Le mouvement de grève illimitée des gardes de nuit en médecine générale, commencé le 15 novembre à l'appel de l'Union nationale des omnipraticiens français (UNOF) et du Syndicat des médecins libéraux (SML) pour obtenir une revalorisation substantielle des honoraires (1), ne semble pas s'essouffler.
En fin de semaine dernière, les autorités préfectorales avaient procédé à des réquisitions de généralistes dans 38 départements (majoritairement ruraux), selon le dernier pointage des syndicats qui appellent à la grève. Le Dr Michel Chassang, président de l'UNOF, affirme que « hors Paris, la grève est suivie par 80 % des médecins de famille ». Il promet un « durcissement du mouvement » dans les prochains jours si le gouvernement continue de « jouer le mépris ». Un préavis d'extension de la grève aux week-ends et jours fériés a été déposé à compter de vendredi prochain. « La couronne parisienne commence à être touchée », affirme le Dr Chassang.
Réquisitionné huit nuits consécutives !
L'UNOF appelle les généralistes à ne travailler la nuit que sur « réquisition préfectorale exclusive », sans aucune concession. La multiplication des procédures de réquisition pose parfois de graves problèmes aux généralistes concernés, compte tenu de la démographie médicale locale. Par exemple, le Dr Philippe Colas, président de la Fédération des médecins de France (FMF) de Côte-d'or, qui exerce dans un secteur rural, a été réquisitionné huit nuits de suite. « C'est complètement délirant, explique-t-il. J'examine en moyenne 30 patients par jour, je finis après 20 heures et je suis réquisitionné la nuit pendant une semaine complète... Qu'est-ce que ça veut dire? »
Dans une demi-douzaine de départements, des actions de protestation spontanées, telles que des pétitions ou la grève de la télétransmission, se sont ajoutées au mot d'ordre officiel des syndicats (qui consiste à renvoyer sur le 15 les appels urgents entre 20 heures et 8 heures). L'UNOF exhorte ses cadres à « médiatiser » ces initiatives locales.
Anticipant le durcissement du conflit, la Fédération hospitalière de France (FHF), qui représente la quasi-totalité des hôpitaux publics, a déjà mis en garde contre le risque d'asphyxie du service public hospitalier (SAMU et urgences), notamment en période de fêtes.
A l'issue de son bureau national, SOS-Médecins France a finalement décidé de ne pas se joindre au mot d'ordre de grève des gardes de nuit, touchant quelque peu l'enthousiasme des deux syndicats à la pointe du mouvement. L'organisation d'urgentistes libéraux propose plutôt d'organiser « dans les prochaines semaines », avec les syndicats qui le souhaitent, une journée entière de suspension des soins sur l'ensemble du territoire.
Toutefois, à Lille et à Pau les associations locales de SOS se sont ralliées depuis plusieurs jours au mot d'ordre de grève des gardes. A Menton en revanche, le travail des médecins de SOS a repris. Quant au deuxième syndicat de généralistes, MG-France, il continue de soutenir le mouvement sans y participer, privilégiant la stratégie de négociation avec l'assurance-maladie (voir ci-dessous).
Le mécontentement des médecins libéraux gagne aussi les spécialistes si l'on en croit le Syndicat des médecins libéraux (SML) qui envisage le lancement d'actions de contestation dans cette catégorie de médecins.
(1) Les syndicats exigent la revalorisation immédiate du C à 20 euros et du V à 30 euros.
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