LA PARUTION du décret définissant le cahier des charges des contrats responsables (1), crucial pour la mise en musique de la réforme Douste-Blazy, serait maintenant « imminente », selon le secrétariat d'Etat à l'Assurance-maladie. L'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (Uncam) vient enfin de transmettre au ministère l'avenant conventionnel n° 1, qui aligne, au regard des contrats responsables, les conditions de dépassements tarifaires chez les médecins spécialistes des secteurs I et II consultés en accès direct et hors parcours de soins (« le Quotidien » des 16 et 29 mars).
Tandis que le gouvernement envisagerait, compte tenu de cet avenant, une franchise de 7 euros pour le patient pratiquant du « hors-piste », la Fédération française des sociétés d'assurance (Ffsa) a tenu à préciser ses positions sur le cahier des charges des contrats responsables car elle s'estime « mal comprise » jusqu'à présent.
Les assureurs santé affiliés à la Ffsa, qui couvrent « entre 12,5 et 13 millions de personnes », maintiennent qu'ils sont favorables à une « prise en charge partielle » des dépassements d'honoraires payés par leurs assurés chez les médecins spécialistes lorsqu'ils n'ont pas consulté au préalable leur médecin traitant. Mais, comme le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie et du conseil de l'Uncam, la Ffsa souligne maintenant que le reste à charge laissé aux patients doit être « significatif » afin de les « inciter à respecter le parcours de soins ».« Tous les assureurs santé souhaitent que la réforme réussisse », affirme Gérard Méneroud (CNP Assurance).
Où placer le curseur ?
Sur la base d'un ticket modérateur « majoré de 10 % » hors parcours de soins, la Ffsa a calculé que le patient paierait de sa poche au final « 5,75 euros ou 10,50 euros », selon que sa complémentaire refuse de lui rembourser 50 % ou 100 % de la majoration du ticket modérateur et du dépassement d'honoraires pour chaque consultation spécialisée en accès direct tarifée à 32 euros en secteur I. La Ffsa ne veut pas que le curseur du remboursement soit placé trop bas, sachant qu'elle juge déjà « très significatif » un reste à charge de 5,75 euros par consultation pour les patients. « Il faut donc trouver le bon niveau qui ne risque pas de les éloigner des soins », argue Gilles Johanet, président du comité maladie à la Ffsa et directeur des activités santé et collectives du groupe AGF.
La Ffsa fait valoir par ailleurs qu'un reste à charge « trop important » risque de produire « un effet contre-productif sur la réforme », dès lors que les assurés pourraient, tous comptes faits, « préférer payer la taxe de 7 % sur les conventions d'assurance » plutôt que de bénéficier d'un contrat responsable moins cher mais trop restrictif. Enfin, la Ffsa rappelle que les contrats d'assurance ne sont pas modifiables en assemblée générale comme les contrats mutualistes. « On a une forte crainte que nos assurés ne se laissent pas convaincre de souscrire au nouveau contrat si la réduction des garanties est trop forte », indique Gérard Méneroud.
Incontournables arbitrages.
Alain Rouché, directeur santé de la Ffsa, fait remarquer que les assureurs se distinguent de la Mutualité française (dont les mutuelles couvrent 38 millions de personnes) qui, elle, « reste sur sa position d'origine », visant à l'exclusion totale des dépassements d'honoraires dans le cahier des charges des contrats responsables.
Cependant, pour Gilles Johanet, les divergences de vues ne se situent pas entre assureurs et mutualistes. « Le vrai clivage, il est entre les contrats individuels et les contrats collectifsdes complémentaires santé, explique l'ex-directeur de la Caisse nationale d'assurance-maladie. La proportion des contrats prenant déjà en charge les dépassements est de 60 % parmi les contrats collectifs et de 66 % chez nous, parce que dans le monde de l'assurance, la part des contrats collectifs est beaucoup plus importante que dans le monde mutualiste. La Mutualité française aura sans doute un arbitrage à faire entre sa volonté de développer les contrats collectifs et sa volonté non moins forte de ne pas rembourser les dépassements », conclut Gilles Johanet.
Alain Rouché note pour sa part que « le débat s'est polarisé sur la prise en charge ou non des dépassements », alors que le décret définissant les contours des contrats responsables doit aussi « trancher sur la prise en charge de tout ou partie des prescriptions du médecin traitant et des actes de prévention ». La Ffsa suggère à cet égard une prise en charge pour les actes à « utilité médicale forte » et les médicaments « à service médical rendu élevé ».
(1) Prévus par l'article 57 de la loi du 13 août 2004, les contrats responsables seront à compter de 2006 les seuls contrats de complémentaires santé bénéficiant d'aides publiques (exonération de la taxe de 7 % sur les conventions d'assurance, déductions fiscales et sociales).
Naissance imminente de l'Unoc
La naissance officielle de l'Union nationale des organismes complémentaires (Unoc), prévue par la loi sur la réforme de l'assurance-maladie, est toujours subordonnée à la parution d'un décret, mais celui-ci devrait « être publié dans les jours qui viennent », selon la Ffsa. Les membres du futur bureau de l'Unoc, que présidera Jean-Michel Laxalt, de la Mutualité française, ont « déjà commencé à travailler » de manière informelle et programment « une première réunion du conseil d'administration de l'Unoc au début du mois de mai », précise Alain Rouché, de la Ffsa.Conformément à un accord conclu à la fin de 2004 entre les différentes familles de complémentaires santé, l'Unoc doit accueillir en son sein des représentants de la Mutualité française (58 % du marché des frais de soins), de la Ffsa (22 %), du Comité technique des institutions de prévoyance (Ctip, 20 %), et du régime d'Alsace-Moselle.
De son côté, le conseil de l'Uncam a commencé à étudier le 14 avril des « orientations » concernant ses futures relations avec l'Unoc. L'Uncam recense notamment comme « points de débat » : « L'implication de l'Unoc dans les négociations conventionnelles, ses propositions sur le périmètre de prise en charge collective, la gestion du risque, les échanges de données »...
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