Plusieurs syndicats de médecins s'étaient alarmés de la situation avant l'été. Afin d'éviter la saturation de certains services, les agences régionales d'hospitalisation (ARH), sur demande du ministre de la Santé, Jean-François Mattei, ont fait le point sur les disponibilités en lits dans les hôpitaux publics et privés.
Le résultat, conforme aux prévisions, est comparable à celui de l'été 2001 : environ 15 % des lits sont actuellement fermés. Leur réouverture pourrait toutefois être plus tardive que l'an dernier, a annoncé le ministère de la Santé. L'expérience aurait permis une « amélioration très significative de la coordination des acteurs concernés ». « Les urgences hospitalières parviennent à faire face à un flux important de patients », indique encore le ministère, qui cite tout de même les difficultés rencontrées par les SAMU à trouver des lits d'accueil en réanimation et en psychiatrie.
L'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) dresse un bilan similaire sur la période estivale. Malgré des « flux d'accueil aux urgences tendus », la situation est « globalement plus calme et moins difficile que l'année dernière, grâce à une meilleure organisation des lits d'aval (...) qui permettent d'accueillir les personnes âgées ». Une amélioration dont n'ont cependant nullement profité les milliers de Franciliennes en attente d'une IVG. Comme chaque été, obtenir un rendez-vous relève de la mission quasi impossible. Une enquête téléphonique menée par le journal « le Parisien » indique que seule une poignée d'établissements propose une consultation dans la foulée. Ailleurs, il faut patienter, parfois plusieurs semaines. Faute de place, des femmes ont dû partir avorter à l'étranger. Pour le reste de la population francilienne, l'absence de canicule et de pics de pollution, en évitant déshydratations et problèmes respiratoires, explique en partie l'amélioration de l'accueil hospitalier par rapport à l'été 2001. Ainsi, « toutes les urgences vitales ont été assurées », affirme l'AP-HP.
Une situation « épouvantable »
Pour contester cette version qui lui semble inacceptable, le président de l'association des médecins urgentistes hospitaliers de France (AMUHF), le Dr Patrick Pelloux, s'est expliqué au cours d'une conférence de presse au mileiu du mois d'août. Selon lui, la situation des services d'urgences est « absolument épouvantable ». En Ile-de-France, « entre un tiers et deux tiers des lits sont fermés », estime-t-il. Outre les urgences, les services de spécialité sont également malmenés pendant l'été, certains, fait nouveau, ayant complètement fermé. A Paris, c'est notamment le cas des services de réanimation, de neurologie et de rhumatologie.
En région, l'urgentiste dénonce des « problèmes majorés » en Midi-Pyrénées, avec « à Tarbes, en moyenne 30 malades sur des brancards », des problèmes de « recrutement d'urgentistes en Corse, des fermetures de lits en chirurgie à Saint-Brieuc, alors qu'il y a des flux de vacanciers ».
Au SAMU du Nord, le travail est « excessivement dur et pénible » cet été, les urgentistes travaillent 68 heures par semaine, selon son responsable le Dr Patrick Goldstein, qui explique cette situation par la totale absence de permanence libérale dans certains secteurs de la région. A l'hôpital Nord de Marseille, les urgences ont quant à elles carrément « disjoncté » faute de personnel. Du 8 au 15 août, face à l'impossibilité de répondre à la demande, la direction a décidé exceptionnellement de renvoyer tous les malades acheminés par les pompiers, soit la moitié des patients accueillis chaque jour. Le recrutement d'intérimaires a permis un retour progressif à la normale.
Les problèmes de sécurité
Selon le Dr Pelloux, la RTT n'est pas la cause de ces problèmes puisque les urgences ont déjà vécu cette situation de crise l'an dernier, alors que la RTT n'était pas en vigueur.
Ce qui est nouveau en revanche, c'est la recrudescence des actes de violence à l'hôpital, contre lesquels les urgentistes réclament des mesures de protection, Dr Pelloux en tête. Après une blessure par balle en mai à Toulon, une fusillade à Nice en juillet ou des incidents à Vannes en août, c'est au tour des urgences de l'hôpital de Bry-sur-Marne d'être le théâtre d'un nouveau coup de feu. Qui, fort heureusement, n'a fait aucun blessé. La veille, le 20 août, le Dr Pelloux a rencontré le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy. L'installation de boxs sécurisés et de dispositifs de communication immédiate avec la police a notamment été évoquée. Un groupe de travail interministériel sur les violences à l'hôpital doit démarrer ses travaux en septembre.
Les directeurs des CHU réclament 6 milliards d'euros
Conséquence des restrictions budgétaires, le déficit avoisine les 300 millions d'euros pour les CHU et 1,5 milliard d'euros pour l'ensemble des hôpitaux généraux en 2002.
Face à cette « impasse » budgétaire, Daniel Moinard, président de la conférence des directeurs de CHU, tire la sonnette d'alarme dans un entretien avec le quotidien économique « les Echos » (23-24 août).
En comparaison, la rallonge de 700 millions d'euros promise par Jean-François Mattei au début de juillet semble bien maigre. Car, pour résorber leur déficit et préparer l'avenir, les hôpitaux auraient besoin d'une enveloppe de quelque 6 milliards d'euros, d'après la conférence des directeurs de CHU. Les investissements immobiliers, notamment, devraient presque tripler par rapport aux cinq dernières années, selon leur enquête.
Confirmant l'engagement de campagne du candidat Chirac, le ministre de la Santé a annoncé le mois dernier son intention de mettre en uvre un plan quinquennal d'investissement hospitalier d'un montant de 6 milliards d'euros. Ce qu'avait déjà dit le Premier ministre devant les députés lors de son discours de politique générale.
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