DISPARU à l'âge de 33 ans, le pianiste roumain Dinu Lipatti était à la musique ce que le poète est à l'écriture. Miraculeusement, tout ce qu'il a gravé, peu de choses en regard de l'immense répertoire pianistique, a demeuré et a été publié par son unique éditeur Columbia. Après avoir, dans sa collection « Références », rendu ces précieuses gravures, EMI réunit « tout » Lipatti en un coffret de sept CD, un testament sans prix. Et André Tubeuf consacre un roman, « la Quatorzième Valse », à ce pianiste légendaire.
Il y a certainement un nombre infini de façons de jouer les valses de Chopin. Pourquoi, pour ces oeuvres qui ne sont certainement pas les plus spectaculaires du compositeur, fait-on toujours référence, revient-on toujours à Dinu Lipatti ? Peut-être parce qu'on les a découvertes sous ses doigts, sans aucun effet virtuose, parées de sonorités chantantes et dansantes. D'autres pianistes procurent des frissons, même des vertiges d'autre nature, mais Lipatti, on y revient.
On trouvera dans ce coffret les Valses enregistrées en studio à Genève en juillet 1950, et celles du dernier concert, en septembre de la même année à Besançon, trois mois avant sa mort, moins la quatorzième, qu'il n'eut pas la force de jouer.
Tous les concertos, à son répertoire, dont deux avec Karajan, la fameuse première « Partita » de Bach (deux fois aussi pour les mêmes raisons), des bribes de Chopin (une mazurka opus 50/3, miraculeuse de chant et de diction), de Schubert, de Ravel, de Scarlatti, de Brahms, une sonate de son maître Enescu, c'est peu, mais il faudra s'en contenter pour l'éternité.
Avec « la Quatorzième Valse », André Tubeuf se glisse dans la peau du pianiste et raconte, avec suffisamment de précisions pour que l'on sache de qui il s'agit mais assez de distance pour que l'on soit dans le romanesque, sa dernière année. Se sachant atteint mais porteur d'un message de paix, joie et bonheur, le musicien prend petit à petit de la distance avec les choses matérielles, se consacrant à ses derniers enregistrements, à ses fidèles proches et gardant ses dernières forces pour le concert de Besançon, qu'il mène à son terme, à une valse de Chopin près, grâce à d'ultimes réserves de foi et de grâce. Une dernière ligne droite admirable d'honnêteté et de franchise devant la mort qui approche. Un formidable éclairage d'une personnalité forte qui passe au travers des épreuves du dépouillement pour arriver à l'essentiel.
1 coffret cartonné de 7 CD EMI Classics. Livre publié par Actes Sud, 160 pages, 21 euros.
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