LA MALADIE de Crohn, quoique répandue, n'est pas toujours bien dépistée. Ses symptômes sont peu spécifiques (diarrhée, douleurs abdominales, voire maux d'estomac) et elle demeure encore taboue, car elle touche essentiellement des sujets jeunes (de 20 à 40 ans) qui n'osent pas en parler, notamment ceux atteints d'une forme sévère avec localisation anale. La campagne en cours, « La maladie de Crohn, c'est pas du cinéma », conduite sur Internet, a donc pour but d'aider les malades à prendre conscience de leur affection, de les aider à dédramatiser en les mettant en contact avec une information claire et en leur présentant des témoignages de personnes atteintes de la même pathologie.
Deux films vidéo visibles sur Dailymotion et YouTube ont été tournés, sur le ton de la légèreté et du décalage mais dans une optique de respect, à destination du public jeune. Ces films ont été relayés sur les blogs et ont permis à de jeunes malades de réaliser que la maladie de Crohn, si elle demeure pour l'heure incurable, permet à ceux qui en souffrent de poursuivre malgré tout une existence presque normale.
En moins de sept semaines, 45 800 personnes ont visité le site, soit plus de 6 500 visiteurs par semaine. Et 70 % des clics ont été réalisés exclusivement sur les rubriques d'information et seulement 21 % pour les contenus ludiques, films et jeux. Près de 20 % des visiteurs ont téléchargé « le manifeste des jeunes atteints de maladies inflammatoires de l'intestin ».
La réception des films a été très bonne, les commentaires pour la plupart étaient positifs et les équipes soignantes se félicitent d'avoir permis un meilleur accès à l'information et d'avoir favorisé, grâce au forum de discussion,@ les rencontres virtuelles entre les malades. M., 40 ans, témoigne : «Je suis allé sur le site vousnetespasseul.fr et j'ai adoré les films. Cela dédramatise bien des choses. Ces films m'ont fait rire. J'ai moi-même une maladie de Crohn depuis l'âge de 17ans. Cela n'a pas toujours été rose mais j'ai la “chance” d'avoir dominé la maladie depuis 15ans.»
La maladie porte le nom de son découvreur Burril Crohn, médecin au Mont Sinai Hospital de New York qui, en 1932, aidé par Gordon Oppenheimer et Leon Ginzburg, fut le premier à la définir, son atteinte touchant parfois tout le tube digestif de la bouche à l'anus avec des intervalles de muqueuses saines. On ignore encore les causes exactes, bien que le gène Nod2 (ou Card15) ait été récemment mis en évidence comme facteur de susceptibilité. L'hypothèse actuelle est en faveur d'un conflit immunologique dirigé contre des bactéries de la flore intestinale, avec lesquelles l'organisme vit normalement en harmonie.
Si les traitements n'offrent pas aujourd'hui une guérison complète, ils permettent une durée de vie sensiblement égale à celle de la population générale. Cependant, d'après le rapport « Regards MICI » publié par l'AFA, les malades se plaignent d'une diminution de leur qualité de vie psychique, physique et sociale, à tel point que certains d'entre eux en viennent à se déclarer travailleurs handicapés. L'extension et la gravité de cette maladie sont variables d'un patient à l'autre, pouvant évoluer vers des complications digestives comme la sténose intestinale, des fissures ou ulcérations, et extra-digestives comme la malnutrition, les carences vitaminées, des manifestations articulaires et cutanées.
Faciliter le dialogue.
L'association François Aupetit veut faire mieux connaître aux médecins généralistes cette infection souvent mal diagnostiquée, et qui n'est parfois reconnue qu'après un long cheminement diagnostique, qui ajoute encore à l'angoisse et à la souffrance des malades. Le message principal de l'association est de faire savoir aux malades qu'ils ne sont pas seuls, en mettant à leur disposition un site, à l'adresse vousnetespasseul.fr, afin de leur expliquer les principaux signes de leur affection et de faciliter un dialogue futur avec les médecins pour optimiser les traitements tant sur le plan diététique, médicamenteux que chirurgical.
La campagne de sensibilisation a donc pour but, via Internet, de créer des réseaux d'entraide communautaire entre malades et associations de soutien, et de garantir une information de qualité et contrôlée à laquelle tous peuvent avoir accès de manière complètement autonome.
Plus fréquente qu'on ne le croit, difficile à traiter, la maladie de Crohn ne doit pas être oubliée.
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