SEPT MOIS après la canicule, l'Association des directeurs d'établissement d'hébergement pour personnes âgées (Adehpa) tire à nouveau la sonnette d'alarme. « Il est temps de lever enfin cet énorme sentiment de culpabilité à propos des 15 000 morts de l'été 2003 qui touche les Français. Les pouvoirs publics se déchargent de toute responsabilité et les responsables d'établissement apparaissent comme des coupables idéaux », dit au « Quotidien » Pascal Champvert, président de l'Adehpa. Alors qu'à ce jour la justice n'a ouvert qu'un seul dossier, celui de François Pichereau, directeur d'une maison de retraite à Reims, mis en examen pour « homicide involontaire » à la suite du décès d'une vieille dame pendant la canicule.
Selon l'Adehpa, aucune mesure crédible n'a été prise, à quatre mois de l'été, tant pour faire face à une nouvelle situation de crise que pour engager une réforme structurelle. La circulaire du secrétaire d'Etat Hubert Falco, en date du 18 février, demandant aux maisons de retraite de s'équiper d'une pièce climatisée « n'est qu'une circulaire parasol » puisqu'elle n'est pas accompagnée de sources de financement. « Et puis, ajoute Pascal Champvert , imposer sur l'ensemble du territoire la climatisation qui ne servira que tous les cinq ou dix ans cela n'a pas de sens. Les pouvoirs publics doivent d'abord financer un bilan thermique, avant que soit fait un point établissement par établissement. »
« Cela étant, poursuit-il , n'oublions pas que les victimes de l'été 2003 ne sont pas mortes d'un manque d'air frais, mais d'absence de relations humaines : des bras sont indispensables pour donner à boire à une personne âgée qui ne sait pas qu'elle se déshydrate. » L'Adehpa juge impératif de débloquer des crédits pour permettre à chaque maison de retraite d'employer en juillet-août 2004 trois saisonniers, élèves infirmiers ou étudiants en médecine, qui, canicule ou pas , « aideront les pensionnaires à mieux vivre ».
250 000 emplois à créer.
Reste le problème de fond. « Il faut, explique Pascal Champvert, apporter des éléments de réponse ad hoc à la crise structurelle », comme l'a souligné la commission d'enquête de l'Assemblée sur la canicule. Outre l'instauration d' « un pacte entre générations », l'Adehpa réclame des crédits d'Etat conséquents pour satisfaire les besoins. Le plan Vieillissement et Solidarités, rendu public le 6 novembre dernier et qui prévoit 15 000 emplois nouveaux dans les 10 000 maisons de retraite, devrait courir, à son avis, sur deux ans au lieu de cinq. « Il faut tendre vers la situation allemande, avec 8 intervenants pour 10 personnes âgées, contre 4 pour 10 actuellement . c'est-à-dire créer 250 000 postes de travail, du médecin à la femme de ménage et du psychologue à l'aide à domicile. Parallèlement, il serait utile de multiplier par 4 les 10 000 places d'hébergement supplémentaires annoncées dans le plan ». L'Adehpa propose la tenue d'une « conférence sur les aînés », en présence des financeurs, à l'expiration du plan Vieillissement et Solidarités devenu bi-annuel.
De leur côté, les structures d'hébergement du quatrième âge doivent répondre à certaines normes de qualité, conformément à un référentiel de bonnes pratiques professionnelles (« le Quotidien » du 9 février). « Il faudrait fermer 5 % des établissements », reconnaît Pascal Champvert, en stigmatisant « des directeurs cupides et stupides à mettre hors d'état de nuire ».
Enfin, certains bâtiments doivent être rénovés : près de 20 % des maisons de retraite ont fait l'objet d'un avis défavorable des commissions de sécurité incendie, rappelle le président de l'Adehpa, pour qui « les pouvoirs publics se défaussent trop souvent de leur responsabilité ».
Plus des trois cinquièmes du parc d'hébergement réservé aux anciens (682 000 lits au total) relèvent du public, 24 % du monde associatif et 13 % du secteur commercial. L'Adehpa regroupe 700 directeurs d'établissement, public et privé, d'hôpitaux locaux et de centres de long séjour.
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