Le diagnostic de syndrome d'hyperactivité-déficit de l'attention ne peut être évoqué qu'en présence de ces deux éléments cliniques, auxquels s'ajoute l'impulsivité.
En pratique, explique le Dr Marie-France Le Heuzey, pédopsychiatre, hôpital Robert-Debré (Paris), l'un des deux aspects prédomine. Et le dépistage de l'affection est différent.
Lorsque l'aspect moteur, l'hyperactivité, prend le dessus, l'enfant est facilement repéré par le médecin. Dans le cabinet, c'est un touche-à-tout, qui joue avec le tensiomètre, coupe la parole... A l'hyperactivité, le DSM-IV (qui définit toutes les affections psychiatriques) ajoute l'impulsivité. Attention à un piège : l'enfant considéré comme infernal à l'école et qui se montre calme au cabinet.
Il zappe d'une activité à l'autre
Lorsque le déficit de l'attention prédomine, le diagnostic devient plus difficile. Il est plutôt le fait des enseignants. L'enfant est inattentif à l'école, il manque de concentration. Est-il simplement rêveur, s'ennuyant en classe, ou authentiquement inattentif ? L'interrogatoire permet de le savoir. L'enfant atteint ne peut soutenir son attention quelle que soit la situation : au cinéma, devant la télévision, au cours du jeu... « Il zappe d'une activité à l'autre », décrit de façon imagée Marie-France Le Heuzey. La définition clinique, qui parle de « passage d'une activité inachevée à une autre », lève un piège. Cet enfant, par ses fausses vivacité et curiosité, peut apparaître comme un surdoué. Mais le surdoué, rapide, il est vrai, finit ce qu'il a entamé. Le déficit d'attention retentit sur la scolarité. L'enfant ne suit pas les cours, mais aussi ne note pas bien ses leçons (il n'écrit que le début de la phrase).
L'affection est détectée classiquement au CP, c'est-à-dire à 6 ans, quand l'enfant doit rester en place. En fait, dès la maternelle, vers 4-5 ans, les enfants peuvent être repérés parce que commencent les devoirs en position assise. « Reconnaître l'affection plus tôt semble difficile, explique M.-F. Le Heuzey, puisque, physiologiquement, le tout-petit ne peut fixer son attention de façon prolongée. »
Il coupe la parole
Reste l'impulsivité. Il s'agit d'une « absence d'inhibition de l'action ». Ce symptôme constant fait que l'enfant répond en classe avant la fin de l'énoncé d'une question, coupe la parole, n'attend pas son tour dans les jeux ou ne peut réprimer ses gestes (par exemple, il bouscule ses camarades). « Cela lui joue des tours. Il passe pour impertinent, mal élevé, mauvais joueur, brutal. »
A partir de ces descriptions, il est facile de comprendre le triple retentissement du syndrome.
Tout d'abord scolaire, et sa prévention reste l'objectif principal du thérapeute. D'ailleurs, « pas de prescription, si pas d'échec scolaire », lance le Dr Le Heuzey. L'enfant est handicapé en classe par son inattention, notamment avec un retard en lecture, mais aussi parce qu'il est insupportable, bruyant, bavard.
Un bébé déjà infernal
Retentissement familial aussi. Il épuise ses parents. Il oublie aussitôt ce qui lui a été demandé ( « Va te laver les mains avant de dîner »). Les répétitions incessantes le font passer pour un enfant désobéissant, qui n'écoute pas. A l'interrogatoire, les parents évoquent parfois un bébé déjà infernal.
Conséquence sociale, les copains le rejettent parce qu'il est mauvais joueur et agressif.
L'enfant ne vit pas la situation facilement. Des signes de dépression sont fréquents, ainsi qu'une mauvaise image de soi.
Le traitement change la donne. Il est double. Et M.-F. Le Heuzey insiste sur la composante psycho-éducative. Il s'agit d'une aide comportementale incluant les parents. Le but du traitement est de permettre au jeune patient de mieux contrôler ses gestes, son travail, ainsi que d' « aider les parents à aider leur enfant ». La psychothérapie est de type cognitivo-comportementale avec renforcement des aspects positifs.
L'autre composante thérapeutique est la Ritaline. Les études lui attribuent 80 % d'efficacité. Mais selon l'expérience du Dr Le Heuzey, elle tend vers 100 % si l'indication est bien posée (notamment diagnostic correct). L'enfant traité se sent mieux. Ses résultats scolaires s'en ressentent. Deux ordres d'effets secondaires principaux sont rapportés : une diminution de l'appétit au début et des troubles du sommeil. La dernière prise doit avoir lieu avant 17 h. Elle n'est justifiée qu'en cas de devoirs à la maison et donc utile à partir du CM1.
En conclusion, Marie-France Le Heuzey rappelle que l'affection se rencontre dans tous les milieux. Son origine développementale innocente les facteurs familiaux, qui, en revanche, jouent un rôle dans le pronostic de l'affection par leur place dans l'accompagnement parental.
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