Alsace : actions fortes et spectaculaires
Les médecins alsaciens se mobiliseront nombreux, annoncent les UNOF du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, ainsi que les sections départementales de MG France.
Dans le Haut-Rhin, les médecins espéraient dans un premier temps, pour attirer l'attention des médias et du public, donner leur sang, mais le centre de transfusion sanguine n'a pas pu mettre de camion collecteur à leur disposition.
Ils organiseront cependant une conférence de presse puis se rendront au siège de la préfecture, à Colmar. Le Dr Jean-Claude Choffel, président de l'UNOF-68, n'exclut pas d'autres actions de sensibilisation du public au cours de la journée, et table sur une fermeture générale des cabinets, les spécialistes ayant décidé eux aussi de participer à la journée. Actuellement, un tiers des généralistes du département applique déja le C à 20 euros, pourcentage qui devrait progresser nettement dans les jours à venir, après qu'une assemblée générale du syndicat a appelé tous les médecins à suivre cette consigne.
Dans le Bas-Rhin, les généralistes seront rejoints dans leur mouvement par de nombreux spécialistes, ainsi que par l'Association strasbourgeoise des urgences médicales, (ASUM), structure d'urgences médicales libérales fonctionnant en coopération avec le SAMU. Le Dr Patrick Nicol, président de l'UNOF-67, attend encore la réponse définitive de SOS-Médecins, tandis que de nombreux dentistes, biologistes et paramédicaux participeront eux aussi à la journée.
« Tout le Bas-Rhin applique déja le C à 20 euros, mais de manière épisodique », précise le Dr Nicol. Aucune manifestation n'est prévue pour le moment, mais il est vrai que le conflit des médecins, très médiatisé dans la région, est désormais bien connu du public, « qui nous exprime son accord avec nos revendications », précise le Dr Nicol. Les médecins d'Illkirch, au sud de Strasbourg, ont d'ailleurs été les premiers de la région à lancer une consigne locale de C à 20 euros dès début janvier, ce qui a recueilli un écho considérable dans la presse régionale.
Les médecins d'Illkirch, qui font souvent des actions spectaculaires à l'occasion des grèves et des journées d'action, ne distribueront pas, cette fois, de café et de croissants à la population dans un stand installé en ville : « La météo ne s'y prête vraiment pas », explique le Dr Patrice Loeb.
Enfin, MG-67 invite ses adhérents à fermer le 23 janvier : « Nous voulons une revalorisation correcte de nos actes dès maintenant, et non pas des promesses pour dans un an », explique le Dr Claude Bronner, pour qui « plus il y aura de cabinets fermés, plus les revalorisations auront des chances d'aboutir vite ». En revanche, le Dr Bronner ne pousse pas les médecins à appliquer dès maintenant systématiquement un C à 20 euros, et préfère les encourager à utiliser plus fréquemment le DE, « lorsque celui-ci est justifié ».
Nord - Pas-de-Calais : vers 100 % de cabinets fermés
Dans le Nord - Pas-de-Calais, les médecins fourbissent leurs armes pour la journée du 23, et les fermetures de cabinets risquent de friser les 100 % tant le mécontentement semble généralisé. La CSMF mobilise ses adhérents depuis de nombreuses semaines et annonce déjà « d'autres actions dures et répétées » après le 23 janvier. Le ton est donné.
En effet, déjà très remontés, les praticiens du Nord n'ont guère apprécié les négociations engagées entre la CNAM et MG-France. « Jean-Marie Spaeth ment lorsqu'il dit que nous n'avons fait aucune proposition, fulmine Yves Dablemont, président de l'UNOF-59. Une fois de plus, on va signer un protocole d'accord avec un syndicat minoritaire, qui sera dénoncé trois mois plus tard. C'est devenu une habitude française ».
Bien décidés à exprimer leur mécontentement, les médecins prévoient des manifestations dans chaque grande ville de la région : à Lille, tous les médecins se rendront au centre de transfusion sanguine, pour donner leur sang ; à Tourcoing, ils participeront à une opération humanitaire en organisant une collecte de médicaments. A Valenciennes, c'est un forum-débat qui est prévu au Grand Hôtel pour toucher les usagers, les associations de malades et tous les acteurs de santé. « Ce qui se passe en ce moment concerne au premier chef les usagers et il nous semble indispensable d'expliquer aux Valenciennois ce que va devenir notre système de santé », explique le Dr Alain Masclet, vice-président de la CSMF.
Une fois n'est pas coutume : MG-France va se joindre au mouvement, du moins dans le Pas-de-Calais. « Nous participons déjà à la grève des gardes et des télétransmissions, et nous nous associons à la "Journée sans toubib", explique Fabrice Patte, responsable de MG-France à Arras . Les paroles de la ministre ont allumé la mèche malencontreusement. Et ceux qui n'étaient pas encore motivés le sont devenus. »
Localement, les praticiens fermeront donc leur cabinet, tout comme sur la Côte d'Opale où une coordination a vu le jour début janvier pour la revalorisation de la profession. « Nous sommes en désaccord complet avec les responsables nationaux, confie Philippe Lévisse, adhérent MG-France et membre de la coordination. Nous voulons bien négocier à un certain niveau mais il faut d'abord mettre les pendules à l'heure. » Le 23, ces praticiens participeront donc au don du sang organisé à Boulogne-sur-Mer.
Dans le Nord, en revanche, MG-France-59 n'appelle pas à la grève : « Je trouve anormal que l'on se désolidarise du syndicat national, estime Pierre Gheeraert, responsable pour le Nord. Individuellement, certains médecins fermeront peut-être leur cabinet, mais je ne lance aucun mot d'ordre. »
Rhônes-Alpes : un front syndical commun
Les médecins sont déterminés, si l'on en croit les leaders départementaux de la CSMF de la région Rhône-Alpes.
Outre la fermeture des cabinets médicaux, divers autres modes d'action originaux ont été choisis ce jour-là, qui vont des « petits déjeuners syndicaux conviviaux jusqu'à l'appel au don de sang au centre de transfusion départemental ». Les syndicalistes de la Loire et du Rhône, où la FMF, la CSMF et le SML font front commun, privilégient conférences de presse et rencontres avec les journalistes.
Dans l'Isère, indique le Dr Bernard Rougier, président départemental de la CSMF, la grève générale du 23 janvier « débutera dès mardi soir à l'heure de la prise des gardes, jusqu'au jeudi matin 24 ».
Mode d'action original, la confédération propose aux médecins qui auront fermé leur cabinet de se rendre au centre de transfusion sanguine de Grenoble, à l'hôpital de La Tronche, entre 8 heures et 13 heures, pour y effectuer un don. « Comme partout en France, commente le Dr Rougier, il y a en Isère une pénurie de dons de sang. Ce geste sera fortement symbolique. » La journée de mobilisation se poursuivra par une opération portes ouvertes à la Domus Medica et s'achèvera sur un rassemblement à la faculté de médecine iséroise. Le Dr Emile Olaya, responsable de la chambre syndicale de l'Ardèche, invite « tous ses collègues du département ayant déserté leur cabinet à rallier le centre de transfusion d'Annonay ». Le rendez-vous y est fixé à partir de 9 heures, avec « petit déjeuner syndical et convivial ».
Dans la Loire, bastion régional de la CSMF, « nous savons d'ores et déjà que plus de 80% des cabinets médicaux seront fermés », assure le Dr Bertrand Millon, à Saint-Etienne. Le président départemental de la confédération ajoute que, localement, « l'unité syndicale CSMF-SML-FMF est très forte », et qu'elle vient d'être rejointe par SOS-Médecins, ainsi que par une kyrielle d'autres organisations syndicales et professionnelles du monde de la santé : « Nous venons d'enregistrer le soutien du syndicat des chirurgiens-dentistes du département », conclut-il.
Enfin aux yeux du Dr Danièle Atayi, présidente de la CSMF du Rhône, il était important, mais évidemment un peu délicat à expliquer pour une journée de mobilisation, de « ne pas trop faire de battage médiatique » en raison des positions divergentes des différentes organisations à propos de cette journée : dans ce département, où la FMF reste majoritaire chez les médecins libéraux, la CSMF a donc « résolument choisi de privilégier l'unité d'action CSMF-FMF-SML », et se contentera d'une conférence de presse commune. « Quitte à abandonner toute idée d'action spectaculaire et donc à moins attirer le regard des médias, confie le Dr Atayi, nous avons préféré privilégier le long terme, le travail et la réflexion de fond, en commun ».
PACA : des leaders et des médecins
très remontés
La tension est forte en région Provence- Alpes-Côte d'Azur (PACA) entre les dirigeants de MG-France et les autres syndicats.
« Il n'est pas question, explique le Dr Jacques Martin, responsable de MG France dans les Bouches-du-Rhône, de donner aux médecins un mot d'ordre de grève et de fermeture des cabinets médicaux, avec des organisations qui ne visent finalement qu'un seul objectif, d'ailleurs clairement affiché : supprimer la convention spécifique aux généralistes qui a été créée grâce à MG-France et qui a apporté de multiples avantages à tous les généralistes ».
Une position que ne rejoint pas, on s'en doute, le Dr François Chrétien, délégué de la CSMF pour la région PACA. Il condamne sévèrement la position des « leaders de MG-France, qui jouent en l'occurrence les briseurs de grève ». Heureusement, dit-il, « un très grand nombre d'adhérents de MG-France dans la région ne suivront absolument pas ce mot d'ordre et fermeront avec nous leur cabinet ».
Le Dr Chrétien va encore plus loin dans sa dénonciation de la position de MG lorsqu'il affirme au « Quotidien » « qu'il ne laissera pas les briseurs de grève, jouer les margoulins, et profiter de la grève des autres pour multiplier les actes ». Il a donc demandé aux médecins en grève de perturber le travail de ceux qui exerceront ce jour-là, en multipliant les faux appels, en donnant des adresses et des noms erronés pour des visites, bien sûr complètement inventées.
« Nous suivrons à la trace ces médecins », s'emporte encore le Dr Chrétien qui trouve tout à fait justifiée cette initiative « dans la mesure où l'on ne peut tolérer que quelques médecins seulement portent tort à l'immense majorité du corps médical ».
Reste que, pour le Dr Jacques Martin, les syndicats qui appellent à la grève, sont « irresponsables » et en tout état de cause, dit-il, « on ne peut appeler à la grève alors que l'on est en pleine négociation avec les caisses. S'il y échec, il sera alors temps de passer à l'action ».
Pour le Dr Jean-François Giorla, responsable du Syndicat des médecins libéraux, (SML), « la mobilisation sera forte, et nombreux seront les médecins qui se réclament de MG-France qui nous rejoindront pour cette journée ».
Mais le syndicat n'appelle à aucune manifestation ni rassemblement : ce jour-là, « nous conseillons aux médecins, conclut Le Dr Giorla, de se reposer, de s'occuper d'eux et de leur famille ». En attendant, d'autres actions, peut-être plus dures, si « le gouvernement se montre toujours aussi intransigeant ».
Paris : MG-France n'appelle pas à la fermeture
« Après avoir pris l'avis des médecins de Paris membres de MG-France, nous avons décidé de ne pas appeler à la fermeture des cabinets dans la capitale », explique le Dr Alex Maire, responsable de cette organisation à Paris.
Pour ce généraliste qui exerce dans le dix-huitième arrondissement, il est impossible, en pleine négociation avec l'assurance-maladie, d'appeler les médecins à faire grève. « Il sera toujours temps d'agir après, si échec il y a », dit-il.
Pour le Dr Maire, l'objectif des autres syndicats est de « casser la convention spécifique aux généralistes, alors même qu'elle a fait ses preuves et aidé à moderniser la médecine générale, par l'option référent, la visite de maintien à domicile ou la visite d'urgence... Il faut poursuivre dans cette voie en incitant la CNAM à aller encore plus loin. C'est ce que nous essayons de faire avec les négociations actuelles ».
Pour le Dr Maire, la CSMF et le SML, par leur « intransigeance et les illusions qu'ils donnent aux médecins vont le pousser au désespoir et au déconventionnement ».
« Ces syndicats vont, une nouvelle fois, droit dans le mur », assure-t-il.
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