LA PORPHYRIE AIGUE intermittente, la plus fréquente des porphyries hépatiques, est un trouble métabolique autosomique dominant. Elle résulte d'un déficit partiel en porphobilinogène déaminase, enzyme impliquée dans la synthèse de l'hème. Si le génotype a une prévalence élevée (1/1 675), seulement 10 % des personnes qui portent la mutation présentent des symptômes.
La porphyrie aiguë intermittente et la porphyrie par déficit en acide 5-amino-lévulinique déshydratase diffèrent des autres porphyries par des crises neuroviscérales et l'absence de manifestation cutanée.
Facteurs déclenchants.
Les crises sont cinq fois plus fréquentes chez les femmes et sont souvent déclenchées par des facteurs qui accroissent la demande de synthèse de l'hème : médicaments, alcool, stress, jeûne. Les crises commencent par des coliques, des vomissements et une constipation ; manifestations auxquelles peuvent s'ajouter une rétention urinaire, une tachycardie, une hypertension labile. Une neuropathie motrice transitoire est parfois notée. Des crises convulsives peuvent aussi survenir et sont difficiles à traiter car la plupart des médicaments antiépileptiques sont contre-indiqués. Une HTA chronique et une insuffisance rénale chronique peuvent se développer, spécialement chez les patients qui ont des crises récurrentes. Parmi les autres complications : le carcinome hépatocellulaire, même en l'absence de cirrhose.
Le diagnostic repose sur une excrétion urinaire accrue de porphobilinogène et d'acide 5-amino-lévulinique au cours d'une crise.
La prise en charge de la maladie comporte un apport élevé en hydrates de carbone, la correction du déséquilibre hydroélectrolytique, l'analgésie, l'évitement des facteurs déclenchants. Les crises sévères peuvent parfois être partiellement contrôlées par l'administration d'hème arginate et le blocage de l'ovulation.
Si la plupart des patients ont des crises rares, entre 5 et 10 % ont des épisodes aigus répétitifs. Ce qui peut conduire à une addiction pour les opiacés et à une dégradation du réseau veineux ; des hospitalisations fréquentes et des sepsis liés à des abords vasculaires répétés contribuent à une mauvaise qualité de vie et à une réduction de l'espérance de vie.
Dans ce contexte, des Britanniques rapportent l'histoire d'une jeune femme de 19 ans qui, depuis deux ans et demi, a des crises régulières, avec douleurs abdominales sévères, douleurs dans les jambes, hyponatrémie, hypotension, urines rouge foncé. Les crises n'ont pas de rapport avec son cycle menstruel ; d'ailleurs, le blocage de l'ovulation n'a pas d'effet. En vingt-neuf mois, elle a été hospitalisée trente-sept fois, soit 197 jours. Elle développe une microalbuminurie et une insuffisance rénale modérée. Après les hospitalisations répétées, il n'y plus d'accès vasculaire ; on met en place un cathéter veineux central tunnélisé, mais il y a des complications septiques.
Dans la famille de cette patiente, il y a notion de porphyrie aiguë intermittente : sa tante en est morte à 35 ans ; sa mère et deux frères portent la mutation.
Partant du principe qu'une restauration de l'activité de la porphobilinogène-déaminase hépatique doit prévenir les crises, on pratique une transplantation hépatique avec foie de cadavre. Les suites sont simples, sans rejet aigu. Elle reçoit pendant trois mois un traitement par prednisolone, azathioprine et tacrolimus ; puis azathioprine et tacrolimus.
Disparition des crises.
Les concentrations urinaires de précurseurs de l'hème reviennent à la normale. La patiente n'a plus aucune crise. Elle est greffée depuis un an et demi : sa vitesse de conduction nerveuse est normale, sa qualité de vie est bonne.
« Nous avons montré que la porphyrie aiguë intermittente peut être traitée avec succès par transplantation hépatique ; le remplacement enzymatique peut restaurer des taux normaux d'acide 5-amino-lévulinique et de porphobilinogène, et prévenir les crises. »
« Lancet », du 28 février 2004, pp. 705-706.
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