LES DISCOURS officiels étaient doublement inauguratifs. Près de trois cents personnes se sont retrouvées au début de l'été dans le joli parc de l'hôpital de pédiatrie et de rééducation (HPR) de Bullion, au coeur de la haute vallée de Chevreuse, pour célébrer deux beaux projets mis au service des enfants hospitalisés. D'abord, l'installation du Cyberespace qui est proposé par l'association Docteur Souris au sein du pavillon Camille-Guérin. Et, à cette occasion, on levait aussi le voile sur une création réalisée par une dizaine d'enfants et adolescents de Bullion, sous la direction d'une artiste engagée par Art dans la cité. Deux initiatives soutenues par le Laboratoire GlaxoSmithKline.
Une oeuvre qui protège (dr)Sécurité assurée.
L'association Docteur Souris existe depuis cinq ans, elle est déjà implantée dans trois établissements parisiens (Trousseau, Necker et Debré), ainsi qu'à Nice et à Toulouse. À Rabat aussi, la capitale du Maroc, où «le système a été arabisé par les élèves d'une école d'ingénieurs», explique son président et créateur, Roger Abehassera. L'idée est d'apporter les nouvelles technologies numériques au lit des jeunes patients hospitalisés et de leur permettre, en garantissant les meilleures mesures de sécurité, de communiquer avec leurs proches, de se distraire et même de poursuivre leur scolarité. Depuis 2005, GSK a fait don à Docteur Souris de plus de 1 600 ordinateurs. À Bullion, une vingtaine d'ordinateurs portables, dotés d'un progiciel, ont été fournis aux enfants (âgés de 11 à 17 ans) du pavillon Guérin.
«Elles sont mutualisées, précise M. Abehassera. Les portables sont tous reconditionnés par un atelier des Restos du coeur. On définit un profil pour chaque enfant, qui apparaît alors dans un annuaire. Ce qui nous permet, à plusieurs niveaux de sécurité, de contrôler la liste des contacts. Quand ils “chatent” d'une chambre à une autre, ça ressemble à MSN, mais ça n'est pas MSN.» Un filtrage qui évite qu'ils «n'aillent eux-mêmes sur des sites chercher des informations sur leur maladie, calculer leur espérance de vie…» ou que, par exemple, un enfant enfermé dans une chambre bulle, s'il est pris de pensées morbides, ne les transmette à ses petits copains de l'hôpital. «Si le message écrit fait apparaître “Je veux mourir”, nous l'interceptons et nous nous occupons de cet enfant, en préservant les autres.» Valérie et Cynthia, qui comptent parmi les premiers bénéficiaires, étaient en pleine création ce jour-là, sous le regard de Dominique, infirmier et référent, d'un journal virtuel qui rapportait les témoignages des enfants ayant participé le week-end précédent à une sortie en mer. L'accès à Internet offre à ces enfants la possibilité de communiquer, par chat, vidéo ou mail, et de participer à des loisirs numériques. Un partenariat avec l'Éducation nationale ouvre même la voie à des soutiens scolaires.
Intérieur extérieur.
De son côté, l'association Art dans la cité cherche depuis 1999 à introduire les arts visuels contemporains à l'hôpital. Elle fait intervenir des artistes plasticiens pour créer une oeuvre originale destinée à un lieu spécifique de l'établissement (accueil, salle d'attente, services, etc.). Pour Bullion, elle a fait appel à Alice Baillaud, une artiste paysagiste qui a travaillé avec une dizaine d'adolescents en surcharge pondérale. «Je suis partie de l'idée du secret, explique l'artiste, car on m'avait expliqué que le poids était pour ces enfants une certaine façon d'en cacher un. Alors j'ai demandé à chacun d'entre eux d'écrire son secret sur un petit papier, puis de mettre ce petit papier dans une petite boîte.»
Les jeunes artistes ont imaginé et créé une installation faite de bouts de bois recueillis dans le parc, de feuilles, de mousse. Prise en photo dans tous les sens au gré de ses déplacements dans le parc (les photos ont été exposées), mise en scène dans la forêt, sur la pelouse, au milieu des jacinthes, «l'installation prenait une signification différente». «C'est une porte des secrets que l'on peut ouvrir ou fermer. Elle s'ouvre à la fois sur l'extérieur et sur leur intérieur. Nous avons cherché l'endroit où elle révélerait le mieux nos secrets.» C'est finalement dans le parc, juste avant un petit pont, qu'elle a élu domicile.
Il aura fallu une sacrée confiance en l'autre, pour que ces adolescents en souffrance osent livrer au regard des convives leur secret, ainsi à portée de main, même enfoui en boule dans les tronçons de bois. «L'oeuvre, ça protège aussi», analyse doucement Alice Baillaud.
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