ON FAIT à cette patiente un ECG qui montre des ondes Q en D2, D3 et aVF. La taux de CPK est à 736 U/l (normales : de 20 à 160 U/l), avec l'isoforme MB à 94,7 ng/ml (normales de 0,5 à 3,6 ng/ml). Le taux de troponine I est à 25,6 ng/ml (normale de 0 à 0,10 ng/ml).
L'échographie transthoracique montre un épanchement péricardique massif avec collapsus diastolique précoce du ventricule droit.
Drainage en urgence.
En raison de la détérioration hémodynamique de la patiente, on fait en urgence un drainage de l'espace péricardique, qui ramène 150 ml de liquide hémorragique. La patiente est alors rapidement conduite au bloc opératoire où on lui fait une échocardiographie transoesophagienne qui ne montre pas de signe de dissection aortique. Un diagnostic de rupture postinfarctus de la paroi ventriculaire libre est suspecté sur la base de données cliniques, des examens de laboratoire et de l'imagerie.
Une sternotomie médiane est réalisée et le péricarde est ouvert. Après l'évacuation de 600 ml de sang cailloté, on identifie un site de saignement au niveau de la coronaire droite, le saignement étant du à une perforation juste avant sa bifurcation.
De plus, quand on soulève la face diaphragmatique du cœur, on découvre un cure-dents en bois de 3,5 cm de long et l'on identifie le site de son passage à travers le diaphragme.
Après ligature de la coronaire droite, on réalise un pontage à l'aide d'un greffon saphène.
Après fermeture du thorax, on fait une laparotomie exploratrice ; on ne constate dans la cavité péritonéale ni inflammation ni contenu intestinal. De plus, on ne trouve pas de passage du corps étranger à travers la paroi gastrique.
Les suites postopératoires sont bonnes. La patiente reprend son travail au bout de deux mois.
D'où venait ce cure-dents ? La patiente se rappelle avoir, lors d'un barbecue le soir qui a précédé l'apparition de sa douleur thoracique, mangé des rouleaux de viande maintenus par des cure-dents.
Une étude conduite sur quatre années, publiée en 1984 dans le « Jama » (Budnick et coll.), a colligé 8 176 cas d'accidents liés aux cure-dents aux Etats-Unis - taux de 3,6 accidents par 100 000 personnes-années . D'autres travaux ont montré que 5 % de ces blessures impliquent des organes internes. D'autres encore que les cure-dents ingérés ont souvent été responsables de blessures gastro-intestinales ; dans un cas, le cure-dent a migré dans le péricarde, provoquant une péricardite constrictive. « Dans le cas de notre patiente, le cure-dents a migré dans le péricarde, probablement à travers la paroi gastrique, et le début des symptômes a mimé une rupture de la paroi du ventricule gauche postinfarctus », indiquent les auteurs.
Sandro Gelsomino et coll. « New England Journal of Medicine » du 26 mai 2005, p. 2249-2250.
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