Grandeur et tentations

Publié le 06/12/2014
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L’agitation médicale est violente. Même si plusieurs gouvernements de gauche et de droite ont déjà eu par le passé maille à partir avec les médecins, comme ce fut le cas en 1997 avec Juppé ou plus récemment avec la loi HPST de Sarkozy et Bachelot, la grogne s’installe à nouveau, profitant de la faiblesse du pouvoir. Le terreau est favorable à la rébellion. Les élections professionnelles radicalisent les discours et créent des alliances de circonstances. Seule une opposition frontale paye. Les grèves de Noël des cabinets libéraux, au-delà d’un comportement carabin qui aime la fête, sont dangereuses pour le pays. La réforme de Marisol Touraine est l’élément catalyseur de tous ces mécontentements dans les cabinets et les cliniques en attendant l’hôpital. Pourtant la ministre tente quelques réformes de fond, alors qu’on lui reproche le plus souvent son inaction. Le tiers payant généralisé, le service public hospitalier et quelques mesures d’organisation assez floues au demeurant sont depuis longtemps des chiffons rouges pour les libéraux. Marisol Touraine s’y est, en fait, depuis le début, mal prise avec le corps médical dans son ensemble. Sa réforme a été bâclée et divise les acteurs inutilement. Mais le malaise est plus profond. Les médecins, comme leurs concitoyens, ont peur face aux crises, aux changements de société, économiques et d’organisation qu’apportent le progrès et la modernité. Ils craignent de perdre leur capacité à faire. « La technique est génératrice de déclassement », nous dit le sociologue Frédéric Pierru (cf. dossier). Qu’ils soient libéraux et hospitaliers, médecins ou soignants, ils sont soumis aux mêmes contraintes et opportunités. Jean Bernard ne nous avait-il pas avertis ?

Bonnes fêtes et bonne nouvelle année.

PM

Source : Décision Santé: 299