Financement

Hôpitaux recherchent liquidités désespérément

Publié le 13/07/2012
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Un milliard d’euros. Ce serait au bas mot la somme de liquidités bancaires qui manquera cette année aux établissements hospitaliers publics. Des solutions alternatives sont donc activement recherchées. Un dossier qui est l’objet de toutes les attentions.

Il est bien sûr difficile d’avancer un chiffre exact pour évaluer le montant de la manne qui, cette année, fera défaut aux hôpitaux suite aux réticences du secteur bancaire à franchir le pas. Il semble néanmoins acquis qu’il dépasse le milliard d’euros, investissement et fonctionnement inclus. Le démantèlement, en 2011, de leur principal bailleur de fonds, Dexia, a créé un vide difficile à combler.

En attendant la relève de Dexia…

C’est pourquoi il est question qu’une banque spécialisée dans ce domaine, fruit d’un rapprochement ponctuel de la Banque postale et de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), voie le jour d’ici à la fin de l’année et prenne la relève. Mais dans la mesure où il n’est pas envisageable que La Poste puise dans le réservoir que constituent les livrets A, la capacité du futur organisme prêteur ne sera guère extensible. De surcroît, si le projet est toujours dans les cartons, il tarde à prendre forme. D’autant que, parallèlement, la Banque postale serait en train de se positionner sur ce marché et de développer de son côté ses propres offres… En attendant, la CDC devrait, en 2012, décaisser 5 milliards d’euros à l’intention des collectivités locales dont environ 20 % échoiraient aux hôpitaux.

Il faut dire que ces derniers sont des clients bien particuliers et très modérément attractifs. Pour résumer, ils ne sont que preneurs et pas donneurs dans la mesure où la loi leur interdit d’ouvrir des comptes pour y placer leurs épargnes. C’est en effet le Trésor qui est le récipiendaire de leurs dépôts. Les banques, qui aimeraient un assouplissement de la réglementation en vigueur, n’ont donc qu’un intérêt relatif à subvenir à leurs besoins d’autant que les sommes prêtées le sont toujours pour de longues durées.

Trouver des filières alternatives

À la décharge de ces dernières, leur capacité à répondre favorablement aux demandes sonnantes et trébuchantes du monde médical est fortement bridée par un dispositif d’encadrement bancaire international extrêmement rigoureux communément appelé Bâle 3. Un arsenal qui impose des ratios liquidités/sommes prêtées très stricts afin de s’assurer qu’elles auront bien les fonds propres et la solvabilité requis pour parer les effets d’une éventuelle crise. « Le financement à très long terme est devenu très complexe d’autant que nous devons préserver notre équilibre économique », confirme-t-on à la Caisse d’Épargne, devenue de facto au lendemain du fiasco Dexia, leader du secteur avec 24 % du stock de la dette globale des établissements publics hospitaliers. Pas étonnant donc, dans ces conditions, que la tendance actuelle soit à une hausse des taux d’intérêts, passés en l’espace d’une bonne année de 3 % à parfois 5,5 %, et à un raccourcissement des délais de remboursement, 15 ans plutôt que 30.

Les établissements de santé tentent logiquement de trouver des filières alternatives. Certains contractent des prêts auprès de banques étrangères en particulier allemandes ou, comme à Marseille, Lyon et Grenoble, émettent des emprunts obligataires. Une technique payante dans la mesure où les agences de notation telles Moody’s sont enclines à délivrer des triples A quand elles sont missionnées pour évaluer ces dossiers.

Explorer des pistes novatrices

Du côté de la Fédération hospitalière de France (FHF), on suggère des idées novatrices, certes pas toujours politiquement correctes. En l’occurrence, gager les emprunts des hôpitaux sur les créances de l’assurance maladie, mutualiser au moins une partie de la trésorerie de l’ensemble des établissements publics hospitaliers pour faciliter la réalisation de chantiers, autoriser le placement en banque de liquidités ainsi que l’émission de billets de trésorerie ou encore se joindre à la Sécurité sociale pour profiter des taux d’intérêts extrêmement bas dont elle bénéficie lorsqu’elle lève des fonds sur les marchés internationaux. Autant de pistes qu’il faudra bien finir par explorer.

Alexandre Terrini

Source : Décision Santé: 286