La Conférence de consensus organisée par la Société française de dermatologie et l'ANAES a eu pour objectif de faire le point sur les données disponibles et de fournir des recommandations pour la « prise en charge de l'herpès cutanéo-muqueux ». Celles-ci se limitent aux manifestations chez le sujet immunocompétent, en excluant la méningo-encéphalite et les manifestations oculaires.
Les recommandations se sont organisées autour de cinq points : l'histoire naturelle de l'infection, les particularités cliniques et évolutives de certaines localisations, les moyens diagnostiques, les modalités des traitements locaux et généraux, les perspectives en diagnostic, traitement et prévention.
La maladie est fréquente : on estime à 10 millions le nombre de personnes atteintes en France (80 % par le virus HSV1, 20 % par le HSV2). L'herpès génital augmente régulièrement. C'est la première maladie sexuellement transmissible des pays industrialisés. Son épidémiologie change : le HSV1, classiquement décrit comme responsable de l'herpès oro-facial, est de plus en plus souvent retrouvé dans les infections génitales. Ces infections génitales par HSV1 ou 2 facilitent l'infection par le VIH et en constituent un facteur de risque. Une sérologie VIH doit donc être systématiquement proposée en cas d'herpès génital.
Excrétion virale asymptomatique
Parmi les modes de transmission de la maladie, essentiellement par contact (l'homme étant le seul réservoir du virus), l'excrétion virale asymptomatique pose des problèmes de prévention. En effet, elle remet en cause l'efficacité du préservatif préconisé lorsqu'il existe des lésions. Les femmes sont le plus concernées par cette excrétion intermittente, mais régulière, qui se produit alors qu'elles n'ont pas de lésions. Chez l'homme, cette excrétion asymptomatique existe mais reste difficile à mettre en évidence.
La maladie est souvent bénigne mais retentit considérablement sur la qualité de vie des patients, particulièrement l'herpès génital, car ses récurrences sont fréquentes (4 ou 5 poussées par an).
Certaines formes cliniques doivent attirer l'attention des médecins. En particulier, l'herpès de la main appelé « panaris herpétique », souvent diagnostiqué à tort comme un panaris et traité chirurgicalement. L' herpes gladiotorum, décrit d'abord chez les lutteurs et qui touche d'autres sports de contact comme le rugby. Cette forme cutanée est diffuse et les signes généraux sont importants. On peut également signaler que le moment de la primo-infection par le HSV1 se fait de plus en plus tard et ces formes retardées sont souvent plus graves.
Parmi les formes génitales, l'herpès néonatal est peu fréquent (20 cas par an), mais de mauvais pronostic, il peut entraîner des décès ou des séquelles importantes, surtout dans sa forme neurologique et systémique. Il est transmis de la mère à l'enfant, in utero au cours d'une virémie en cas de primo-infection, ou à l'accouchement, par contact direct ou en dehors de tout antécédent d'herpès maternel (les deux tiers des cas) par une excrétion virale asymptomatique. Mais la transmission peut se faire dans la période postnatale par un membre de l'entourage de l'enfant ou de l'équipe soignante. L'hépatite herpétique est une particularité de la grossesse et survient lors d'une primo-infection herpétique au troisième trimestre de grossesse. Elle se présente comme une hépatite aiguë fébrile anictérique de mauvais pronostic maternel et fœtal. Exceptionnelle, son diagnostic et son traitement sont urgents.
La sérologie n'est pas utile
Les moyens diagnostiques de l'infection doivent reposer essentiellement sur la recherche des antigènes par immunofluorescence et la méthode ELISA qui peuvent être facilement pratiquées. La culture virale est la technique la plus spécifique et doit être pratiquée chaque fois qu'il existe un doute, mais, moins rapide, elle nécessite des moyens techniques plus importants (équipement pour la culture cellulaire).
Contrairement à la pratique commune, la sérologie n'a aucune utilité en cas de lésions herpétiques, ni en cas de primo-infection, ni en cas de récurrences.
Le traitement des primo-infections repose sur les antiviraux. Dans l'herpès oro-facial (aciclovir per os 200 mg, 5 fois par jour pendant 10 jours) ; dans l'herpès génital (aciclovir ou valaciclovir per os). Le jury ne propose un traitement curatif dans les récurrences qu'en cas de gêne importante et de risque de contagion (aciclovir ou valaciclovir). Un traitement préventif est proposé en cas de récidives fréquentes (6 par an) par aciclovir 400 mg, 2 fois/j ou valaciclovir 500 mg/j. La conférence de consensus conclut à l'absence de démonstration de l'efficacité des traitements locaux.
Enfin, concernant l'indication de césarienne, le jury recommande de la pratiquer en cas de lésions au moment du travail, si la primo-infection date de moins d'un mois sans notion de traitement ou si la récurrence date de moins de sept jours.
Conférence de presse, en présence des Drs Jacques Orvain (ANAES) et Patrice Dosquet (ANAES), des Prs Philippe Saiag (dermatologue, Boulogne) et Gérard Lorette (dermatologue, Paris).
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