Bien avant le second tour de l'élection présidentielle, les grandes manuvres avaient commencé, en coulisses, pour tenter de trouver une solution politique rapide au conflit des médecins qui dure maintenant depuis près de six mois.
Presque assurée de la réélection de son chef de file, l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) s'est empressée de réunir entre les deux tours l'ensemble des représentants des professionnels de santé pour les assurer une nouvelle fois de sa bonne volonté à leur égard (« le Quotidien » du 29 avril). « La page est tournée et nous allons aborder les choses avec une philosophie nouvelle », avait expliqué alors Jean-François Mattei, député DL des Bouches-du-Rhône, en estimant « qu'une nouvelle négociation conventionnelle sur les actes et la nomenclature doit commencer immédiatement ».
Les choses semblent se préciser. De nombreux contacts auraient eu lieu entre l'Elysée et les organisations de médecins à l'origine du mouvement de contestation. A cette occasion, des assurances auraient même été données concernant leurs principales revendications, à savoir le passage de la consultation à 20 euros promise par le candidat Jacques Chirac et la suspension des pénalités financières contenues dans le règlement conventionnel minimal pour les spécialistes. Des conditions posées par ces syndicats à la reprise des négociations avec les caisses.
« Si les bonnes nouvelles arrivent (avec la formation du nouveau gouvernement, NDLR), nous prendrons nos responsabilités, c'est-à-dire que nous arrêterons le mouvement », a d'ailleurs déclaré à l'AFP Michel Chassang, président de la CSMF. « Les mesures immédiates que nous demandons, dès mardi, et qui ne nécessitent pas de passage législatif, sont, premièrement, la revalorisation de la consultation à 20 euros et de la visite à 30 euros, deuxièmement, la suppression des pénalités financières pour les médecins spécialistes qui exercent en secteur I et, troisièmement, l'arrêt des poursuites en tout genre contre les médecins », a précisé Michel Chassang. « Il suffit de deux arrêtés, cela peut se faire en quatre minutes. Cela serait une décision politique et, de toute façon, cela va dans le cadre de ce qu'a déjà dit Jacques Chirac », a-t-il poursuivi.
Alain Juppé, grand ordonnateur de l'après-présidentielle, n'a pas, en tout cas, l'intention de négliger cette fois le corps médical. Il a indiqué que le gouvernement qui sera nommé cette semaine « devra commencer à ouvrir le dossier des retraites et à traiter le problème de notre système de santé qui se porte très mal ».
La CNAM multiplie les rencontres
Du côté de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM), on s'activerait également pour renouer le dialogue avec les organisations qui ont systématiquement refusé depuis cinq ans de signer les conventions médicales, à savoir, le plus important syndicat de médecins libéraux, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), et le Syndicat des médecins libéraux (SML). Jean-Marie Spaeth aurait organisé des entrevues très officieuses avec leurs dirigeants qui doivent en principe se prolonger cette semaine, avant l'ouverture officielle de négociations avec l'ensemble des syndicats médicaux la semaine prochaine.
Rien n'a filtré de ces entrevues, mais, à l'occasion de rencontres bilatérales organisées la semaine dernière avec deux organisations de médecins spécialistes, l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (UCCSF) et la Fédération des médecins de France (FMF), le président de la CNAM aurait en partie levé le voile sur ses intentions.
Si l'on en croit l'un des responsables syndicaux présents, Jean-Marie Spaeth devrait proposer aux syndicats médicaux un « accord d'orientation pour la rénovation conventionnelle ». Il serait prêt, dans ce cadre, à envisager un compromis avec la CSMF en acceptant la suspension des pénalités financières contenues dans le règlement conventionnel minimal des spécialistes durant la période des négociations, c'est-à-dire au plus tard jusqu'à la fin de l'année.
Si la question de négocier une convention unique ou deux conventions séparées n'a pas été évoquée, il ne serait pas question pour lui de dénoncer la convention actuelle des médecins généralistes pendant la durée des négociations. En outre, il serait prêt à s'attaquer au problème de la retraite des médecins et de prendre en compte les problèmes de responsabilité civile qui préoccupent beaucoup certaines spécialités médicales. De son côté, l'UCCSF, qui estime que les discussions « sont désormais bien engagées avec l'assurance-maladie », a revendiqué un geste en faveur des chirurgiens et des anesthésistes qui se traduirait par la création d'un forfait rémunérant « l'acte lourd » que représente la décision d'hospitaliser un patient et l'ouverture d'un dossier médical d'hospitalisation. Une demande sur laquelle les services de l'assurance-maladie devraient plancher.
Enfin, les quatre syndicats de médecins spécialistes ont décidé se retrouver, le 10 mai à Nice, pour faire le point de leurs positions respectives et essayer de coordonner leurs revendications dans le cadre des négociations à venir. Mais, pour le président de l'UCCSF, le Dr Jean-Gabriel Brun, il est hors de question d'approuver la proposition du président de l'UMESPE (affiliée à la CSMF), consistant à s'engager à ce qu'un syndicat ne signe la convention seulement avec un autre syndicat, et à condition qu'ils représentent ensemble une majorité du corps médical.
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