Hépatite B : le premier pas, chez la souris, vers un vaccin oral par la pomme de terre

Publié le 10/09/2001
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U NE quinzaine d'années après l'apparition du vaccin recombinant anti-VHB, il est manifeste que la vaccination dans le tiers-monde reste loin de ce qu'elle est dans les pays industrialisés. La raison principale est sans doute le coût du vaccin, qui reste inabordable dans bien des régions, malgré les efforts de l'OMS et de diverses associations caritatives. Les auteurs de l'article des « Proceedings » notent ainsi que le prix d'achat d'une dose dépasse le revenu quotidien de plus d'un milliard d'hommes.

Depuis quelques années déjà, des plantes génétiquement modifiées, produisant un antigène, sont envisagées comme vaccin oral. Outre le coût réduit par rapport à l'antigène produit dans des cellules transgéniques, ces plantes présentent l'avantage de pouvoir être cultivées localement, dans des pays dépourvus d'infrastructure - cela, naturellement, à condition d'être certain que ces plantes ne posent et ne poseront aucun problème, car ce ne sont certainement pas les pays démunis qui pourraient y faire face.

Des souris nourries avec des cubes de pomme de terre crue

Un plant de tabac produisant un antigène HBs, capable d'immuniser des souris par voie parentérale, avait déjà été obtenu. Et c'est la même équipe, désireuse d'explorer les possibilités d'immunisation par voie orale, qui récidive avec la pomme de terre.
L'OGM a été testé chez des souris, nourries à trois reprises, à une semaine d'intervalle, par 5 g de pomme de terre, donnée crue, soit trois fois 42 microg d'antigène, environ. Les cubes de pomme de terre étaient, en outre, recouverts d'une solution de toxine cholérique, représentant environ 10 microg d'adjuvant.
Des anticorps anti-HBs ont pu être détectés une semaine après les deux premières doses, pour atteindre 103 mUI/ml quatre semaines après la troisième dose. Une injection parentérale de rappel, pratiquée avec l'antigène recombinant, obtenu dans des levures, a alors été administrée. Trois semaines plus tard, un pic d'anticorps était mesuré à 3 300 mUI/ml. Et cinq mois plus tard, le taux était encore de 700 mUI/ml. A titre de comparaison, le taux d'anticorps est considéré comme protecteur chez l'homme après vaccination, lorsqu'il dépasse 10 mUI/ml. Il est toutefois évident que le taux chez la souris ne peut être extrapolé en termes de protection chez l'homme.
Les auteurs soulignent deux aspects supplémentaires.

Une tomate et une banane sont annoncées

Premièrement, la cuisson préalable de la pomme de terre réduit considérablement son pouvoir immunogène - sans toutefois l'annuler. Une tomate et une banane portant également un transgène codant l'antigène HBs sont toutefois annoncées.
Deuxièmement, les résultats obtenus avec la pomme de terre sont supérieurs, en termes d'immunogénicité, aux résultats obtenus avec l'antigène HBs produit par des levures recombinantes et administré par voie orale à une dose pourtant supérieure (deux fois 150 microg, associés à 10 microg de toxine cholérique).
Les auteurs attribuent l'écart d'immunogénicité entre l'administration directe de l'antigène ou via la pomme de terre à un effet de « microencapsulation ». L'antigène produit dans la pomme de terre reste en effet dans la cellule, sous forme d'agrégats visibles en microscopie électronique. La majorité des cellules n'étant pas détruite par la mastication, mais par les enzymes digestives, l'antigène est libéré in situ, très progressivement, sans subir de dégradation préalable. C'est ce qui expliquerait son immunogénicité renforcée. On note toutefois que cette interprétation, si elle suggère un intérêt particulier des OGM pour la vaccination, soulève, en outre, une grave question pour les OGM en général, destinés à l'alimentation animale ou humaine, qui produisent une protéine dans des conditions qui favoriseraient une immunogénicité maximale après ingestion.

Q. Kong et coll. « Proc Natl Acad Sci USA ».

Vincent BARGOIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6964