Les greffes intestinales sont proposées depuis quelques années pour pallier la composante digestive des défaillances multiviscérales survenant en réanimation. Dans le service de réanimation de l'hôpital de Miami, 160 transplantations de ce type ont été effectuées depuis 1994. L'un des problèmes le plus souvent rencontrés tient à la difficulté de suturer les parois abdominales chez ces patients, qui ont souvent déjà bénéficié de laparoscopie ou qui ont présenté des fistules ou des abcès. Pour cette raison, l'équipe du Dr David Levi propose une nouvelle technique de chirurgie réparatrice dans les suites des greffes intestinales : l'allogreffe simultanée ou différée de la paroi abdominale.
Des allogreffes composites de tissus ont été tentées avec succès depuis quelques années chez des sujets amputés des membres supérieurs. Les chirurgiens de Miami ont mis à profit les progrès en matière d'immunosuppression réalisés dans le cadre de ces greffes pour mettre en place un protocole spécifique pour les allogreffes de paroi : induction par alemtuzumab suivi à long terme de tacrolimus sans recours à une corticothérapie.
Paroi prélevée avec l'intestin
Les résultats préliminaires, présentés dans le « Lancet », concernent 8 patients, âgés de 1 à 53 ans atteints de pathologies diverses : ischémie mésentérique, gastroschisis, maladie de Hirshprung, traumatisme par accident de la voie publique, volvulus intestinal ou plaie par arme à feu. Pour 5 patients, la paroi a été prélevée dans le même temps que l'intestin (et, pour certains patients, l'estomac, le foie, le duodénum ou le pancréas), alors que, pour les autres, le prélèvement a eu lieu sur un autre donneur (soit en raison d'un désaccord de la famille, soit parce que la greffe de paroi a été effectuée de façon différée).
Les chirurgiens ont choisi de ne pas prendre en compte le typage HLA et de ne se fonder que sur la compatibilité ABO.
Deux des patients sont décédés dans les suites de l'intervention (choc septique) et les autres ont été suivis de 1 à 23 mois. Deux des survivants ont présenté une réaction de rejet de moyenne intensité qui a pu être traitée efficacement par corticothérapie. Un enfant de 2 ans a souffert d'un infarctus de la paroi greffée qui, de ce fait, a dû être ôtée. Pour tous les autres sujets, la surveillance clinique et les biopsie de peau effectuées de façon régulière n'ont pas montré de signe de rejet.
Les greffes différées
Il semblerait, au vu de ces premiers résultats, que les greffes différées soient dotées d'un meilleur pronostic que les greffes simultanées. Cette particularité pourrait être liée au fait que les greffes intestinales s'accompagnent d'un oedème majeur à très court terme et que les greffes différées après résorption de l'oedème permettent une meilleure cicatrisation de la paroi.
Pour le Dr Levi, « ces résultats sont prometteurs. Jusqu'à présent, on attribuait le bon pronostic des allogreffes des mains au fait que de la moelle osseuse était greffée de façon obligatoire et qu'elle pouvait limiter les réactions de rejet. Or les allogreffes de paroi ne comportent qu'une transplantion de peau, de muscles et de graisse et, de ce fait, la bonne tolérance ne peut être en rapport qu'avec le traitement immunosuppresseur ».
« The Lancet », vol. 361, pp. 2173-2176, 28 juin 2003.
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