La grippe, qui induit une hyperréactivité bronchique chez le sujet normal avec retour progressif à la normale en quelques semaines, est a fortiori une cause démontrée d'exacerbations d'asthme et de bronchite chronique (BPCO), rappelle le Pr D. Dusser (Paris).
Elle accroît le risque d'hospitalisations : 60 % des asthmes aigus hospitalisés dans l'étude Teichtal (1997). Sa survenue entraîne des surcoûts directs et indirects et majore le risque de mortalité chez le sujet âgé.
Il faut vacciner les sujets asthmatiques quel que soit leur âge, souligne Bruno Housset (Créteil). L'association grippe-asthme est fréquente, avec, potentiellement, des exacerbations de l'asthme.
La vaccination pas assez encouragée dans les groupes à risque
La vaccination est recommandée par de nombreuses instances. Or, le taux de vaccination, en dépit d'une efficacité certaine même chez l'enfant (entre 60 et 80 %), reste faible : moins de 30 % chez l'adulte et proche de 10 % chez l'enfant. D'une façon plus générale, estime J.-M. Cohen (Open Rome, Paris), les personnes ayant un bon de gratuité n'en font pas toujours usage. La vaccination, selon certains, n'est pas suffisamment encouragée dans les groupes à risque alors que, selon une enquête, 93 % des pharmaciens disent la conseiller.
Pourquoi tant de réticences ? La peur des exacerbations d'asthme postvaccinales semble parfois en cause. Pourtant, une étude contre placebo (Nicholson, 1998) ne montre aucune différence sept jours avant et après vaccination en ce qui concerne les hospitalisations, les consultations, les prises d'antibiotiques et de corticoïdes. Même si une hyperréactivité bronchique peut parfois être observée (chute du débit expiratoire de pointe, ou DEP, de 20 % non significative si rhinites exclues), il n'y a pas de différence significative concernant le DEP moyen. Une étude récente (Kramarz, 2000) ne montre pas d'incidence significativement accrue de crises d'asthme.
Asthme instable, parfois décompensé
Alors, comment traiter un asthmatique grippé ? Si l'asthme ne prédispose pas à la grippe, celle-ci aggrave l'asthme : majoration de l'hyperréactivité bronchique favorisant un asthme instable parfois décompensé. En pratique, il faut renforcer le traitement de fond (passer à la classe « au-dessus » de la classification GINA).
Le Pr P. Léophonte (Toulouse) met en garde contre la prescription d'AINS chez les asthmatiques. Environ 10 % d'entre eux sont intolérants à l'aspirine ; 25 % des asthmatiques hospitalisés en soins intensifs ont un asthme avec polypose nasale et intolérance à l'aspirine. A noter qu'aux Etats-Unis l'aspirine est interdite en cas d'infection virale (grippe et varicelle particulièrement à risque) et qu'en Europe une mise en garde est inscrite aux mentions légales.
Les antiviraux de type antineuraminidase (zanamivir) ne sont pas recommandés chez l'asthmatique. Ils n'ont pas l'AMM chez l'enfant. A noter cependant que, dans une étude en double aveugle contre placebo sur 11 asthmatiques, aucune différence concernant le VEMS et le test à l'acétylcholine n'a été observée. Une analyse rétrospective portant sur 321 patients à risque a relevé 35 cas d'asthme décompensé (24 sous placebo, 11 sous zanamivir). Une évaluation de K. R. Murphy et coll. (« Clin Drug Invest », 2000) chez des patients âgés de plus de 12 ans ayant un asthme ou une BPCO ne montre pas de différence significative avec le placebo en ce qui concerne le VEMS et le DEP. Le traitement de fond et la prise d'antibiotiques ont été réduits chacun d'un quart sous zanamivir. L'antiviral a raccourci l'épisode grippal de façon significative (1,5 jour et 2 jours chez les plus de 65 ans), ainsi que les journées d'hospitalisation (3 jours contre 6).
Au total, chez un asthmatique grippé, il faut systématiquement renforcer le traitement de fond et traiter une instabilité ou une décompensation selon les modalités habituelles. Selon le CDC, le zanamivir n'est généralement pas recommandé en cas de maladie respiratoire chronique. Si toutefois, précise le Pr Léophonte, une prescription était faite, il faudrait renforcer le traitement bronchodilatateur, prévenir le malade qu'il doit arrêter le traitement en cas de gêne respiratoire et se munir d'un bêta 2-stimulant.
Paris, 3e Journée d'Actualités grippe, organisée par GlaxoSmithKline.
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