DANS LA NUIT fraîche, dans le silence feutré de la nuit qui vient de tomber monte le galop du cheval… monte sourdement, doucement… Vêtu de blanc est le cavalier, ou plutôt, le croit-on, la cavalière… On croit voir, on ne voit pas bien… et puis soudain l'on comprend. C'est un être décapité qui mène à grand train la belle monture… Image puissante et dure qui nous rappelle que nous sommes à Versailles, dans la beauté sublime du parc… mais l'on pourrait entendre la guillotine si l'on prêtait l'oreille…
De tous les spectacles qu'ait signés Bartabas, l'inventeur du théâtre équestre Zingaro, installé à Aubervilliers, le fondateur de l'Académie équestre sise aux Grandes l'Écuries, place d'Armes, à Versailles, « Les Juments de la nuit » est l'un des plus accomplis.
Les chevaux vecteurs de l'émotion.
Plus que jamais, Bartabas s'affirme comme un artiste très puissant, très original. Il aime les chevaux, il les magnifie, mais ils ne sont que le vecteur de l'émotion. Ils sont des acteurs parmi d'autres acteurs. Et comme jamais. Réunissant les cavaliers du théâtre équestre Zingaro d'Aubervilliers et ses élèves de l'Académie équestre de Versailles, Bartabas réussit à traduire en images, en mouvements, en eaux et lumières, en musiques, en sons, en paroles, le film sublime de Kurozawa, « le Château de l'araignée », adaptation cinématographique du « Macbeth » de Shakespeare.
On pourrait détailler les images, leur enchaînement, on pourrait raconter minute par minute ce « film » envoûtant. Mais il faut laisser à chacun le bonheur de la découverte car le metteur en scène manie les effets, les enchaînements d'une manière époustouflante. Il y a des redites, des moments de bégaiement. Mais ce n'est rien. Demeurent la force de l'avancée inéluctable de la tragédie et l'intelligence de la composition des images. Bartabas s'appuie sur une équipe artistique formidable. Les feux d'artifice, les jets d'eau, la projection des images sur des murs d'eau composés de milliers de gouttelettes apportent quelque chose de fascinant au spectacle. Dans la nuit, l'apparition du Château de l'araignée est un moment extraordinaire.
Il est des images que l'on connaît. Des effets que Bartabas réutilise. Mais on l'attend. On attend les cavalcades à bride abattue, comme on attend le troupeau des chevaux… Il faut se laisser porter, se laisser envahir par ce rêve et le partager…
Château de Versailles, Bassin de Neptune, les vendredis 5 et 12 septembre, les samedis 6 et 13 septembre, à 21 h 30. durée du spectacle : 1 h 40 sans entracte.
A lire et regarder « La Voie de l'écuyer », album de textes de Sophie Nauleau et de photos de Alfons Alt, ouvrage de 300 pages consacré à l'Académie équestre de Versailles. Actes Sud éditeur, 49 euros.
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