RÉPARER le cerveau. Longtemps cet objectif a paru inimaginable. Jusqu'à la mise en évidence de molécules capables de favoriser la repousse de neurones lésés et la mise au point de techniques qui permettent de visualiser l'évolution des lésions neuronales à la suite d'un traumatisme. «Les progrès sont tels qu'ils permettent d'envisager de soigner ce qui paraissait irrémédiablement détruit», explique la FRM. Le domaine est aujourd'hui en plein essor, en particulier les travaux sur les interfaces cerveau-machine. Ils visent à placer des neuroprothèses au sein d'une boucle de régulation neuronale, entre un signal (transmission de la perception visuelle, intention de mouvement) et le traitement du signal (identification de l'objet visualisé, réalisation du mouvement) lorsque celle-ci a été interrompue.
Les dispositifs mis au point après l'analyse du codage neuronal permettent de suppléer à la fonction sensorielle ou motrice déficiente. Des prothèses sensorielles comme la rétine artificielle sont aujourd'hui proposées à un nombre croissant de patients. En revanche, les prothèses motrices restent exceptionnelles. Des progrès sont très attendus dans ce secteur longtemps négligé. Les techniques pourraient bénéficier aux traumatisés crâniens et médullaires, aux victimes d'accidents vasculaires cérébraux, en particulier aux patients atteints de locked-in syndrome, de maladies neurodégénératives (sclérose latérale amyotrophique ou dégénérescence rétinienne), d'anomalies du fonctionnement cérébral (épilepsie résistante).
Malgré des équipes de talent, comme celle du Pr Alim Benabid, pionnier dans le traitement de la maladie de Parkinson par la stimulation intracérébrale des noyaux gris centraux, la recherche demeure encore insuffisante en France. Face à ce constat, la FRM a décidé d'impulser un nouvel élan en direction des plus jeunes. En mai dernier, elle lançait, avec le soutien de l'IRME (Institut de recherche sur la moelle épinière) et l'ICM (Institut du cerveau et de la moelle), un appel d'offres inédit doté de 1 million d'euros dont l'objectif est de financer pendant deux ans la formation de jeunes chercheurs dans ce domaine.
Les projets ont été évalués par des experts internationaux puis sélectionnés par les huit spécialistes français du comité de pilotage. Les huit projets retenus portent sur divers aspects de l'interface cerveau-machine.
Parmi les trois projets concernant le domaine sensoriel, celui du Dr Olivier David concerne le traitement de l'épilepsie par neurostimulation adaptative. Il bénéficiera de 60 000 euros sur deux ans. L'objectif est de mettre au point des implants neuronaux composés de circuits électroniques pour le contrôle de certains types d'épilepsie par neurostimulation. Cette nouvelle voie thérapeutique est porteuse d'espoir pour les patients atteints d'épilepsie résistante aux médicaments et à la chirurgie, ce qui représente 10 % des 500 000 épileptiques.
Le projet du Dr Serge Picaud sur les rétines artificielles sera, lui, financé à hauteur de 110 000 euros. Il consiste à développer une nouvelle génération de prothèses rétiniennes contenant 600 pixels, contre seize pour celles actuellement utilisées, pour permettre la lecture ou la locomotion autonome.
Enfin, parmi les trois projets d'interfaces motrices, celui du Dr Marc Maïer, doté de 60 000 euros sur deux ans également, tentera de mettre au point un doigt artificiel. Aujourd'hui, ce type de dispositifs est développé essentiellement chez le singe (interface invasive avec implantation par chirurgie du dispositif) uniquement pour le bras. Le contrôle de la main et des doigts par une telle interface n'a pas été montré à ce jour. Le chercheur utilisera un doigt humanoïde, robotique, activé par des muscles artificiels pneumatiques, arrangés en paires agonistes comme dans la main humaine. Les signaux intracérébraux obtenus chez le singe seront utilisés pour commander le doigt artificiel et répliquer les mouvements du doigt du singe. L'objectif est de généraliser le contrôle à plusieurs doigts pour atteindre une dextérité plus importante autorisant la manipulation d'objets.
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