PRATIQUE
Généralités
Il va sans dire que, à ce jour, personne n'a trouvé la solution et qu'aucune technique ne permet d'obtenir 100 % de guérison. Mais une meilleure connaissance des principes physiopathologiques qui président à l'incontinence a permis de progresser dans la prise en charge de cette pathologie. La guérison de l'IUE est obtenue dans plus de 80 % des cas par les techniques « classiques », voire 90 % des cas par le TVT. L'objectif actuellement poursuivi est de se rapprocher de 100 % de guérison, en diminuant les effets secondaires indésirables, qui restent fréquents.
D'une façon générale, la cure chirurgicale de l'incontinence urinaire d'effort vise à suspendre le col vésical et l'urètre proximal, qui sont réintroduits dans l'enceinte de pression abdominale et y restent lors des efforts. Cette suspension doit permettre de corriger la « vésicalisation » de l'urètre et la ptôse urétrale, de rétablir l'angle urétro-vésical postérieur, d'augmenter la longueur fonctionnelle de l'urètre et, de ce fait, la zone de continence. Par ailleurs, la plupart de ces interventions associent au mécanisme précédent un effet « dysuriant » par l'obstruction urétrale plus ou moins marquée qu'elles entraînent, ce qui s'oppose à la fuite urinaire.
Cinq types d'intervention
De façon schématique, il faut différencier cinq types d'interventions :
A. les colporraphies antérieures (Marion-Kelly) ;
B. les interventions de suspension du col vésical, destinées à corriger l'hypermobilité urétrale :
- colposuspensions rétro-pubiennes (Burch et Marshall-Marchetti-Krantz) ;
- colposuspension paravaginale ;
- suspensions à l'aiguille (Pereyra, Raz, Stamey) ;
C. les interventions destinées à corriger l'insuffisance sphinctérienne :
- bandelettes sous-cervicales ;
- injections péri-urétrales ;
- sphincter artificiel ;
D. la coeliochirurgie ;
E. le TVT.
A - Les colporraphies antérieures
Historiquement, c'est Kelly qui, au début du siècle, développa d'abord sa technique, ouvrant ainsi l'ère de l'abord vaginal. Il s'agit d'interventions simples, rapides, où le risque opératoire est moindre et donc tout à fait adaptées à des sujets âgés et fragiles. Quelle que soit la technique, ces interventions par voie basse exclusive visent à effectuer une plicature sous-urétrale pour soutenir le col vésical et l'urètre par les tissus para-urétraux (Marion-Kelly), les muscles bulbo-spongieux et élévateurs (Berkow) ou en outre les ligaments vésicaux (Ingelman-Sundberg). Ces éléments sont ensuite suturés sur la ligne médiane.
Les résultats en sont très variables, sans doute car il s'agit d'interventions peu reproductibles, en raison même de l'imprécision de leur description. En tout état de cause, ce type de chirurgie ne peut être valablement conseillé en raison des multiples techniques thérapeutiques actuellement réalisables.
B - Les interventions de suspension du col vésical
Colposuspension rétropubienne
Elles visent à remettre en position intra-abdominale la jonction vésico-urétrale. Leur principe est simple : la suspension du col vésical est assurée par un fil tractant la paroi vaginale qui est utilisée comme sangle sous-cervicale et dont les extrémités sont fixées à un élément antérieur solide.
On peut distinguer deux grands types de colposuspensions « classiques » qui utilisent un abord endopelvien. Dans les deux cas, des fils non résorbables sont passés dans l'épaisseur du vagin, de part et d'autre du col et de l'urètre et fixés :
- soit à la face postérieure de la symphyse pubienne : opération de Marshall-Marchetti-Krantz, décrite en 1949 ;
- soit latéralement : aux ligaments de Cooper par l'opération de Burch, décrite en 1961.
Richardson propose en 1981 une colposuspension vaginale en rattachant de chaque côté le cul-de-sac vaginal tapissé du fascia endopelvien aux muscles pubo-coccygiens et obturateurs internes au niveau de l'arc tendineux pelvien. Cette technique a pour avantage de restaurer une anatomie normale. Son promoteur obtient 95 % de bons résultats. Il s'agit cependant d'une technique récente et peu usitée. Elle semble néanmoins intéressante.
La colposuspension à l'aiguille, dite « simplifiée » (filo-suspension) : elle utilise le même principe de suspension du col, mais le passage des fils se fait par voie vaginale exclusive. La morbidité est donc nettement inférieure. Les fils sont ensuite noués entre eux après traversée de la paroi abdominale antérieure qui sert de chevalet. Plusieurs techniques ont été proposées sur ce principe : Pereyra (1957), technique de Pereyra modifiée (1978), Raz (1981), Stamey (1973), Cobb, Radge (1978), Gittes(1987).
C - Les interventions destinées à corriger l'insuffisance sphinctérienne
1. Les techniques de soutènement du col par fronde visent à replacer le col vésical dans l'enceinte de pression abdominale, non pas en utilisant de manière directe ou indirecte les tissus péri-urétraux ou vaginaux (comme dans les interventions de colposuspension rétropubiennes), mais en utilisant un matériel prélevé à distance, moins exposé aux risques d'altération future que le vagin, et placé sous le col vésical.
En France, elle est utilisée pour corriger une hypermobilité uréthrale, car elle semble offrir un résultat plus stable dans le temps que la colposupension.
On distingue, en fonction du matériau, de la voie d'abord et du mode de fixation utilisés : l'intervention de Goebell-Stoeckel-Michon, qui utilise une bandelette musculo-aponévrotique pédiculisée sur le muscle droit de l'abdomen et fixée à la racine du muscle droit controlatéral après son passage en fronde sous le col vésical. Une voie d'abord mixte, abdomino-vaginale est utilisée.
Différentes techniques utilisant des bandelettes de tendons hétérogènes ou de tissus prothétiques ont été décrites. Elles sont actuellement abandonnées, car elles avaient l'inconvénient majeur d'être très mal tolérées.
Les techniques utilisant une bandelette aponévrotique libre, prélevée horizontalement et fixée aux ligaments de Cooper : intervention de Cukier (voie d'abord abdomino-vaginale en 1980), ou de Beurton en 1987, puis de Blaivas en 1991 (abord abdominal exclusif). Elles ont pour objectif de minimiser le risque d'éventration.
Ce même principe de fronde sous-cervicale est utilisé par la technique de Bologna, intervention simplifiée au cours de laquelle deux bandelettes sont prélevées aux dépens de la paroi vaginale antérieure, puis passées ensuite, par voie basse exclusive, de chaque côté du col vésical, pour être fixées enfin soit à l'aponévrose des muscles droits, soit aux ligaments de Cooper, grâce à une courte incision sus-pubienne.
L'abord chirurgical peut être mixte, mais aussi hypogastrique pur ou vaginal pur.
2. Les injections para-urétrales
Elles visent à réaliser un soutènement de l'urètre et une meilleure occlusion de celui-ci. La technique consiste à injecter une substance dans les tissus péri-urétraux. La pâte de Téflon a d'abord été utilisée, mais ce produit tend à être abandonné en raison de ses risques iatrogènes.
Actuellement, d'autres matériaux, tel que le collagène, sont proposés, dont la tolérance paraît excellente, bien que son caractère biodégradable semble hypothéquer la stabilité des résultats dans le temps.
La graisse et le silicone ont été proposés encore plus récemment, mais un recul plus important manque pour évaluer les résultats.
Chaliha et Williams, dans une revue récente de la littérature, donnent les résultats encourageants de l'utilisation de macroplastique (4,4 ml par injection). Buckley a obtenu avec un recul d'un an (moyenne : 17 mois), 70 % de guérison et 10 % d'amélioration.
Le sphincter artificiel : d'apparition récente (Scott, 1972), il constitue la méthode la plus récente dans le traitement de l'incontinence urinaire d'effort. Son principe, simple, consiste à mettre en place, par voie abdominale ou abdomino-vaginale, un anneau gonflable autour du col vésical.
Différentes améliorations technologiques ont permis d'aboutir au sphincter actuellement utilisé : l'AS 800. Il comprend :
- une pompe munie d'un bouton de désactivation qui est inséré au niveau de l'une des deux grandes lèvres et permet à la patiente d'obtenir des mictions à la demande ;
- une manchette, placée chez la femme autour du col vésical ;
- et un ballon, placé en situation sous-péritonéale, de façon à ce qu'il soit soumis aux variations de pression abdominale.
D - La coeliochirurgie
Parmi les techniques récentes et innovantes, une place particulière doit être faite à la cliochirurgie. Elle vise à minimiser la morbidité de l'acte chirurgical en assurant une efficacité comparable. En d'autres termes, elle vise à offrir aux patientes l'efficacité du Burch alliée à la morbidité des suspensions à l'aiguille.
E - Le TVT
Le TVT (Tension free Vaginal Tape) est une nouvelle technique simplifiée de correction de l'incontinence urinaire d'effort qui s'est développée sous l'impulsion de l'équipe gynécologique suédoise d'Ulmsten en 1994. Son principe repose sur l'existence d'un hamac vaginal sous-urétral qui représente un mécanisme essentiel de la continence, associé au rôle stabilisateur des ligaments pubo-urétraux. Cette intervention réalise un soutien sans tension de la partie moyenne de l'urètre par une bandelette auto-agrippante de Prolène de 40 cm x 1,5 cm présentée dans une gaine plastique et reliée à deux alènes permettant son introduction par voie vaginale. Une incision vaginale pré-urétrale de 1 cm permet le passage de la bandelette dans l'espace prévésical puis l'aponévrose musculaire de la paroi abdominale. Un réglage très précis de la bandelette est possible selon l'effet produit par la toux de la patiente sur table. En dehors de son rôle mécanique, elle entraînerait également une modification du collagène. Réalisée sous anesthésie locale (ou neuroleptanalgésie ou rachianesthésie), c'est une technique peu invasive et facilement reproductible, autorisant la sortie le lendemain de l'intervention. Cette intervention est très efficace sur l'incontinence mais non dénuée d'effets secondaires.
En évaluation : le SVS
Le SVS (soutènement vésical par sis) est une technique récente en cours d'évaluation. Elle représente l'association de la colposuspension paravaginale (pour son efficacité et le caractère très physiologique de sa correction) et l'intervention de Goebell-Stoeckel pour sa solidité. Elle est parfaitement reproductible grâce à des travaux récents sur l'arcus tendineux du fascia pelvien.
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