« LA DECOUVERTE d'un portage chronique dans la vésicule biliaire d'un modèle animal est importante car elle suggère une source potentielle de contamination alimentaire », déclare dans un communiqué le Dr Christopher Contag (université de Stanford, Californie), qui a dirigé cette étude.
Listeria monocytogenes est une bactérie que l'on trouve dans le sol, les végétaux et dans de nombreux réservoirs animaux.
Chez l'homme, l'infection à L. monocytogenes résulte principalement d'une transmission alimentaire et survient préférentiellement chez les immunodéprimés et les femmes enceintes (et leurs nouveau-nés).
La listeriose est fatale dans 20 à 40 % des cas malgré l'antibiothérapie, et est à l'origine de 500 décès annuels aux Etats-Unis.
La bactérie prolifère aux températures réfrigérées.
Si la bactérie est tuée par la cuisson, elle prolifère aux températures réfrigérées et elle est trouvée le plus souvent dans des aliments comme les fromages à pâte molle, les viandes insuffisamment cuites ou les aliments prêts à être consommés.
De nombreuses inconnues persistent sur le processus d'infection et de colonisation de la bactérie.
Hardy, Contag et coll., de l'université de Stanford et de la compagnie Xenogen (Almeda, Californie), ont fait appel à une technique d'imagerie par bioluminescence afin de déterminer quelle est la distribution spatiale au fil du temps de la listeria lorsqu'elle infecte la souris.
La bactérie a donc été marquée par une molécule luminescente qui peut être détectée de façon non invasive chez l'animal vivant.
Les chercheurs ont ainsi observé des signaux lumineux apparaissant et disparaissant en plusieurs endroits au cours du temps, indiquant des vagues de croissance et d'élimination bactérienne.
Mais ils ont découvert un gîte microbien insoupçonné : la vésicule biliaire. Le signal intense venant de la vésicule biliaire peut être observé pendant plusieurs jours, peut apparaître pour la première fois jusqu'à quinze jours après l'administration orale, aussi bien chez des animaux malades que chez les animaux asymptomatiques.
Une autre surprise est la façon dont la bactérie se réplique dans la vésicule biliaire. Normalement, la listeria tente d'échapper au système immunitaire en se répliquant à l'intérieur des cellules de l'hôte. Mais, dans la vésicule biliaire, la bactérie se réplique de façon extracellulaire, directement dans la cavité remplie de bile.
Comme l'agent de la fièvre typhoïde.
« La chose la plus frappante de cette recherche est que nous observons une prolifération énorme sans maladie », souligne le Dr Jonathan Hardy. « Elle révèle aussi une nouvelle face du pathogène : une prolifération dans un autre endroit et d'une manière différente. »
La seule autre bactérie connue pour se réfugier dans la vésicule biliaire d'un hôte asymptomatique est la bactérie de la fièvre typhoïde. Celle-ci peut être transmise entre personnes par l'intermédiaire de la contamination alimentaire (la mauvaise hygiène permet à la bactérie excrétée dans les selles d'être transmise aux mains puis aux aliments).
On ignore encore si des individus en bonne santé peuvent héberger une croissance de Listeria dans la vésicule biliaire. Mais si c'est le cas, « la listériose pourrait être transmise sans le savoir, de la même manière que la bactérie de la fièvre typhoïde », concluent les chercheurs.
L'équipe projette maintenant de rechercher des cibles moléculaires pour empêcher ce portage.
« Science », 6 février 2004, p. 851.
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