Livres
Encore une fois ce n'est pas celui que l'on attendait qui a été couronné. Imre Kertész est le premier auteur de langue hongroise à recevoir la prestigieuse distinction et à travers lui c'est toute la littérature hongroise qui s'ennorgueillit même si le lauréat, qui est d'ailleurs installé depuis un an à Berlin où il enseigne au Collège des sciences, n'a jamais beaucoup participé à la vie littéraire de son pays, où les officiels l'ont longtemps boudé.
Né dans une famille juive de Budapest en 1929, Imre Kertész a été déporté en 1944, à l'âge de 15 ans, à Auschwitz-Birkenau, puis à Buchenwald, où il a été libéré en 1945. C'est de cette expérience qu'il puise la matière première de sa littérature, pour en tirer une métaphysique du renoncement, chez les victimes comme chez les bourreaux : renoncement à soi, à l'autre. Pour autant, il ne « s'écrit » pas, observe sans condamner, fait revivre sans revivre lui-même.Car Imre kertész subit un destin auquel il ne s'identifie pas. « On ne décide pas vraiment soi-même de cette diffénce : finalement c'est à ça que sert l'étoile jaune », dit-il.
Après son retour en Hongrie, il travaill à partir de 1948 pour le quotidien Vilàgossàg de Budapest avant d'en être licencié en 1951, quand le journal fut proclamé organe du parti communiste. Il devient alors traducteur d'auteurs de langue allemande tels que Nietzsche, Hofmannsthal, Schnitzler, Freud, Roth (Philip Roth était présenté comme le plus probable des nobélisables de l'année), Wittgenstein et Canetti (Nobel 1981), qui ont tous eu une influence sur sa création littéraire.
Indifférence et incompréhension
C'est seulement en 1975, après avoir mis dix ans à le rédiger, qu'il a publié son premier roman, « Etre sans destin », traduit en français en 1997 chez Actes Sud. Dans l'indifférence et le silence, voire l'incompréhension de ses pairs et du public, le livre passant parfois pour l'uvre d'un iconoclaste manquant d'« indignation morale ».
Il y raconte, avec une indifférence parfois morbide, l'histoire de György Köves, un jeune homme déporté dans des camps de concentration, qui s'adapte et survit. « Köves promène un regard d'enfant sur les événements, sans bien les comprendre, sans les trouver anormaux ou révoltants... il n'a pas le recul du lecteur », a relevé l'Académie suédoise, ajoutant : « La faculté d'adaptation du prisonnier à Auschwitz est une expression du même conformisme que celui qui règle notre quotidien et notre vie sociale ». Dont acte.
Imre Kertész a du attendre la chute du mur de Berlin, en 1989, pour être reconnu comme un grand écrivain et recevoir ultérieurement de prestigieux prix littéraires, dans on pays et en Allemagne. Il avait publié l'année précédente « le Refus » (traduit en 2001), le deuxième volet d'une trilogie complétée en 1990 avec « Kaddish pour l'enfant qui ne naîtra pas » (traduit en 1995), où réapparaît Köves, qui fait sa « Kaddish » pour l'enfant qu'il refuse de mettre au monde, ce monde qui engendra Auschwitz. Actes Sud a également traduit, en 1999, « Un autre : chronique d'une métamorphose », un récit littéraire sous forme de notes prises de 1991 à 1995.
Imre Kertész, qui a accueilli l'annonce de l'Académie « avec une grande joie » tout en estimant que le prix récompensait éalement la littérautre hongroise dans son ensemble, a déclaré que son prochain roman était déjà terminé pour moitié ; il sera, sous le titre provisoire de « Liquidation », une « continuation de (son) vieux sujet, un dernier regard sur l'Holocauste, mais dans le cadre hongrois de la transition démocratique, donc un roman moderne ».
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