En matière de transplantation rénale à partir de cadavre, la politique américaine, depuis 1990, est de donner la priorité aux receveurs qui ont six compatibilités HLA avec le donneur. Cette compatibilité HLA donne en effet un avantage en termes de survie.
Par ailleurs, en raison d'une politique de partage des greffons, un des deux reins prélevés à un endroit peut être expédié loin de là sous ischémie froide, l'autre étant greffé à l'endroit du prélèvement. Mais on ne sait pas avec précision si une ischémie froide prolongée affecte la survie du greffon. Pour en savoir plus, des équipes américaines (Kevin Mange et coll.) ont conduit une vaste étude qui a inclus des patients ayant reçu un rein de cadavre entre le 1er janvier 1990 et le 31 décembre 1998. Le travail a porté sur des paires de reins dont l'un était greffé localement et l'autre était expédié dans un autre centre de greffe : au total 5 446 paires de reins de cadavre pour 10 892 transplantations.
Dans cette cohorte de 10 892 greffés, 17 % avaient un greffon sans incompatibilité HLA. Parmi les greffons ayant voyagé, 31,4 % étaient transplantés à des receveurs sans incompatibilité. Entre 1990 et 1998, la proportion de greffons « voyageurs » transplantés à des receveurs sans incompatibilité est passée de 17,4 à 43,5 %.
A première vue, les résultats sont encourageants : après prise en compte de plusieurs variables (âge, sexe et ethnie du donneur et du receveur ; cause de l'insuffisance rénale ; expérience du centre de transplantation, année de la transplantation), on n'a pas noté d'augmentation du risque de défaillance des greffons voyageurs au cours de la première année.
Un risque accru en cas d'incompatibilité HLA
Cependant, après ajustement pour le nombre d'incompatibilités HLA, on a noté, au cours de la première année après la greffe, un risque accru de 17 % de défaillance rénale pour les greffons voyageurs. L'ajustement pour la durée de l'ischémie froide atténue le risque de défaillance associée au voyage pendant la première année, après prise en compte de l'incompatibilité. Cela suggère que le degré d'incompatibilité et la durée de l'ischémie froide influencent la survie des greffons voyageurs la première année. Au-delà de la première année, il n'y avait plus de lien entre le voyage et la survie, que le greffon soit compatible ou non.
La durée de l'ischémie froide
« Nous avons trouvé une plus forte proportion de défaillance du greffon (17 %) dans la première année chez les receveurs de greffons avec incompatibilité ayant voyagé », constatent les auteurs, qui rappellent que, selon Takemoto et coll., la demi-vie des greffons HLA compatibles est supérieure à celle des greffons incompatibles (12,4 ans contre 8,6 ans). Pour Held et coll., le risque de défaillance du greffon, premièrement s'accroît de 6 % à chaque incompatibilité HLA ; deuxièmement s'accroît de 8 % toutes les douze heures d'ischémie froide.
« Nos résultats suggèrent que le degré d'incompatibilité HLA et la durée d'ischémie froide sont des déterminants importants de la survie des greffons voyageurs, mais l'effet de l'un efface les effets de l'autre. »
« Nous n'avons pas trouvé d'association significative entre le transport et la survie du greffon à un an et les reins sans incompatibilité. Après la première année, il n'y avait pas d'association significative entre le transport et la survie du greffon, qu'il y ait ou non incompatibilité HLA. Nous suggérons que la survie des greffons transportés pourrait être accrue par une meilleure compatibilité. »
« Nous concluons que le transport de greffons rénaux est associé à un taux accru de défaillance dans la première année mais pas après. Les greffons voyageurs les plus compatibles pourraient avoir un bénéfice de survie à court terme par rapport aux organes sont moins compatibles et transplantés localement. »
« New England Journal of Medicine » du 25 octobre 2001, pp. 1237-1242.
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