Guerre du Golfe : les propositions de la mission parlementaire

Publié le 15/05/2001
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C HACUN son travail. Aux médecins et aux scientifiques de trancher dans le débat-fleuve sur la question de l'existence ou non d'un syndrome dit de la guerre du Golfe. C'est l'objet du rapport de mission rendu par le Pr Roger Salamon et son groupe de travail (« le Quotidien » du 25 avril), à la demande des ministres de la Santé et de la Défense. Mais il faudra attendre encore « deux ou trois ans, si on fonce » pour en tirer des conclusions, une fois réalisée et analysée l'immense enquête épidémiologique sur les quelque 25 000 anciens combattants français qui ont participé à l'opération Tempête du désert.

« Nous avons mis en exergue plusieurs risques d'exposition, le plus souvent indirects, des facteurs potentiellement nuisibles au plan sanitaire, explique au « Quotidien » Michèle Rivasi, députée apparentée PS et rapporteur de la mission : la pyridostigmine, l'uranium appauvri, les gaz toxiques et les vaccins ; nous demandons qu'une enquête épidémiologique soit effectuée sur les militaires qui ont servi dans les unités où ils ont été exposés à ces quatre facteurs et qu'il est désormais possible d'identifier*. Leur nombre étant limité, cela permettra d'arriver à des conclusions bien avant les deux ou trois ans demandé par le Pr Salamon. Des conclusions qui seront beaucoup plus significatives que sur les 25 000 anciens combattants, car on évitera de "moyenner" les résultats avec des populations qui n'ont pas été exposées. »

Des études de descendance

Pour étayer son raisonnement, l'élue drômoise prend la comparaison d'enquêtes effectuées sur les personnels d'EDF, à propos des risques d'irradiations : « Il est évidemment moins significatif d'étudier les populations d'administratifs non exposées au rayonnement, plutôt que celles des salariés d'entreprises sous-traitantes présent sur le terrain. »
La mission parlementaire suggère aussi le lancement d' « études de descendance concernant les militaires ayant eu des enfants dans les cinq années suivant leur retour du théâtre d'opérations », l'installation d'un observatoire médical indépendant et, dans l'attente qu'il soit opérationnel, la création d'une cellule au sein du ministère de la Santé, pour superviser les bilans de santé des anciens combattants du Golfe, effectués au sein des « structures médicales de leur choix ».
A ces investigations épidémiologiques et au suivi médical qu'elle préconise, la mission parlementaire ajoute une réforme du code des pensions militaires avec le renversement de la charge de la preuve et l'instauration de la « présomption d'imputabilité ».

Une minirévolution

C'est une minirévolution dans une procédure où jusqu'alors c'était au plaignant qu'il revenait de fournir la preuve du lien entre sa pathologie et le fait qu'il avait servi dans une unité militaire.
Les parlementaires considèrent que cette « réelle bienveillance » à leur endroit est nécessitée par la confiance entre l'opinion publique et les armées, ainsi que, dans le contexte nouveau de l'armée de métier, par « l'attractivité de l'engagement d'hommes et de femmes au service de la défense de la nation ».
En conclusion, la mission d'information se décerne un satisfecit qu'on ne saurait lui dénier : sans les investigations qu'elle a conduites, parfois âprement, il n'aurait sans doute pas été établi que les militaires français engagés dans le Golfe s'étaient vus prescrire de la pyridostigmine, ni qu'un certain nombre d'entre eux avaient été exposés à des gaz toxiques.
« En définitive, conclut le rapport, les responsabilités relèvent davantage d'impréparations, d'imprécisions, voire de dysfonctionnement au sein de la chaîne de commandement, que d'erreurs ou de fautes dans la prévention des risques. »

* Il s'agit des militaires du 3e RIMA, du 4e RD, de l'état-major de la division Daguet, du 6e REG, du 1er REC et du 2nd REI.

Christian DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6918