Chez les moins de cinq ans, en pays d’endémie

Intérêt du BCG contre les formes graves de tuberculose

Publié le 09/04/2006
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AU COURS des dernières décennies, la vaccination par le BCG a fait l’objet de controverses et le travail publié par le Dr Bernadette Bourdin Trunz, de l’OMS, devrait permettre un regain d’intérêt pour la prévention vaccinale de la tuberculose, en particulier dans les pays en développement. Selon les régions du monde et en fonction des différentes populations, le degré d’efficacité de la vaccination par le BCG a été considéré comme tout à fait inconstant : il va, en effet, de 0 à 80 %.

Les souches de bacilles ne sont pas toutes identiques.

Plusieurs explications à cette variabilité. D’une part, les souches de bacilles utilisées ne sont pas toutes identiques. D’autre part, certaines populations sont exposées de façon endémique à des mycobactéries qui pourraient induire une immunité croisée contre le bacille tuberculeux. Pourtant, deux métaanalyses publiées en 1993 et 1994, incluant des études prospectives, concluaient à une efficacité projective de 51 % contre l’ensemble des formes cliniques liées au bacille, et de 75 % contre les formes infantiles graves (méningite tuberculeuse et formes miliaires).

Dans les pays développés, 15 % des enfants qui contractent, avant l’âge de 5 ans, une forme neurologique de méningite vont décéder et la moitié des survivants va présenter des séquelles neurologiques plus ou moins lourdes. Lorsque les enfants n’ont pas accès à des soins de santé, le taux de létalité se situe aux alentours de 100 %, chiffre similaire à celui observé dans l’analyse de la littérature avant l’apparition des antibiotiques.

Pour préciser l’intérêt de la vaccination par le BGC contre les formes pédiatriques graves de la maladie, les Drs Bourdin Trunz et P. E. M. Fine ont estimé, grâce à un logiciel de calcul, le nombre des cas de méningite et de miliaire tuberculeuses évités par la vaccination chez les enfants nés dans le monde au cours de l’année 2002. Cette année-là, 132,8 millions d’enfants sont nés. En se référant aux différentes politiques vaccinales proposées dans l’ensemble des pays du monde (à l’exception du Bahreïn, de la Corée du Nord, de la Jordanie et des territoires palestiniens), les auteurs ont estimé que 100,5 millions d’enfants avaient été vaccinés au cours de leur première année. En prenant en compte le nombre de cas de formes graves survenant en l’absence de vaccination, les auteurs ont estimé à 29 729 le nombre des cas de méningites tuberculeuse prévenus au cours des cinq premières années de vie des enfants, soit un cas pour 3 435 vaccinations. Pour les miliaires tuberculeuses, le chiffre estimé est de 11 486 cas prévenus, soit 1 pour 9 314 vaccinations.

Le nombre des cas prévenus serait le plus important en Asie du Sud-Est (46 %), puis en Afrique subsaharienne (27 %) et dans la région ouest du Pacifique (15 %), régions du monde où l’incidence de la tuberculose est la plus élevée.

Deux ou trois dollars par dose.

Les chercheurs ont aussi analysé le rapport coût efficacité de la vaccination par le BCG. Avec un coût moyen de 2 ou 3 dollars par dose, le coût d’une vie gagnée serait de 206 dollars en moyenne. Pour que la politique de vaccination soit la plus efficace, il faut encore choisir la souche vaccinale la plus immunogène et développer les réseaux sanitaires d’accès à la vaccination dans les pays les plus pauvres.

Les auteurs soulignent aussi que leur étude n’a pris en compte que les formes pédiatriques les plus graves et que le rapport coût/efficacité du vaccin doit aussi prendre en compte les formes pulmonaires et extrapulmonaires des plus de 5 ans.

Dans ces conditions, le Dr Bourdin Trunz estime que ce rapport est encore nettement amélioré. L’experte de l’OMS propose que «la vaccination par le BCG soit utilisée dans les pays où l’incidence de la tuberculose est supérieure au seuil déterminé par l’Union internationale contre la tuberculose et les maladies pulmonaires. Dans ces pays, la vaccination doit être associée à une prise en charge médicamenteuse des malades par des traitements antibiotiques efficaces et courts».

« The Lancet », vol. 367, 1122-1123 et 1173-1180, 8 avril 2006.

> Dr ISABELLE CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7937