Greffe de moelle : de meilleurs résultats avec un donneur infecté par le CMV

Publié le 07/10/2001
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Généralement, quand il s'agit de faire un don de moelle, les transplanteurs préfèrent des donneurs indemnes de cytomégalovirus. La crainte étant une contamination du receveur. Pourtant, une étude, publiée dans le « Lancet », montre un net bénéfice chez des leucémiques ayant reçu la moelle de donneurs infectés par le CMV. Bénéfice sur la survie lié à de moindres rechutes, au prix de réaction greffon contre hôte plus fréquentes.

Ces conclusions surprenantes émanent d'une étude rétrospective menée à l'hôpital universitaire d'Innsbruck (Autriche). David Nachbaur et coll. ont analysé 103 patients consécutifs atteints de leucémie. Tous âgés de plus de 10 ans avaient bénéficié d'une transplantation de moelle entre 1983 et 1998 à partir de culture de lymphocytes mixtes de parents compatibles dans le système HLA.

Les receveurs HLA-A2 positifs

Des associations, à but statistique, ont été créées entre donneurs et receveurs selon qu'ils étaient séronégatifs ou séropositifs pour le CMV. Entre ces divers groupes, aucune différence significative n'a été relevée sur la totalité de la cohorte. Cependant, la positivité au virus du donneur augmentait significativement la survie globale, en diminuant le nombre des rechutes chez les receveurs HLA-A2 positifs. Une situation non retrouvée chez les receveurs HLA-A2. Certes, les réactions du greffon contre l'hôte ont été plus fréquentes dans le groupe HLA-A2 + (26 % contre 0 %). Mais même en l'absence de cette réaction, la survie a été augmentée, dès lors que le donneur était infecté (52 patients contre 19).
L'infection à CMV a été diagnostiquée chez 5 des 38 receveurs à donneur négatif et chez 12 des 65 receveurs à donneur positif, sans différence d'incidence de l'infection entre les sujets HLA-A2 positifs et négatifs. En analyse multivariée, il est apparu que la séropositivité au CMV, le risque standard de rechute et la jeunesse déterminaient significativement la survie globale en cas de compatibilité HLA ainsi que chez les sujets HLA-A2 positifs, mais pas chez ceux HLA-A2 négatifs.
A la suite de leur analyse, les auteurs ont tenté de comprendre le phénomène. Ils supposent une interaction entre des mécanismes médiés par des lymphocytes cytotoxiques T dérivés du donneur, spécifiques du CMV, et des antigènes mineurs d'histocompatibilité particuliers aux receveurs HLA2-A2. « Bien que l'association entre CMV et réaction du greffon contre l'hôte - complication majeure médiée par les cellules T à la suite de la greffe de moelle allogénique - soit fréquemment observée, les mécanismes exacts d'une quelconque interaction entre le virus et la maladie ne sont pas clairs », concluent les auteurs.

« Lancet », vol. 358, 6 octobre 2001, p. 1157-1159.

Dr Guy BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6983