Congrès-Hebdo
Comme l'expliquait « le Quotidien » (n° 7272), tous ces essais avaient pour objectif d'induire une réponse immunitaire spécifique chez des séropositifs traités et bien contrôlés, en utilisant un vaccin préparé avec du virus canarypox, portant des fragments de gènes d'enveloppe nef et pol du VIH (ALVAC-VIH versus CP 1433), des lipopeptides (Lipo 6T), portant des fragments de protéines virales gag, nef et pol, ou l'association des deux substances.
Dans l'essai ANRS 093 (Vaccil-2), présenté par Yves Lévy, 70 patients ont été inclus avec des CD4 > 350 et une charge virale < 50 copies. Quatre injections de l'association, à quatre semaines d'intervalle, ont été pratiquées chez 33 patients suivis par trois cures d'IL2, dans le dessein de faire remonter les CD4. Les autres patients poursuivaient le traitement antirétroviral seul, représentant le groupe témoin. A un an, on observe une réduction significative du nombre de patients sous trithérapie dans le groupe immunothérapie (p = 0,027) et une augmentation, elle aussi significative, de la réponse immunitaire à au moins l'un des antigènes du VIH.
On observe ainsi une réponse immunitaire favorable et un meilleur contrôle viral chez les patients « vaccinés », la supériorité, par rapport au contrôle, demeurant, quand on prend en compte deux autres paramètres influant sur le résultat à un an (prise antérieure d'IL2 chez 15 patients et charge virale faible au début de l'essai).
L'essai ANRS 094, présenté par R. Tubiana, est un essai ouvert qui a porté sur 48 patients eux aussi contrôlés par HAART depuis au moins un an (charge virale inférieure à 200 copies, CD4 supérieurs à 400 cellules). Ces patients ont reçu quatre injections par mois du vaccin seul (ALVAC-HIV versus CP 1433), sans IL2, et, un mois plus tard, le traitement antirétroviral était interrompu. Là encore, on note une réponse immunitaire (p24 LPA) au cours de la vaccination, 25 % présentant déjà une positivité avant la vaccination. En outre, chez 37 % des patients, on enregistre un triplement des CD8 cytotoxiques spécifiques (HIV-gag). Sur le plan clinique, avec un recul de 44 semaines, 10 patients n'ont pas repris de chimiothérapie antirétrovirale (21 %), alors que les autres ont dû la reprendre, en moyenne après 6,6 semaines (l'existence d'une réponse immunitaire p24 à l'arrêt du traitement étant de bon pronostic ; p = 0,02).
Le dernier essai (Lipthera) réalisé à Cochin et à Tenon a porté sur 24 patients et a utilisé un « vaccin » lipopeptidique, en 3 injections (J0, 3 semaines et 6 semaines), la trithérapie étant interrompue à six mois si les CD4 restaient au-dessus de 350 et la charge virale, inférieure à 50 copies. Les résultats biologiques sont assez comparables à ceux observés dans les essais précédents, avec un taux de réponse (CD4 et CD8 cytotoxiques) de l'ordre de 90 %. Un an après l'arrêt du HAART, 7 patients évalués sur 17 restent sous traitement, avec moins de 30 000 copies (5 étant à moins de 10 000 copies). On remarque toutefois que, chez 4 patients, la chimiothérapie a dû être réintroduite après moins d'un mois d'arrêt. En outre, les auteurs ne notent pas de corrélation entre la réponse immunitaire induite et l'évolution de la charge virale, après arrêt du traitement antirétroviral.
On le voit, ces essais non totalement superposables peuvent faire naître des espoirs, mais les résultats restent très préliminaires, soulevant encore de nombreuses questions : rôles respectifs des différentes substances utilisées, et en particulier l'IL2, risque d'échappement virologique, évolution clinique à plus long terme (en comparant dans les populations étudiées des sujets « vaccinés » et « non vaccinés ») après arrêt du HAART. D'où l'écoute attentive et les questions pertinentes des congressistes du CROI. Dans ces conditions, on peut se demander si une conférence de presse grand public s'imposait en avant-première, d'autant que l'on sait bien - à travers de multiples exemples passés - que dans le grand public ce thème entraîne facilement des promesses lyriques et, ce qui est plus grave, une mauvaise information des patients.
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