Pour faire face au risque de mort subite, par arythmie, chez des coronariens présentant une fonction ventriculaire gauche réduite, l'implantation de défibrillateurs a déjà été envisagée. Deux études, menées chez des patients testés pour leur risque d'arythmie, ont conclu à un bénéfice en termes de survie. Une troisième étude met également en avant un bénéfice de survie lié au défibrillateur, implanté cette fois sans investigations électrophysiologiques préalables, chez des patients présentant une altération marquée de la fonction ventriculaire gauche après un infarctus.
L'étude publiée aujourd'hui, dite Multicenter Automatic Defibrillator Implantation Trial II, a été menée chez 1 232 patients, recrutés durant quatre ans dans 71 centres américains et 5 centres européens et israéliens. Les patients, victimes d'un infarctus datant d'un mois au moins, présentaient une fraction d'éjection inférieure ou égale à 0,30. Aucun ne présentait a priori une indication d'implantation retenue par la FDA. Les patients en classe IV NYHA étaient par ailleurs exclus.
Mortalité de 14,2 % contre 19,8 %
Chez tous ces patients, les traitements médicaux conventionnels, supervisés par le médecin traitant, ont été encouragés. Mais les 3/5 des patients ont, en outre, subi une intervention pour implantation d'un défibrillateur automatique, selon les procédures standards.
Au terme d'un suivi de vingt mois en moyenne, la mortalité parmi les patients implantés était de 14,2 %, contre 19,8 % dans le groupe traité de manière conventionnelle. Ces résultats sont indépendants d'un certain nombre de variables : âge, sexe, fraction d'éjection, classe NYHA, intervalle QRS, de l'existence d'une HTA, d'un diabète, d'un bloc de branche gauche, d'une fibrillation auriculaire, du délai depuis l'infarctus (plus ou moins de six mois), de l'azotémie (plus ou moins environ 25 mg/dl), enfin de l'implantation d'un appareil à simple ou double chambre. Il faut également souligner que ces chiffres concernent la mortalité toutes causes confondues, l'origine des décès n'étant pas détaillée. On note enfin que contrairement aux études précédentes, où le bénéfice de l'implantation apparaissait dans les tout premiers mois, les courbes de survie ne commencent ici à diverger qu'autour du 9e mois. Selon les auteurs, ce bénéfice plus lent à se manifester pourrait être dû à une mortalité moindre dans le groupe traité par les seuls médicaments, à l'absence de stratification du risque d'arythmie, ou encore à la valeur plus basse de la fraction d'éjection retenue comme critère d'entrée.
En ce qui concerne les complications imputables à l'implantation, on relève des problèmes d'électrodes survenus dans treize cas (1,8 %) et d'infections dans cinq cas (0,7 %), qui ont requis des interventions chirurgicales. Aucun décès n'est toutefois à déplorer. En revanche, les phénomènes d'apparition ou d'aggravation d'une insuffisance cardiaque paraissent plus fréquents parmi les patients implantés. Parmi eux, 148 (19,9 %) ont dû être hospitalisés pour ce motif, contre 73 patients (14,9 %) dans le groupe recevant le seul traitement médicamenteux.
Une surveillance étroite
Pour expliquer cet effet délétère, les auteurs supposent que la survie prolongée, permise par le défibrillateur, est un délai supplémentaire pour l'apparition d'une insuffisance cardiaque et/ou que les chocs délivrés par le défibrillateur pourraient contribuer à altérer la fonction ventriculaire. Quoi qu'il en soit, chez un patient présentant une fraction d'éjection réduite, l'implantation d'un défibrillateur semble impliquer une surveillance étroite de l'insuffisance cardiaque.
Le bénéfice global étant démontré, il reste un problème de taille : le coût d'une implantation plus ou moins systématique. Aux Etats-Unis, de 3 à 4 millions de coronariens présenteraient une dysfonction ventriculaire gauche marquée et l'incidence serait de quelque 400 000 nouveaux cas/an. Si l'implantation prophylactique devait concerner un nombre significatif de ces patients, le coût deviendrait rapidement des plus substantiels. Ce qui n'empêche pas les auteurs de recommander l'implantation, compte tenu de son intérêt sur la survie. Ils en appellent simplement aux « forces du marché pour tirer vers le bas les coûts de cette thérapie ».
A. J. Moss et coll. « N Engl J Med », 2002 ; 346 : 877-83.
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