La progression de l'épidémie de diabète de type 2 et surtout l'augmentation du nombre de traitements disponibles ont conduit les experts à établir des recommandations sur les stratégies de prise en charge à mettre en oeuvre. David M. Nathan (Boston) a rappelé les principaux éléments de l'arbre décisionnel adopté par les sociétés européennes et américaines de diabétologie. Les résultats de l'étude TULIP communiqués à San Francisco sont en accord avec l'arbre décisionnel proposé.
LE PRINCIPAL critère d'efficacité d'une intervention thérapeutique reste le taux d'HbA1c. De nombreuses études dont la DCCT et l'UKPDS ont montré une augmentation régulière du taux de complications avec l'élévation du taux d'HbA1c au-delà de 7 %. «Le seuil de 7% comme objectif thérapeutique est acceptable et une baisse au-dessous de 7% doit être discutée en fonction de la tolérance et du risque d'hypoglycémie», a indiqué D. M. Nathan. La tolérance du traitement (notamment concernant les hypoglycémies et le poids) et l'observance des patients sont, en effet, des critères essentiels à prendre également en compte, ainsi que la réduction de la glycémie, le contrôle des autres facteurs de risque cardio-vasculaire et les coûts de traitement.
La première étape de la prise en charge reste fondée sur les mesures hygiéno-diététiques, associées, si elles ne sont pas suffisantes, à un traitement par metformine. La metformine agit en inhibant la production hépatique de glucose ; elle permet d'abaisser d'environ 1,5 % le taux d'HbA1c et n'entraîne pas d'hypoglycémie ; son coût est modéré. En dehors d'une éventuelle contre-indication ou intolérance, elle doit être prescrite en première intention et poursuivie lors des escalades thérapeutiques. L'étape suivante à mettre en oeuvre dans les trois mois si le taux d'HbA1c reste supérieur à 7 % est celle de la bithérapie, en associant à la metformine soit une insuline basale, soit un sulfamide hypoglycémiant, soit une glitazone. Selon David M. Nathan, chaque option a ses avantages : l'insuline basale est plus efficace et convient lorsque le taux d'HbA1c est élevé ; le sulfamide est peu coûteux ; et la glitazone n'expose pas au risque d'hypoglycémie. Si le taux d'HbA1c reste supérieur à 7 % en dépit de la bithérapie associée aux mesures d'hygiène de vie, il convient de passer à la troisième étape qui consiste soit à intensifier l'insulinothérapie en cas d'association metformine-insuline, soit à ajouter une glitazone en cas d'association metformine-insuline ou metformine-sulfamide, soit à ajouter une insuline basale en cas d'association metformine-sulfamide ou metformine-glitazone, soit enfin à ajouter un sulfamide en cas d'association metformine-glitazone. Enfin, la quatrième étape fait nécessairement appel à une insulinothérapie intensive associée à la metformine et, éventuellement, à une glitazone.
«Ces recommandations ne font pas état des toutes nouvelles classes d'antidiabétiques agissant sur la voie des incrétines, a précisé D. M. Nathan ; le recul est insuffisant pour les positionner de façon précise au sein de l'éventail thérapeutique et de nouvelles propositions seront bientôt nécessaires.»
Instaurer une insulinothérapie sans retard.
En marge de ces recommandations et dans la pratique quotidienne, les médecins attendent généralement trop longtemps, face à des objectifs non atteints, avant d'intensifier un traitement. Selon une étude de Bloomgarden Z. T. et coll., une insulinothérapie n'est initiée en moyenne qu'à partir d'un taux d'HbA1c proche de 9 % (Diabetes Care 2007 ; 30 : 174-180) ; attitude dommageable comme en témoignent plusieurs travaux, dont les résultats de l'étude TULIP qui viennent d'être présentés à San Francisco.
TULIP (Testing the Usefulness of Lantus when Initiated Promptly in patients with type 2 diabetes) est une étude multicentrique, randomisée, en ouvert, de 9 mois, comparant l'efficacité et la tolérance de l'initiation d'une insulinothérapie basale par Lantus ou l'intensification des mesures hygiéno-diététiques chez des patients diabétiques de type 2 avec un taux d'HbA1c compris entre 7 et 8 % et traités par des doses maximales de metformine et d'un sulfamide hypoglycémiant depuis deux ans. Les patients étaient âgés de 40 à 75 ans et avaient un indice de masse corporelle (IMC) compris entre 24 et 35 kg/m2. La dose de Lantus (une injection le soir) était déterminée par titration jusqu'à atteindre une glycémie capillaire à jeun comprise entre 0,70 et 1 g/l. L'intensification des mesures hygiéno-diététiques insistait sur les conseils alimentaires et d'activité physique visant une stabilisation pondérale (si IMC < 27 kg/m2) ou une perte de poids de 3 kg (si IMC > 27 kg/m2). Dans le groupe hygiéno-diététique, les conseils en matière de régime alimentaire et d'activité physique visaient une stabilisation pondérale si l'IMC était inférieur à 27 kg/m2 ou une perte de poids de 3 kg si l'IMC était supérieur à 27 kg/m2. Deux cent quinze patients ont été randomisés : 106 dans le groupe Lantus, 109 dans le groupe hygiène de vie. Le critère principal de l'étude était le pourcentage de patients à l'objectif (HbA1c < 7 %). Les critères d'évaluation secondaires portaient sur les variations des taux d'HbA1c et de glycémie à jeun et sur l'incidence des hypoglycémies.
Au terme de l'étude, le pourcentage de patients atteignant l'objectif HbA1c < 7 % était statistiquement plus élevé dans le groupe Lantus (66 %) que dans le groupe hygiéno-diététique (38 % ; p < 0,0001), ainsi que celui des patients ayant un taux d'HbA1c < 6,5 % (34 % dans le groupe Lantus contre 11 % dans le groupe hygiénodiététique ; p < 0,0001). Les patients soumis aux mesures hygiéno-diététiques avaient perdu davantage de poids que ceux traités par Lantus (– 2,5 kg ± 3,2 kg contre + 0,9 kg ± 2,9 kg ; p < 0,0001) et avaient présenté moins d'épisodes d'hypoglycémie (2 épisodes/patient/année contre 4,2 ; p < 0,0001) ; il n'y avait cependant pas de différence significative concernant les hypoglycémies sévères qui ont été rarissimes.
«Les résultats de l'étude TULIP démontrent l'intérêt de suivre les recommandations des sociétés américaines et européennes en débutant en temps opportun un traitement par insuline basale», a commenté le Pr André Grimaldi (Paris).
D'après la présentation affichée « Initiation of Insulin Glargine versus Lifestyle Management in People with Type 2 Diabetes and A1c of 7-8% » JF. Blickle et coll. Strasbourg France et la communication de David N. Nathan lors du symposium « Goals of Therapy in Hyperglycemia and Diabetes » parrainé par sanofi-aventis.
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