmes qui comportent le plus de liberté possible. Chaque fois que l'on peut, sans mettre en cause la finalité de l'institution, y introduire la concurrence, on doit le faire. Mais il me semble qu'un des éléments responsables du déséquilibre de nos systèmes sociaux, c'est l'immigration, c'est-à-dire la possibilité pour les étrangers d'entrer comme ils veulent, quand ils veulent, et de bénéficier en entrant de tous les avantages sociaux, quelquefois même d'avantages supérieurs à ceux des Français. Les prestations doivent revenir vers ceux qui les payent, c'est-à-dire d'abord les Français. Comme pour les caisses de retraite, il doit y avoir une caisse d'assurance-maladie pour les Français, une autre pour les étrangers.
Vous dites être favorable au maximum de liberté. Cela signifie-t-il que l'Etat ne doit fixer aucune contrainte aux caisses d'assurance-maladie ?
Non, c'est le rôle de l'Etat justement que cet encadrement et cette responsabilité de la politique nationale de santé. Je pense par ailleurs qu'il faut maintenir une caisse d'assurance-maladie publique, afin d'instaurer une concurrence avec le secteur privé.
Soutenez-vous la demande de revalorisation des généralistes libéraux ?
Oui, parce que cela permettra de garder une médecine de qualité et sa responsabilité au praticien. Cela dit, c'est la conception de l'ensemble du système qui est en cause. Il faudrait agir sur les grandes causes, à la fois les pathologies et le déséquilibre financier du système de santé.
Jugement par les pairs
Comment envisagez-vous la maîtrise des dépenses d'assurance-maladie ? Etes-vous pour des sanctions à l'encontre des médecins ?
Si vous n'établissez aucune discrimination, les dépenses de santé iront forcément en augmentant. Certains médecins qui ne sont pas sûrs de leur diagnostic ont d'ailleurs tendance à prescrire toute la gamme des examens, alors que c'est inutile. Il faut un contrôle pour éviter ce genre de dérapage extrêmement coûteux. Concernant les sanctions, c'est à la profession elle-même de dégager le consensus nécessaire, qui ne peut se faire que par le dialogue. Il pourrait y avoir un jugement par les pairs plutôt que par l'administration.
L'hôpital est en crise, avec une pénurie en personnel soignant et, dans certaines spécialités médicales, des services d'urgences saturés.
Il faut trouver les effectifs qui manquent dans la masse des jeunes Français sans emploi. C'est une question de rémunération (...). Le développement de l'hospitalisation à domicile devrait permettre également de faire des économies non négligeables.
Concernant les urgences, je crois que l'une des solutions est de redonner de l'importance au généraliste, afin d'éviter que le patient se précipite à l'hôpital. Cela éviterait d'ailleurs les consultations inutiles chez le spécialiste. Le généraliste est le plus à même d'être le pivot du système médical. Peut-être conviendrait-il de le considérer comme un spécialiste, c'est-à-dire de le rémunérer pour une fonction qui est presque plus difficile et plus responsable que celle du spécialiste.
Le programme santé du Front national
Voici les principales propositions du Front national en matière de santé :
- Abrogation des ordonnances Juppé.
- Séparation définitive entre la branche maladie-accidents du travail et les branches chômage et vieillesse.
- Fusion du régime général et des autres régimes ou caisses particulières.
- Création d'une caisse d'assurance-maladie spécifique pour les étrangers.
- Libre choix par le patient de l'organisme d'assurance-maladie pour les risques les moins graves.
- Suppression de la nomenclature des actes médicaux au profit d'une facturation tenant compte du temps passé et de la compétence du praticien.
- Diversification du financement de l'assurance-maladie.
- Refus de toute notion de rationnement de l'offre de soins.
- Suppression du numerus clausus dans les études médicales.
- Application du principe de la « préférence nationale » de la formation initiale des médecins jusqu'au recrutement hospitalier.
- Développement de la médecine de ville.
- Développement de l'hospitalisation à domicile.
- Suppression de la carte sanitaire.
- Limitation du rôle des agences régionales de l'hospitalisation au contrôle technique.
- Rétablissement du contrôle sanitaire aux frontières.
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