De notre correspondante à New York
L' ECHEC de transplantation rénale après plusieurs années de fonction correcte est considéré comme dû à un « rejet chronique ». Sur ces greffons se développe une néphro-angiosclérose avec une prolifération de l'intima des vaisseaux rénaux et une fibrose intimale, ainsi qu'une fibrose interstitielle. Ce remodelage tissulaire est médié par des cellules mésenchymateuses (myofibroblastes, dans l'interstitium, et cellules musculaires lisses, dans la néo-intima vasculaire) dont on ignore l'origine. Naissent-elles dans le greffon lui-même, ou sont-elles issues de cellules précurseurs circulantes ? Autrement dit, viennent-elles du donneur ou du receveur ?
Grimm (université de San Diego, La Jolla) et coll. ont tenté de répondre à cette question. Ils ont examiné des biopsies de 14 greffes rénales en rejet chronique (toutes dans les six mois de la transplantation, à l'exception de deux cas).
Identifier le chromosome Y
A l'aide de méthodes immunohistochimiques, ils ont identifié les cellules mésenchymateuses, en marquant en rouge l'alpha-actine contenue spécifiquement dans ces cellules. Puis en utilisant l'hybridation in situ et une sonde ADN marquée en bleu, ils ont identifié le chromosome Y dans les cellules mésenchymateuses. Ils ont ensuite compté le nombre et le pourcentage de cellules mésenchymateuses contenant le chromosome Y (autrement dit le nombre de cellules rouges à noyau bleu).
Dans 6 des 14 greffes rénales, les receveurs étaient des hommes et le donneur une femme ; dans quatre autres cas, c'était l'inverse ; enfin, chez les quatre derniers, les receveurs et les donneurs étaient de même sexe, soit 2 témoins positifs (masculins) et 2 négatifs (féminins).
Leurs résultats sont les suivants. Dans le groupe des 2 témoins positifs, 40 % des cellules mésenchymateuses contiennent le chromosome Y, tandis que chez les 2 témoins négatifs, aucune n'en contient, bien évidemment. Dans le groupe des 6 hommes receveurs d'un greffon féminin, le pourcentage de cellules mésenchymateuses contenant l'Y est de 34 % dans la néo-intima (ou tunique interne), de 38 % dans l'adventice (ou tunique externe) et de 30 % dans l'interstitium (ou tissu de soutien). Cela indique que des cellules mésenchymateuses du receveur (Y) infiltrent ces compartiments du greffon rénal soumis à un rejet chronique.
Dans le groupe des 4 femmes receveuses d'un rein masculin, le pourcentage de cellules mésenchymateuses contenant l'Y est de 24 % dans la néo-intima, de 33 % dans l'adventice et de 23 % dans l'interstitium. Cela indique qu'il persiste aussi une large proportion de cellules mésenchymateuses du donneur dans le greffon rénal soumis au rejet chronique.
Migrer vers les zones inflammatoires du greffon
Ces résultats, concluent les chercheurs, suggèrent qu'une cellule précurseur mésenchymateuse circulante peut migrer vers les zones inflammatoires du greffon. Cette découverte pourrait être exploitée pour tenter de prévenir ou de traiter le rejet chronique. En effet, proposent les chercheurs, le blocage de la migration des cellules musculaires lisses pourrait peut-être offrir une approche pour prévenir ou améliorer le rejet chronique. A cet égard, ajoutent-ils, une possibilité intéressante pourrait être d'inhiber le signal local du hyaluronan aux cellules musculaires lisses. Ce signal contrôle en effet leur prolifération et leur mobilité. Ce signal pourrait être inhibé, par exemple, par les antagonistes du récepteur pour le hyaluronan.
« The New England Journal of Medicine », 12 juillet 2001, p. 93.
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