ON SE SOUVIENT que Lionel Jospin semblait vouloir prendre tout son temps et que la vague Royal l’a forcé à se décider (négativement). Il n’est pas sûr que les calculs faits par Dominique de Villepin (je gouverne le plus longtemps possible avant de faire mon choix), par Mme Alliot-Marie (j’attends de voir si l’eau tiédit) ou par Jacques Chirac (je suis le mystère de l’année) ne cachent pas autre chose qu’une arrière-pensée : ils ne reculent que pour ne pas sauter.
Le seul qui, à ce jour, ait tenté de présenter une sorte de plate-forme personnelle, le plus souvent en prenant le contrepied de M. Sarkozy, c’est encore M. de Villepin.
Où est la différence ?
Mais rien ne l’encourage, pour le moment, à prendre des risques, à commencer par les sondages, qui ne lui sont pas favorables. Quant à Mme Alliot-Marie, sa valse-hésitation contient déjà un renoncement. Sa pusillanimité contraste singulièrement avec l’ardent désir de M. Sarkozy de se jeter dans la bataille. Bref, s’ils attendent trop, le Premier ministre et la ministre de la Défense seront forfaits.
Les forums, en définitive, n’avaient pas de raison d’être ; d’abord parce qu’on ne sait pas qui, à l’UMP, est candidat (en dehors de M. Sarkozy et de Nicolas Dupont-Aignan, dont la candidature est symbolique) ; ensuite, parce que le chef du gouvernement n’y participe pas ; enfin, parce que, au cours du premier forum, MAM n’a pas administré la preuve qu’elle est de quelque manière différente de M. Sarkozy.
On imagine très bien que l’actuel ministre de l’Intérieur ne prend plus au sérieux les candidatures virtuelles ; elles sont en train de s’effriter, y compris celle de M. Chirac, dont on ne voit pas comment il pourrait se commettre dans pareille aventure. En revanche, le candidat Sarkozy doit surveiller ce qui se passe à gauche : Ségolène Royal poursuit sa promenade sur un parterre de roses : l’accord conclu avec Jean-Pierre Chevènement s’ajoute à celui qui a été obtenu avec les radicaux de gauche. Ni M. Chevènement ni Christiane Taubira ne seront candidats, ce qui devrait éviter à Mme Royal de subir le sort de Lionel Jospin en 2002. Sa candidature se porte bien, d’autant mieux que les antilibéraux n’ont pas pu se mettre d’accord sur un candidat unique, ce qui va, par contraste, améliorer l’image unitaire de Ségolène.
A droite, on se bouscule.
Or, à droite, sinon à l’UMP, les candidats se bousculent : Jean-Marie Le Pen (qui n’a toujours pas ses 500 signatures, mais s’il était écarté de la course, les conséquences pour l’ordre public seraient plus graves que s’il était présent au second tour), Philippe de Villiers, M. Dupont-Aignan bien sûr, et surtout François Bayrou qui vient d’être sommé par les socialistes de se prononcer avant les élections : quand il aura été battu au premier tour, demandera-t-il le report de ses voix sur le candidat de la droite ou sur celui de la gauche ?
La question est dérangeante, dans la mesure où elle confirme que la virulence des attaques de M. Bayrou contre le pouvoir fait de lui quelqu’un qui est passé du centre droit à la gauche du centre gauche ; et il doit se demander, au terme de son analyse, s’il n’est pas social-démocrate, ou même socialiste bon teint. Mais c’est une question parfaitement légitime.
De plus, le problème se posera exactement dans les termes définis par les socialistes qui interpellent le président de l’UDF : il ne passera pas le cap du premier tour, alors pourquoi ne dit-il pas dès maintenant pour qui il faudra voter au second ?
En tout cas, M. Sarkozy n’est pas en mesure de faire à François Bayrou les offres faites par le PS au PRG et au MRC (les deux mouvements présenteront des candidats aux législatives dans des circonscriptions qui leur seront réservées). Ce n’est pas de cette manière que fonctionne l’hégémonique UMP. Existe-t-il un risque sérieux que M. Sarkozy, concurrencé par trop de candidats, ne parvienne pas à passer le premier tour ? Il est trop tôt pour le dire, il ne semble pas craindre cette fâcheuse éventualité et les sondages n’indiquent rien de tel. Au contraire, quelques enquêtes d’opinion le donnent en tête de la course, devant Ségolène, ce qui n’était pas le cas au lendemain de son sacre par le PS. Cela signifie que les triomphes d’un jour ne durent pas longtemps.
En revanche, à tous ceux qui affirmaient il y a trois mois qu’on ne parle que de Nicolas et de Ségolène, qu’il faut condamner la démocratie des sondages, que la situation peut se retourner très vite, que les élus ne seront pas les chouchous des sondages, on peut rétorquer aujourd’hui : eh bien, qu’est-ce qui a changé ? N’est-ce pas toujours Ségolène contre Nicolas ?
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