« Hollande et Sarkozy doivent parler plus sérieusement des drogues » (Dr Alain Rigaud, président de l’ANPAA)

Publié le 23/04/2012
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Crédit photo : dr

« Durant la campagne, seul monsieur Hollande s’est prononcé d’une manière plus ouverte sur la thématique des addictions. Il a évoqué la révision de la de 1970 (qui réprime l’usage et le trafic de stupéfiants) dont on sait tous qu’elle est obsolète et s’est déclaré intéressé sur l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque. Il y a eu des ouvertures avec lui que nous n’avons pas retrouvées chez son adversaire au second tour. Ces points sont importants car l’enjeu en matière d’addictologie et de lutte contre les addictions, c’est de promouvoir une politique de réduction des risques et des dommages, une politique de prévention. Et pouvoir réviser la loi de 1970 est primordial car on sait bien que tant que la répression est au rendez-vous vis-à-vis des usagers de drogues, cela les pousse à une clandestinité plutôt qu’à demander des soins. Par ailleurs, aucun des deux candidats en tête n’a pris la peine de nous répondre, ni à notre association ni à d’autres associations partenaires. Pour l’entre-deux-tours, nous attendons qu’ils abordent les questions liées aux drogues et addictions de manière plus sérieuse. L’ANPAA est bien consciente que dans le prochain quinquennat, la réduction des dépenses publiques est inéluctable. Mais il ne faut pas se tromper d’objectif. En matière de prévention, réduire les crédits qui sont déjà faibles, c’est payer demain des charges de soins. On attend donc que la prévention soit renforcée et qu’il y ait des mesures très efficientes mises en place et qui ne coûtent rien à l’État dans le domaine de la lutte contre l’alcoolisme, avec un message sur les effets délétères de l’alcool pas seulement au niveau de l’abus. Nous appelons aussi à revenir aux fondamentaux de la loi Evin en interdisant l’affichage de publicité sur l’alcool comme cela était prévu à l’origine. Concernant les drogues illicites, il faut un vrai débat de société sur cette question de manière à renforcer la prévention et les soins pour que les gens ne tombent pas malades et aient des complications de leur conduite addictive. Dans son programme, Nicolas Sarkozy a bien annoncé le lancement d’un programme de lutte contre les addictions chez les jeunes mais cela reste imprécis. Et c’est tout de même sous son quinquennat que la publicité pour les boissons alcoolisées sur Internet a été autorisée dans le cadre de la loi HPST. C’est sous son quinquennat que l’on a vu exploser les conduites de binge drinking parallèlement à un léger tassement des conduites de consommation du cannabis. On ne peut tirer avec certitude des relations de cause à effet, mais l’on sait que le développement des conduites addictives chez les jeunes est tout de même directement lié à la perception qu’ils ont de l’avenir et à l’insécurité psychique qu’un avenir incertain induit. »

 


Source : Le Quotidien du Médecin: 20120422