Les grandes lignes du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004 commencent à être connues. Jean-François Mattei doit, mardi 23 septembre, les dévoiler après que les dernières prévisions de la commission des comptes de la Sécurité sociale, assez catastrophiques, auront été rendues publiques.
Mais on devrait avoir une idée assez précise des intentions du gouvernement, dès dimanche soir, par l'émission « Zone interdite » sur M6, à laquelle Jean-Pierre Raffarin doit participer. Le Premier ministre, qui a besoin de redorer un blason quelque peu terni après l'affaire de la canicule cet été et les maladresses de certains de ses ministres, aura cependant bien du mal à annoncer des mesures propres à rassurer l'opinion publique.
En effet, la situation de la Sécurité sociale est telle (16 milliards de déficits cumulés pour 2002-2003 et sans doute 15 milliards pour la seule année 2004, des déficits presque entièrement à la charge de l'assurance-maladie) que le gouvernement ne peut plus tergiverser et faire patienter l'opinion jusqu'à la réforme globale du système de protection sociale annoncée dans un premier temps pour cet automne, mais qui ne sera élaborée qu'à l'été, voire à l'automne 2004.
Pour tenter de boucher les trous ici et là, d'apporter quelques crédits ou de créer certaines économies, le gouvernement devrait annoncer des mesures concernant notamment l'hôpital et le médicament, puisqu'en l'absence d'un système de maîtrise les médecins libéraux ne devraient pas être mis à contribution, d'autant que le contact a été renoué entre les pouvoirs publics et les syndicats médicaux après plusieurs mois de crise.
200 millions d'euros
S'agissant de l'hôpital, une hausse du forfait hospitalier, qui reste à la charge du patient ou est prise en charge par sa mutuelle, a d'ores et déjà été confirmée par le ministre de la Santé devant les députés après que la nouvelle eut été dévoilée par notre confrère « Les Echos » le 17 septembre. Aujourd'hui fixé à 10,67 euros par journée d'hospitalisation, ce forfait pourrait augmenter substantiellement. Certains parlent même d'une hausse de 75 %. Jean-François Mattei a en tout cas implicitement confirmé une forte progression en annonçant devant les députés que « cette augmentation sera de l'ordre de la hausse du coût de la vie depuis 1996 ».
Une mesure que devraient dénoncer les syndicats : en effet, si ce forfait ne s'applique pas aux bénéficiaires de la CMU, il concerne ceux qui sont juste au-dessus du seuil d'attribution de la CMU (revenu mensuel de 566,50 euros pour une personne seule) et qui ne peuvent pas toujours se payer une assurance complémentaire. Mais avec cette mesure, le gouvernement compte faire économiser 200 millions d'euros par an à l'assurance-maladie.
Le médicament est sans doute le secteur avec lequel le gouvernement espère, comme c'est souvent le cas, se procurer de belles économies. Plusieurs pistes sont privilégiées par les pouvoirs publics.
Médicament : la taxe sur la promotion doublée ?
L'une est certaine ou presque : il s'agirait de doubler la taxe sur la promotion qui frappe surtout la visite médicale. Aujourd'hui, cette taxe rapporte 200 millions d'euros par an : le gouvernement envisage carrément de la doubler pour obtenir 200 millions supplémentaires. Certains échos laissent cependant penser qu'il se montrerait moins gourmand en « se contentant » d'un revenu complémentaire de 150 millions d'euros.
Autre mesure envisagée : l'abaissement du remboursement des médicaments homéopathiques. Mais le gouvernement hésitait encore cette semaine. Le danger est que l'on assiste alors à certains transferts de prescriptions vers des médicaments allopathiques ; risque faible en vérité, tant les partisans de l'homéopathie sont attachés à cette médication. Mais surtout beaucoup, parmi eux, tentaient encore de convaincre le gouvernement que le jeu n'en valait pas la chandelle. Il est vrai que les économies resteraient limitées : les médicaments homéopathiques coûtent aujourd'hui 150 millions d'euros à l'assurance-maladie ; abaisser le remboursement de 65 à 35 % reviendrait à réaliser une économie de 70 millions. Peut-être n'y a-t-il pas de petites économies.
Le gouvernement étudie aussi la réduction des taux de remboursement de certains médicaments au service médical rendu (SMR) modéré et de procéder à de nouveaux déremboursements pour les spécialités à SMR faible. Pour éviter que des recours en Conseil d'Etat n'annulent, comme cela se fait périodiquement, de telles mesures, le gouvernement va légaliser cette procédure dans le PLFSS 2004.
A l'étude encore : la fin de la liberté des prix des médicaments destinés aux hôpitaux.
Enfin, on ne négligera pas les rumeurs qui annoncent l'application d'un forfait par boîte de médicament, fixé à 0,50 euros. Une mesure qui pourrait rapporter selon certains experts jusqu'à 1 milliard d'euros. La manne serait intéressante, mais la disposition serait très impopulaire. Car si les taxes sur le tabac et les alcools forts ne devaient pas être vraiment contestées, du moins officiellement, l'application du forfait par boîte de médicament, à la charge du patient, risque de soulever des remous dans l'opinion, dont le gouvernement se passerait bien en ce moment.
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