Symptôme fréquent chez la personne âgée, les rachialgies risquent de devenir un véritable enjeu de santé publique chez les sujets de plus de 80 ans. Une tranche d'âge en forte augmentation depuis la dernière décennie. A 80 ans, la réduction des réserves liées au vieillissement et aux pathologies chroniques entraîne un syndrome de fragilité avec récupération plus difficile et risque permanent de décompensation fonctionnelle. Pour mieux répondre aux attentes de cette population en expansion, le Dr Bernard Verlhac a créé il y a deux ans un groupe spécifique du sujet âgé au sein de la Société française de rhumatologie.
Chez le sujet âgé, les signes fonctionnels à valeur d'orientation sont souvent mal exprimés, l'interprétation des symptômes est compliquée par la polypathologie liée au vieillissement et les risques de décompensation sont toujours présents. Dans ce contexte, chaque signe doit être minutieusement investigué et rapporté à une seule pathologie. La qualité de la relation malade-médecin est capitale afin que les symptômes ne soient pas banalisés et attribués trop vite au grand âge ou à une pathologie chronique commune. Les rachialgies, principalement les dorsalgies et les lombalgies, ne dérogent pas à cette règle. Souvent secondaires à des tassements vertébraux ostéoporotiques ou à l'arthrose, elles peuvent aussi révéler un infarctus du myocarde, une embolie pulmonaire ou d'autres urgences viscérales.
L'examen du patient souffrant de rachialgies aiguës est rendu difficile du fait des déficiences auditives, visuelles, mnésiques liées au vieillissement, en raison d'une gêne au déshabillage provoquée parfois par une douleur diffuse, dont l'intensité entraîne une incapacité fonctionnelle et favorise l'installation d'une certaine apathie où à l'inverse d'une agitation.
Dédramatiser la situation
L'interrogatoire de l'entourage sur les antécédents, les bilans radiologiques et biologiques antérieurs sont une aide précieuse au diagnostic. Dédramatiser la situation est primordial, soulager la douleur un impératif avant de poursuivre toute investigation. Les antalgiques de niveau 2 ou, si la douleur est difficilement supportable, les morphiniques à dose progressive pour tester leur tolérance, soulagent rapidement le patient.
Toute rachialgie aiguë dorso-lombaire justifie d'un bilan biologique simple (NFS, VS, CPR, électrophorèse des protéines) et de radiographies du rachis de face et de profil. Les clichés mettent souvent en évidence le tassement vertébral ou l'arthrose, les deux causes principales de rachialgie chez le sujet âgé. Mais il faut être prudent avant de rattacher les algies aux signes radiologiques d'arthrose en raison d'une discordance radioclinique fréquente. Scanner, scintigraphie osseuse et IRM ne sont indiqués que pour confirmer un diagnostic s'il existe des arguments en faveur d'une rachialgie symptomatique. Les contraintes de certaines de ces techniques en limitent leur utilisation chez le sujet âgé.
Face à la multiplicité des pathologies qui affectent la personne âgée, un bilan cardio-vasculaire simple peut être utile et en cas de doute, selon le siège de la douleur, une radiographie pulmonaire ou une échographie abdominale seront demandées. Le clinicien doit en effet se méfier d'une possible origine viscérale de la douleur. Infarctus du myocarde, embolie pulmonaire, dissection aortique, anévrisme de l'aorte abdominale qui se fissure, pleurésie... peuvent être révélés par des dorsalgies. Les cas ne sont pas rares, comme le confirme le Dr B. Verlhac. Leur gravité nécessite un diagnostic et une prise en charge spécifique précoce.
L'ostéoporose : principale cause des tassements vertébraux
L'ostéoporose, très fréquente au-delà de 80 ans en raison d'une fragilité accrue du tissu osseux, est la principale cause des tassements vertébraux chez les personnes âgées. Le traitement immédiat est purement symptomatique et fait appel au repos, aux antalgiques de niveau 2 pour soulager le patient ainsi qu'à la prévention des phlébites et à la kinésithérapie. L'ostéodensitométrie, associée au bilan phosphocalcique et inflammatoire, va permettre de confirmer le diagnostic et d'évaluer sa gravité. La prise en charge de l'ostéoporose est essentielle si l'on veut prévenir l'aggravation des déformations vertébrales à l'origine de troubles statiques importants et d'une incapacité fonctionnelle très invalidante. En complément d'une supplémentation en calcium et en vitamine D, différents traitements médicamenteux peuvent être proposés selon les cas et selon l'âge.
L'arthrose est une autre cause importante de rachialgies chez le sujet âgé. Le repos, les infiltrations locales de cortisone apportent un soulagement rapide en quelques jours. A distance de l'épisode aigu, les anti-inflammatoires non stéroïdiens et la kinésithérapie permettent d'éviter les récidives et de conserver une mobilité rachidienne satisfaisante.
D'après un entretien avec le Dr Bernard Verlhac, groupe hospitalier Sainte-Périne, Paris ; secrétaire général de l'Association gériatrie et rhumatologie.
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