«FACE À un infarctus sylvien malin, les options thérapeutiques restent très limitées et le pronostic chez les sujets jeunes est généralement considéré comme catastrophique. L'idée d'éviter les conséquences dramatiques de l'oedème sur les structures neurologiques périlésionnelles en effectuant une craniotomie de décharge a toujours été envisagée par les réanimateurs et les neurochirurgiens. Néanmoins, aucune étude randomisée n'avait été mise en place sur ce sujet et nombre de praticiens étaient sceptiques quant au devenir fonctionnel despatients», explique en préambule le Dr Katayoun Vahedi, praticien hospitalier dans le service de neurologie de l'hôpital Lariboisière à Paris. C'est dans ce contexte que des neurologues de différents établissements hospitaliers français ont mis en place une étude prospective thérapeutique multicentrique comparative afin de déterminer l'intérêt de ce geste chirurgical dans les vingt-quatre heures suivant l'installation de l'ischémie sur la mortalité et sur la survie sans handicap sévère par rapport à la prise en charge médicale standard habituelle chez les patients de moins de 55 ans atteints d'un infarctus cérébral oedémateux et compressif.
DECIMAL, DESTINY et HAMLET.
L'étude DECIMAL a été conduite en France dans treize centres investigateurs multidisciplinaires composés chacun d'une unité de soins intensifs neurovasculaires, d'un service de neurochirurgie, d'un service de réanimation et d'un service de neuroradiologie. Le premier patient a été inclus en décembre 2001. Au total, 38 patients ont été randomisés jusqu'en novembre 2005, date à laquelle le conseil scientifique indépendant a conseillé de regrouper les données de l'étude DECIMAL avec deux essais similaires : DESTINY conduit en Allemagne et HAMLET aux Pays-Bas. Le but de l'analyse poolée était de répondre de façon plus rapide et avec un minimum de patients à l'objectif principal de l'étude.
Cette analyse a inclus un total de 93 patients : 42 traités par prise en charge médicale exclusive et 51 opérés. «L'hémicraniotomie décompressive précoce permet de réduire de plus de 50% la mortalité des malades (survie à un an de 78% contre 29%). Douze mois après l'accident, près de la moitié des patients opérés étaient atteints d'un handicap modéré nécessitant une aide partielle avec possibilité de marche autonome sans aide, contre 21% dans le groupe traitement médical. Au total, à un an, 75% des patients du groupe traitement chirurgical contre 24% du groupe traitement médical présentait un handicap modérément sévère avec une marche impossible sans assistance et une restriction notable de l'autonomie mais sans nécessité d'une aide permanente», analyse le Dr Vahedi. «Bien qu'extrêmement significatifs, ces résultats ne peuvent pas être appliqués de façon globale et le traitement doit être évalué au cas par cas. Dans ces études, les sujets inclus étaient jeunes, sans pathologie sévère associée et sans handicap préexistant. Pour pouvoir décider d'un traitement, le médecin doit prendre en compte l'environnement social et affectif, le souhait éventuel du patient, mais aussi celui de son entourage, car la récupération sans handicap n'est jamais envisageable compte tenu de la taille de l'infarctus. »
D'après une conférence de presse organisée par la Délégation interrégionale de la recherche clinique d'Ile-de-France avec la participation du Dr Katayoun Vahedi, hôpital Lariboisière, Paris.
Un grand tueur
L'occlusion d'une artère carotide interne ou de sa branche principale, l'artère sylvienne, entraîne un arrêt de la vascularisation des deux tiers de l'hémisphère cérébral. L'infarctus sylvien se complique dans les douze à soixante-douze heures d'un oedème ischémique qui conduit à l'apparition d'une hypertension intracrânienne et à une souffrance cérébrale majeure par extension de la zone d'ischémie aux territoires artériels adjacents. Lorsque l'ischémie concerne les deux tiers de l'hémisphère cérébral, la mortalité dans les sept premiers jours s'établit à 80 % environ. Cette pathologie, contrairement aux autres accidents vasculaires cérébraux, concerne majoritairement les sujets jeunes. Ses étiologies sont variées, mais, le plus souvent, cet accident est en rapport avec l'existence d'une cardiopathie emboligène ou d'une dissection carotidienne. Aucun traitement antioedémateux n'a fait la preuve de son efficacité.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature