Attendue depuis deux ans, la publication au « Journal officiel » de l'arrêté « relatif à l'organisation et à l'indemnisation des services de garde, à la mise en place du repos de sécurité dans les établissements publics de santé autres que les hôpitaux locaux » est imminente.
En vertu du texte qu'a déjà signé le ministre délégué à la Santé Bernard Kouchner, les médecins hospitaliers vont pouvoir observer à partir du 1er octobre 2003 - avant, à titre dérogatoire, là où c'est possible - un repos de sécurité d'une durée de 11 heures après chaque garde de nuit effectuée sur place. Dans le détail, ces 11 heures s'apparenteront : pour les activités de service continu (réanimation, obstétrique, anesthésie, urgence) à une « interruption totale de toute activité » ; à une « interruption de toute activité clinique en contact avec le patient » pour les autres activités.
Aider les petits hôpitaux
Ce dispositif n'entrera en vigueur que dans deux an, pour la bonne raison que les hôpitaux, et en particulier les plus petits d'entre eux, n'ont pas pour l'instant les moyens humains de s'y plier. Afin de les aider à y parvenir, l'arrêté prévoit, entre autres, au chapitre de la réorganisation de la garde, de mettre leurs équipes concernées en commun. A l'initiative des hôpitaux ou à la demande des agences régionales de l'hospitalisation (ARH), « les secteurs de garde peuvent regrouper des établissements publics de santé distincts mais voisins », précise la nouvelle réglementation. Elle affirme noir sur blanc qu' « aucun praticien ne peut se soustraire à ses obligations de gardes », tout en précisant qu' « en cas de nécessité » un médecin peut se faire remplacer par un autre « avec l'accord écrit de son remplaçant ».
Très strictement encadrée, la participation à la garde de chaque médecin ne peut pas dépasser une nuit par semaine sous forme de permanence à l'hôpital, trois nuits par semaine sous forme d'astreinte à domicile, un dimanche ou jour férié par mois sous forme de permanence à l'hôpital, deux dimanches ou jours fériés par mois sous forme d'astreinte à domicile (dans des circonstances exceptionnelles comme les périodes de congés annuels, ces normes peuvent être assouplies, par le biais d'un cumul sur plusieurs mois). Seuls les praticiens volontaires et dans des « limites compatibles avec la bonne exécution de (leur) service de jour » peuvent sortir de ce cadre. Et c'est seulement quand les effectifs sont insuffisants que les services font appel aux attachés volontaires.
Participer au service de garde donne lieu, sauf quand la garde a été suivie d'un repos de sécurité, soit à une récupération, soit à une indemnisation forfaitaire valable pour tous les praticiens. Une garde vaut une journée de récupération ou 233,09 euros (1 529 F), deux demi-gardes (payées chacune 116,62 euros - 765 F), tout comme deux astreintes opérationnelles (35,83 euros chacune - 235 F) donnent lieu à une demi-journée de récupération. Cinq astreintes de sécurité (23,48 euros chacune - 154 F) valent une demi-journée de récupération.
Les syndicats réservés
Inscrit dans le statut des praticiens hospitaliers (PH) depuis l'été 1999, le repos de sécurité attend depuis cette date la publication de son texte d'application. Aujourd'hui que c'est quasiment chose faite, les syndicats font un accueil mitigé au dispositif retenu par le gouvernement. Deux registres de critiques. Et d'abord celles qui ont trait à la méthode : le temps passant, la mise en place du repos de sécurité et le passage programmé des médecins hospitaliers aux 35 heures ont fini par se télescoper. Les cartes sont encore brouillées par l'arrêt rendu le 3 octobre 2000 par la Cour européenne de justice, qui considère les gardes comme du temps de travail effectif. Le repos de sécurité, tel qu'il va être défini au « J. O. », est donc déjà bancal et devra être revu à court terme.
Le Dr Michel Vignier, président du SNMARHNU (Syndicat national des médecins anesthésistes réanimateurs des hôpitaux non universitaires) juge ainsi que le texte du gouvernement est « obsolète ». Il se prononce toutefois « pour » sa publication, parce qu'elle va « permettre aux praticiens qui appliquent déjà le repos de sécurité ou qui veulent l'appliquer de le faire dans la légalité ». Le Dr François Aubart, qui préside la CMH (Coordination médicale hospitalière), fait la même analyse en saluant « un texte pragmatique » résultat d'un « bon compromis ».
D'autres syndicats sont plus sévères, y compris sur le fond du futur système. Le grand reproche qu'ils font aux pouvoirs publics est de ne pas avoir rendu obligatoire le repos de sécurité. Le président de la CHG (Confédération des hôpitaux généraux), le Dr Pierre Faraggi, déplore que, « afin d'assurer la permanence médicale ou dans certaines configurations de l'organisation des soins, beaucoup de dérogations soient possibles ».
De son côté, le Dr Patrick Dassier, qui préside le SNPHAR (Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs), s'indigne : « Le repos de sécurité n'est pas une obligation organisationnelle des établissements. Pour l'obtenir, les médecins devront demander l'autorisation. » Le Dr Dassier prévient que, si ce texte paraît au « J. O. », il fera un recours devant les juridictions française et européenne.
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