Par le décret du 26 août 2010 les employeurs pourront mandater le médecin contrôleur (bien rémunéré) de leur entreprise afin de constater que l’arrêt de travail d’un salarié est justifié ou abusif, et leur décision fera autorité. La seule sentence d’arrêt injustifié de ce médecin contrôleur fera perdre au salarié ses indemnités journalières y compris celles versées par la Sécurité sociale.
Le seul recours du salarié est, dans les dix jours (en recommandé avec accusé de réception ?), de demander à sa Caisse de Sécurité sociale de venir constater son état. Durant cette attente le salarié malade doit-il reprendre son travail ? Le temps que la Sécurité sociale réagisse et qu’un médecin-conseil voit le patient, celui-ci sera peut-être déjà cliniquement apte à reprendre son travail ou l’aura repris ?
Le gouvernement a augmenté le pouvoir de l’employeur vis-à-vis du salarié. Et nous pouvons pressentir le fignolage du harcèlement au travail. Pour licencier un salarié, il suffit de :
1- harceler sur son lieu de travail la personne dont on veut se séparer afin de provoquer son arrêt de travail.
2- dès réception de son arrêt de travail envoyer le médecin contrôleur de l’entreprise pour qu’il prononce la sentence d’arrêt de travail injustifié.
3- obliger le salarié à reprendre immédiatement son travail en maintenant la pression.
Très rapidement cette personne craquera et donnera sa démission ou se suicidera. Quoi qu’il en soit l’employeur aura obtenu son départ à peu de frais !
Quand l’arrêt de travail est considéré comme abusif, le salarié doit obtenir l’aval de sa caisse pour un nouvel arrêt. Le harcèlement peut continuer puisque le salarié doit être présent sur son lieu de travail tant que sa caisse d’assurance-maladie n’a pas donné son aval pour un arrêt de travail. Sinon il peut être accusé d’abandon de poste et donc licencié pour faute grave. Comment doit se comporter dans ce cas ? Le salarié qui a une gastro-entérite à 8-10 selles par jour (métro, bus, RER n’ayant pas de toilettes, doit-il porter une couche-culotte ?), ou un syndrome grippal avec 39-40 °C, etc. ?
En conclusion, le gouvernement :
- donne aux entreprises un pouvoir monstrueux sur les salariés en leur permettant de peaufiner le harcèlement sur le lieu de travail. C’est ce qu’il appelle faire du social.
- déprécie le travail du Médecin-conseil de la Sécurité sociale, qui doit se soumettre à l’avis du Médecin contrôleur de l’entreprise et le valider. Le travail d’un Médecin contrôleur d’une entreprise est-il considéré comme plus objectif, plus consciencieux que le travail du Médecin-conseil de la Sécurité sociale ?
- continue à discréditer le Médecin Généraliste qui ne prescrirait d’arrêt de travail que par complaisance.
Je suis étonné que, à part l’Ordre des Médecins, ce décret ne soit pas relevé par les médias non médicaux, et n’ait révolté aucun syndicat, aucun député ni sénateur.
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