Pronostic vital
1) Le pronostic vital est en jeu
Chez le malade cirrhotique, la mortalité par rupture de VO est d’environ 40 %.
Prise en charge
2) Prise en charge générale
2.1) La gravité de l’hémorragie s’apprécie principalement sur les paramètres suivants :
2.1.1) Signes cliniques : tension artérielle, pouls (en se rappelant qu’il peut être ralenti par un traitement bêtabloquant donné pour traiter l’hypertension portale [HTP]), pâleur, agitation, soif.
2.1.2) Diminution de l’hématocrite (mais elle est retardée).
2.2) L’hypovolémie expose à l’insuffisance rénale et à l’infection (de 25 à 50 % des cas).
2.2.1) Il faut mettre en place un abord veineux de fort calibre et perfuser si besoin des solutés macromoléculaires.
2.2.2) Un remplissage trop important favorise la récidive de l’hémorragie.
2.2.3) La transfusion de culots globulaires vise à maintenir un hématocrite entre 25 et 30 %.
2.3) Traitement ou prévention des complications de la cirrhose, par les mesures suivantes :
2.3.1) Antibiothérapie prophylactique (en général par norfloxacine [400 mg x 2/j x 7 j]).
2.3.2) Lactulose ou lactitol en cas d’encéphalopathie hépatique.
Vasoactifs
3) Traitements vasoactifs
3.1) La Glypressine est un analogue de la vasopressine.
3.1.1) La Glypressine permet un contrôle de l’hémorragie dans environ 80 % des cas (elle a été montrée plus efficace qu’un placebo).
3.1.2) La Glypressine diminue la mortalité par rupture de VO.
3.1.3) Les contre-indications à l’emploi de la vasopressine sont les suivantes :
– insuffisance coronaire ;
– hypertension artérielle ;
– troubles du rythme ;
– âge > 70 ans ;
– insuffisance rénale ou respiratoire ;
– choc septique,
– grossesse.
3.2) Somatostatine et dérivés synthétiques.
3.2.1) La somatostatine a été montrée supérieure à la vasopressine pour l’efficacité et les effets secondaires.
3.2.2) L’octréotide est un dérivé synthétique de la somatostatine de demi-vie plus longue (environ 90 mn) qui semble également efficace.
3.2.3) L’octréotide peut être associé de manière utile à l’endoscopie.
Endoscopie
4) Traitements endoscopiques
Ils sont de trois types : sclérose, ligature et oblitération.
4.1) Sclérose endoscopique.
4.1.1) L’injection de produit sclérosant agit par thrombose de la varice et/ou par compression de celle-ci. Elle aboutit ensuite à une fibrose.
4.1.2) On commence les injections au niveau du cardia, et on remonte sur les cinq derniers centimètres de l’oesophage (de 1 à 5 cc/site et pas plus de 20 cc/séance).
4.1.3) La sclérose des VO expose à des complications qui sont indiquées dans l’encadré. Parmi ces complications, les ulcérations muqueuses au niveau du site d’injection sont fréquentes (de 70 à 80 % des cas). Elles se compliquent dans environ 20 % des cas d’hémorragies, qui sont habituellement modérées.
4.2) Ligature élastique des VO (LVO).
4.2.1) La technique de LVO se rapproche de celle de la ligature des varices hémorroïdaires.
4.2.2) Par rapport à la sclérose, la LVO :
– est au moins aussi efficace ;
– expose à moins de complications ;
– mais elle n’est pas toujours de réalisation facile en période hémorragique.
4.3) Oblitération des varices.
4.3.1) C’est l’injection d’une « colle » (Histoacryl) dans la varice.
4.3.2) Le risque principal est… l’obturation du canal opérateur de l’endoscope !
4.3.3) Cette technique est en général réservée aux varices gastriques.
Pratique
5) Conduite pratique: médicaments vasoactifs et endoscopie
En pratique, un traitement médicamenteux (soit la Glypressine, soit la somatostatine ou un dérivé) est commencé dès que possible. Un geste d’hémostase (ligature, si possible, ou, à défaut, sclérose) sera ensuite fait lors de l’endoscopie, surtout s’il y a persistance de l’hémorragie.
Tamponnement
6) Sondes de tamponnement
6.1) Deux sondes sont disponibles :
– sonde de Sengstaken-Blakemore (sonde à 2 ballonnets) pour les VO,
– sonde de Linton-Nachlas (sonde ne comportant qu’un ballonnet unique, gastrique) pour les varices cardio-tubérositaires ou fundiques.
6.2) Une hémostase initiale est obtenue dans 40 à 90 % des cas.
6.3) L’inconvénient majeur du tamponnement est la fréquence des complications (parfois létales) : pneumopathies d’inhalation, ulcères et ruptures d’oesophage.
6.4) Compte tenu des complications potentielles, cette méthode est réservée aux échecs des méthodes médicamenteuses et endoscopiques, en attente d’un traitement aux résultats plus durables.
Dérivations
7) Dérivations porto-systémiques
7.1) La chirurgie est efficace sur l’hypertension portale, mais elle n’augmente pas la survie du fait de sa propre morbidité et mortalité.
7.2) Que penser de l’anastomose porto-systémique par voie transjugulaire (Tips, [Transjugular Intrahepatic Portosystemic Shunt]) ?
7.2.1) C’est une méthode de « sauvetage » efficace. Le Tips a fait preuve d’efficacité (arrêt de l’hémorragie dans 90 à 100 % des cas) chez des malades dont le saignement n’avait pu être contrôlé, ni par les médicaments ni par l’endoscopie.
7.2.2) Les inconvénients principaux du Tips sont :
– un risque accru d’encéphalopathie ;
– la survenue d’une récidive tardive dans environ 20 % des cas. Cette récidive hémorragique est essentiellement en rapport avec une obturation de la prothèse, qui se voit dans près de 50 % des cas à un an.
Réponse
L’assertion 1) sur le pronostic est fausse. En effet, si la mortalité par rupture de VO était bien d’environ 40 % en 1980, elle n’était plus que de l’ordre de 15 % en 2000. Cela grâce, d’une part, aux progrès de la prise en charge générale de ces malades (dont l’antibiothérapie prophylactique en cas d’ascite) et, d’autre part, aux progrès des méthodes d’hémostase endoscopique.
Références
(1) Conférence de consensus. Complications de l’hypertension portale chez l’adulte. Paris, 3 et 4 décembre 2003. Texte court et texte long. « Gastroenterol Clin Biol », 2004 ; 28 : B318-8334.
(2) Vinel JP. Rupture de varices oesophagiennes. « Gastroenterol Clin Biol », 2006 ; 30 : 875-879.
Complications de la sclérose de VO
Mineures:
– fièvre*,
– douleurs rétrosternales,
– dysphagie transitoire,
– ulcérations muqueuses.
Majeures:
– perforation,
– médiastinite,
– fistule oeso-bronchique,
– sténose.
* Une bactériémie est assez fréquente, mais rarement source de complications.
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