L'ANALYSE phylogénétique des virus VIH conservés en Afrique depuis le début des années 1950 tend à prouver que ce virus serait apparu au début des années 1930 dans la région centrale du continent. Actuellement, le VIH1 est majoritaire sur tous les continents et, pour ce même virus, trois groupes distincts ont été identifiés : le groupe M (majoritaire), le groupe O (outlier) et le groupe N (non-M, non-O).
Les plus anciens virus conservés appartiennent au groupe M et sont de sous-type B. En Europe et aux États-Unis – contrairement au pays de l'Afrique subsaharienne – les virus les plus fréquemment en cause dans l'épidémie sont de ce type. Mais les circonstances d'émergence de ces virus et leur origine n'était pas encore parfaitement connues.
L'analyse des VIH des premiers Haïtiens soignés aux Etats-Unis.
Pour répondre à ces questions et pour proposer une approche vaccinale adaptée, l'équipe du Dr Thomas Gilbert (Tucson) a combiné différentes approches : phylogénétique, évolution moléculaire, histoire et épidémiologie.
Deux thèses s'affrontaient jusque-là, bien que les données épidémiologiques aient été dès le début des années 1980 en faveur de l'une d'entre elles. Parmi les premiers malades recensés aux États-Unis, une majorité des hétérosexuels étaient d'origine haïtienne ou avaient voyagé, généralement dans le cadre du tourisme sexuel qui s'est développé dans les années 1970 dans ce pays.
C'est ce qui a conduit des chercheurs à développer une théorie selon laquelle le virus aurait été présent en Haïti depuis la fin des années 1960. L'autre théorie considérait que les Etats-Unis étaient le premier pays hors Afrique a être le siège d'une épidémie de VIH.
L'analyse génétique des virus VIH des premiers Haïtiens soignés aux États-Unis au début des années 1980 permet de faire un lien direct entre ces souches et les virus africains initiaux du groupe M sous-type B, alors qu'actuellement en Afrique le virus le plus fréquemment en cause est du sous-type C.
La traversée de l'Atlantique vers 1966.
Pour les auteurs, «le virus aurait traversé l'Atlantique entre 1962 et 1970, vraisemblablement vers 1966. Le virus aurait circulé sur l'île avant d'atteindre les Etats-Unis entre 1966 et 1972, vraisem-bla- blement vers 1969».
Haïti apparaît donc comme une plaque tournante de l'épidémie puisqu'il s'agit du premier pays en dehors de l'Afrique qui a été concerné par l'épidémie. L'analyse génomique a aussi permis de détecter la présence simultanée ou concomitante de plus d'une dizaines de variants du même virus VIH groupe M sous-type B. Cette donnée devra être considérée pour la mise au point d'un vaccin qui ne pourra être actif que s'il permet de lutter contre tous les types de virus en circulation. Pour le Dr Gilbert, «la diffusion du VIH serait plus en rapport avec des phénomènes écologiques qu'à des facteurs d'évolution virale. Le virus VIH aurait circulé pendant une douzaine d'années aux Etats-Unis avant que le sida soit officiellement reconnu comme maladie en 1981».
« Proc Natl Acad Sci USA », édition avancée en ligne.
Le VIH1 groupe M sous-type B en France
Les données de surveillance française au 30 juin 2005 ont fait état de 4 033 découvertes d'infection par le VIH en 2004. Il s'agissait majoritairement de VIH1 (1,3 % de VIH2) et seules 0,2 % des infections étaient en rapport avec un virus du groupe O.
Parmi les virus du groupe M identifiés, 46,2 % appartenaient au sous-type non B, contre 50,2 % en 2003. Cette baisse semble se confirmer en 2005 puisque la proportion est passée au premier trimestre à 40,3 %.
En 2004, la proportion d'infections par des virus de sous-type non B était plus élevée chez les femmes (63 % par rapport à 34 % chez les hommes), chez les sujets de moins de 40 ans (52 % contre 36 % pour les plus de 40 ans), chez les hétérosexuels (59 % contre 12 % chez les homosexuels) et chez les malades d'origine subsaharienne (79 % contre 22 %).
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