De notre correspondante
à New York
Les lymphocytes T (thymodépendants) sont les effecteurs principaux de l'immunité cellulaire, assurant de nombreuses fonctions, comme la lyse des cellules infectées par des virus et le rejet des greffes. Ce sont aussi les principales cellules régulatrices des fonctions des lymphocytes T et B et des monocytes, grâce à la production de cytokines et à des contacts directs de cellule à cellule.
Les lymphocytes T ne reconnaissent pas les protéines à l'état natif ni les antigènes. Ce sont les cellules présentatrices d'antigènes (CPA) qui assurent la dégradation des protéines antigéniques et qui présentent à leur surface les fragments peptidiques (liés à la molécule du complexe majeur d'histocompatibilité ou CMH), fragments qui sont alors reconnus par les récepteurs des lymphocytes T (TCR). La reconnaissance du peptide antigénique entraîne l'activation lymphocytaire T, avec des signaux d'activation transmis jusqu'au noyau, qui entraînent l'expression de gènes importants pour assurer la grande diversité des fonctions des cellules T. Les cellules présentatrices d'antigènes aux cellules T sont principalement les cellules dendritiques/cellules de Langerhans, et plus modestement les monocytes/macrophages.
L'étude de greffés cardiaques n'a pas fait de rejet
Une équipe, dirigée par le Dr Nicole Suciu-Foca de l'université de Columbia à New York, montre maintenant in vitro qu'un sous-groupe de lymphocytes T suppresseurs (des cellules T CD8 + CD28 -), spécifiques de l'antigène présenté, augmente l'expression de deux récepteurs ILT3 et ILT4 (Immunoglobulin-Like Transcript 3 et 4) sur les CPA - cellules dendritiques et monocytes - et réduit ainsi l'activité des CPA (les CPA deviennent « tolérogéniques »). Ces CPA tolérogéniques présentent une expression réduite des molécules costimulatrices et induisent une absence de réponse, spécifique pour l'antigène, dans les cellules T CD4+ helper.
Les chercheurs ont aussi analysé le sang de 15 patients ayant reçu une greffe cardiaque (dans les six à huit mois précédents). Ils ont constaté que les 5 patients qui n'ont pas rejeté la greffe présentent des lymphocytes T suppresseurs CD8 + CD28 - capables d'induire l'augmentation d'expression d'ILT3 et ILT4 sur les CPA de leur donneur (leurs lymphocytes T ont par conséquent été sensibilisés pour supprimer une réponse au greffon cardiaque), tandis que les mêmes lymphocytes T suppresseurs des 10 autres patients qui ont présenté un épisode de rejet de greffe ne sont pas capables d'induire cet effet. D'autres lymphocytes T régulateurs (avec d'autres phénotypes), ainsi que leurs cytokines, pourraient avoir le même effet, notent les chercheurs.
Vaccins tolérogéniques ou immunogéniques
D'autres stratégies qui inhibent l'expression des molécules costimulatrices sur les CPA, comme les traitements par les corticoïdes, la vitamine D3, peuvent aussi générer des CPA tolérogéniques, remarquent Chang, Suciu-Foca et coll.
Ces données, concluent les chercheurs, « suggèrent que la modulation de l'expression d'ILT3 ou ILT4 sur les CPA pourrait permettre de développer des vaccins tolérogéniques ou immunogéniques ».
Cela pourrait être mis à profit pour le diabète type 1 ou d'autres maladies auto-immunes, mais pour l'instant l'équipe du Dr Suciu-Foca travaille sur l'utilisation possible d'ILT3 et ILT4 pour traiter les patients transplantés, ou ceux atteints de SIDA ou de cancer.
« Nature Immunology », 28 janvier 2002, DOI : 10.1038/ni760.
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