L'industrie pharmaceutique japonaise souffre des prix trop bas des médicaments, qui freinent la recherche-développement nécessaire à l'élaboration de nouveaux médicaments, ont estimé récemment à Tokyo des représentants européens du secteur.
Tandis que les acteurs européens de la pharmacie investissent chaque année 17 milliards d'euros (111,5 milliards de francs) dans la recherche-développement, à laquelle les Etats-Unis ont consacré 18,9 milliards d'euros en 1999, les dépenses japonaises dans ce domaine n'ont atteint que 5,7 milliards la même année, selon Jean-François Dehecq, P-DG du groupe français Sanofi-Synthélabo.
M. Dehecq, qui est aussi président d'EFPIA, l'association des entreprises pharmaceutiques européennes, a présidé un colloque destiné à sensibiliser les acteurs japonais de la santé sur les carences du Japon dans la recherche pharmaceutique.
Le Japon semble résister à l'introduction de nouveaux médicaments : sur l'ensemble des nouveaux médicaments commercialisés après 1995, 57 % des ventes ont eu lieu aux Etats-Unis, 25 % en Europe et 5 % seulement au Japon. « Ces chiffres parlent d'eux-mêmes », a estimé M. Dehecq.
Prix trop faibles
Pour les industriels européens, la clé du problème réside dans le système de fixation des prix des médicaments, qui sont trop faibles par rapport à leur coût de développement, ce qui bloque l'innovation.
Le ministère de la Santé, qui fixe d'autorité les prix des médicaments, tend depuis quelques années à les pousser à la baisse afin de réduire les dépenses de l'Etat en la matière, ce qui rogne les marges des groupes pharmaceutiques et les empêche de continuer à innover, selon l'industrie européenne.
« Du fait des baisses de prix répétées, la proportion (du coût des médicaments dans les dépenses de santé) est passée de 29,5 % en 1991 à 20,1 % en 1997, et est probablement en dessous de 20 % aujourd'hui (...) Il n'y a plus beaucoup de marge pour réduire encore les prix sans affecter la capacité des groupes japonais à mettre au point de nouveaux médicaments », a estimé Peter Löscher, représentant du groupe européen Aventis Pharma au Japon.
Selon M. Löscher, l'Etat devrait se pencher sur un système plus juste de rétribution de la recherche, en élargissant les critères d'attribution des primes versées aux entreprises développant des médicaments particulièrement innovants.
« Le problème du prix des médicaments n'est pas un problème spécifiquement japonais, il existe aussi aux Etats-Unis et en Europe », tempère Nozomi Imajo, porte-parole de la filiale du groupe pharmaceutique Roche, Nippon Roche, au Japon.
« La spécificité du Japon, c'est que les prix, une fois fixés par le ministère de la Santé, ne bougent plus. Donc, si on se trompe, c'est irréparable », selon le représentant d'un groupe pharmaceutique français dans l'archipel.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature